Prix de la laïcité 2010 : (2) Présentation par Patrick KESSEL, Président du Comité Laïcité République

1er octobre 2010

1. Bienvenue

Je souhaite la bienvenue aux 350 participants de la 5e édition du Prix de la Laïcité organisé par le Comité Laïcité République.

Patrick Kessel, Président du Comité Laïcité République - ©Maxime Kaar / CLR

Je remercie notamment le Maire de Paris, Bertrand DELANOE et Anne HIDALGO, Première adjointe au Maire de Paris, amie de longue date du Comité Laïcité République grâce à qui cette manifestation de remise des prix se tient depuis plusieurs années dans les murs l’Hôtel de Ville de Paris.

Je remercie également Madame Yamina BENGUIGUI, adjointe au maire de Paris, qui a largement contribué à établir les liens avec les lauréats.

Parmi les représentants d’associations et de personnalités, je veux citer notamment :

  • Daniel BENICHOU, Président de l’association du Chevalier de la Barre,
  • Lucien BITTERLIN, Président de l’association de solidarité franco-arabe,
  • Marc BLONDEL, Président de la Libre Pensée,
  • Martine CERF, Secrétaire générale de l’association « EGALE »,
  • Jean-Pierre CHANGEUX, Président du jury du Prix de la Laïcité,
  • Michel CHARZAT, ancien parlementaire,
  • Sidi DIENG, Sénateur de la république du Sénégal,
  • Charles ETZER, ancien Ambassadeur d’HAÏTI,
  • Caroline FOUREST, Journaliste,
  • Guy GEORGES, Président d’honneur de « Solidarité Laïque »
  • Sabrina GOLDMAN, Déléguée exécutive de la Licra,
  • Jacques BRAVO, Maire du 9ème arrondissement de Paris,
  • Sihem HABCHI, Présidente de « Ni Putes Ni Soumises »,
  • Michel HANNOUN, ancien parlementaire,
  • Rafik HASSANI, Député algérien,
  • André HENRI, ancien ministre,
  • Jean-Paul LILIENFELD, Réalisateur du film « La Journée de la Jupe »,
  • Anne-Marie LIZIN, Présidente honoraire du Sénat belge, ancien ministre,
  • Albert MEMMI, écrivain,
  • Denise OBERLIN, Présidente de la Grande Loge Féminine de France,
  • Henri PENA-RUIZ, Professeur, auteur de nombreux ouvrages reconnus sur la laïcité,
  • Yves PRAS, Président du « Mouvement Europe et Laïcité »,
  • Jean-Michel QUILLARDET, Président de l’Observatoire de la Laïcité,
  • Jean-Luc ROMÉRO, Président de l’ADMD (Association pour le Droit à Mourir dans la Dignité)
  • Saïd SAADI, Député, Président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) au Parlement algérien,
  • Sasi SADOUN, Co-fondatrice du Rassemblement algérien des femmes démocrates,
  • Dominique SOPO, Président de SOS RACISME
  • Claude VAILLANT, Vice-président du Grand Orient de France,
  • Monique VENIZET, Présidente de l’UFAL,
  • Alain VIVIEN, Député honoraire, ancien ministre,
  • Issa WACHILL, Mission de la Palestine auprès de l’UNESCO.
  • Linda WEIL-CURIEL, Fondatrice avec Simone de BEAUVOIR de la Ligue Internationale des Femmes.
  • Jean-Pierre WEISSELBERG, Grand secrétaire au Grand Orient de France.

Je présente les excuses de :

  • Elisabeth BADINTER, Fondatrice du CLR,
  • Pierre BERGÉ, fidèle compagnon de route du CLR dont il est fondateur,
  • Henri CAILLAVET, ancien ministre, ancien président du CLR,
  • Philippe DECHARTRE, ancien ministre,
  • Madame Michelle VIANES, Présidente de « Regard de Femmes ».

2. LE CLR

Le CLR a été créé en 1991 à l’occasion de la première « affaire du voile » qui traduisait déjà une lente mais périlleuse dérive de la laïcité. C’est le moment où certains intellectuels avaient dénoncé un « Munich des consciences », quand le pouvoir politique s’était en quelque sorte dessaisi du dossier, en le transmettant au Conseil d’Etat.

Parmi ses fondateurs :

  • Maurice AGULHON,
  • Pierre BERGÉ,
  • Henri CAILLAVET,
  • Jean-Pierre CHANGEUX,
  • Régis DEBRAY,
  • Alain FINKIELKRAUT,
  • Gisèle HALIMI,
  • Catherine KINTZLER,
  • Albert MEMMI,
  • Claude NICOLLET,
  • Jean-Claude PECKER,
  • Yvette ROUDY,
  • Claude VILLERS,

Les fondateurs du Comité Laïcité République avaient estimé le temps venu de prendre une initiative pour défendre la laïcité menacée, contestée, affaiblie, parfois trahie.

3. QUELQUES ACTIONS DU CLR

En vingt ans, le CLR a mené de nombreuses actions, organiseé des dizaines de colloques, de manifestations, à chaque fois que cela a été possible avec d’autres associations.

  • Le CLR s’est ainsi impliqué en faveur du projet d’interdiction du port ostentatoire des signes religieux à l’école et avait plaidé en ce sens à l’occasion de son audition par la commission STASI.
  • De la même façon, le CLR a soutenu le projet de loi d’interdiction de la burqa dans les lieux publics et a plaidé en ce sens devant la commission GERIN. Le texte vient d’être adopté ; le Comité Laïcité République, qui avait appelé dans un courrier l’ensemble des parlementaires à dépasser les clivages politiques pour défendre la laïcité et la dignité des femmes, s’en félicite. Ce n’est pas qu’une question de laïcité, mais d’abord de dignité des femmes.
  • Le Comité Laïcité République s’est également exprimé clairement contre les velléités de toilettage de la loi de séparation des Eglises et de l’Etat (loi dite de 1905). Ces velléités s’étaient en particulier exprimées à l’occasion des discours du Président de la République à Riyad, mais aussi à Latran, où il fut dit que « l’instituteur (....) ne pourra jamais remplacer le curé dans l’apprentissage du bien du mal ».
    Je précise qu’il convient d’espérer que la prochaine visite officielle du Président de la République au Vatican permettra de corriger ces dérives sémantiques.
  • Le CLR a également vivement critiquél’accord récemment signé entre la France et le Vatican prévoyant la reconnaissance par la République de diplômes religieux, remettant en cause le monopole public des diplômes.
  • Le CLR s’est élevé également contre la récente loi Carle qui élargi le financement des écoles privées et confessionnelles alors que nous avons tant besoin de ressourcer et de promouvoir l’école républicaine et laïque.
    Rappelons-le, l’école a pour vocation de former non des petits « blancs », des petits « noirs », des petits « rouges », des catholiques, des musulmans, des protestants, des juifs, des agnostiques ou des athées, mais d’instruire des enfants pour qu’ils apprennent à maîtriser les outils de la connaissance, à penser par soi-même, à choisir librement leur vie, bref à devenir des citoyens libres et égaux en droit.

Tel est le message principal que nous a transmis la révolution française et qu’il faut préserver comme l’a, avec tant de talent, illustré le film de Jean-Paul LILIENFELD, « la Journée de la Jupe », dont il sera traité un peu plus tard. Un projet fondé sur une idée toujours révolutionnaire qui affirme que « Toutes les femmes et tous les hommes quelles que soient leur couleur, leurs origines, leur sexe, leurs appartenances philosophiques ou religieuses, leur sexualité, naissent et demeurent libres et égaux en droit ».

Ce projet est loin d’être achevé. C’est un projet formidable, ouvert à toute l’humanité, d’une étonnante actualité, universelle, et qui pourrait donner des idées aux futurs candidats en 2012. C’est pourquoi le CLR sera très présent dans le débat pour la prochaine élection présidentielle et formulera à l’attention des candidats des propositions pour renforcer cette laïcité.

Malheureusement le projet de citoyenneté est aujourd’hui menacé, notamment par le retour du religieux en politique, par l’affaiblissement du service public et par la montée en puissance du communautarisme. Derrière ce mot, il y a une volonté de traiter les hommes et les femmes en fonction de leur naissance, de leur couleur, de leurs appartenances. On commence par une dérogation à la loi commune, on poursuit par des droits différents, on termine par des discriminations, des ségrégations, des affrontements entre communautés. Cette politique fait des ravages dans les écoles de la République, dans les hôpitaux publics, dans certains quartiers. Elle fragilise l’équilibre républicain et nourrit une pensée populiste et réactionnaire, raciste, qui gonfle en Europe.

C’est pourquoi le CLR

  • S’est inquiété des tentatives de mettre en place des statistiques ethniques,
  • S’est opposé à la mise en place de politiques différencialistes qui visaient par exemple, avec les meilleures intentions du monde, àréserver certains horaires des piscines municipales à telle ou telle partie de la population.
  • C’est pourquoi ces derniers jours le Comité Laïcité République a vivement dénoncé la circulaire ministérielle qui permettait l’expulsion de Rom sur une base d’appartenance communautaire, et nous disons haut et fort qu’une citoyenneté à deux vitesses qui traiterait de façon différenciée les Français d’origine française et les Français dits « d’origine étrangère » serait inacceptable.

Ces principes : la Liberté, l’Égalité, la Fraternité, la Laïcité ne sont pas négociables. Ils constituent le plus beau cadeau que la France ait offert à l’Humanité. Ils ont nourri l’image d’une France généreuse, porteuse d’une éthique universelle, même si elle les a parfois oubliés pour écrire certaines pages sombres. Mais voilà, ces principes se trouvent aujourd’hui dénoncés, détournés, combattus par ceux-là même qui lapident, torturent, exécutent, nous opposent une prétendue vérité de Dieu.

Nos amies, Malka MARCOVITCH et Caroline FOUREST, ont écrit des pages décisives sur les enjeux actuels au sein des Nations Unies.

Il ne faut pas céder. C’est pour nous une exigence morale surtout quand nous pensons à celles dont la vie est en jeu.

Le CLR s’est mobilisé dans le passé en faveur de Taslima NASREEN, de Salman RUSHDIE, du philosophe Robert REDEKER, des journalistes caricaturistes danois, de Ayan HIRSI ALI.

Aujourd’hui, je souhaite et je vous propose que cette cérémonie de remise des Prix de la Laïcité soit dédiée à cette jeune femme condamnée à la lapidation et à travers elle à toutes les femmes, iraniennes, soudanaises, afghanes...menacées parce que femmes libres, j’ai nommée Sakineh MOHAMMADI ASHTIANI.

(Vifs applaudissements de la salle.)

4. LE PRIX DE LA LAICITE

Tel est le sens de l’engagement du Comité Laïcité République. Notre mobilisation, depuis des années, a peut-être contribué à ce sentiment d’un frémissement, d’un retour en force de la laïcité en France et dans nombre de pays européens quel que soit le nom que l’on peut lui donner.

C’est pour promouvoir ces valeurs que le Comité Laïcité République interviendra dans la perspective de 2012 pour défendre et promouvoir la laïcité.
C’est aussi pour populariser ces valeurs qu’a été crée le Prix de la Laïcité.

Les anciens lauréats en sont :

En 2003

Le prix international a été décerné à Chahdortt DJAVANN (écrivaine iranienne menacée et pourchassée dans son pays par les ayatollahs) Le prix national a été décerné à Fadela AMARA (Présidente de Ni Putes Ni Soumises pour soutenir le combat des jeunes femmes, particulièrement des quartiers difficiles pour qui la laïcité est une définition essentielle de la liberté)

En 2005

Le prix international a été décerné à Maurizio TURCO (député européen) Le prix national a été décerné à Caroline FOUREST et Fiammetta VENNER (journalistes pour leurs ouvrages sur la laïcité)

En 2007

Le prix international a été décerné à Naser KHADER (député danois d’origine syrienne pour avoir défendu les caricaturistes danois menacés de mort par les intégristes. Lui même et sa famille ont été menacés.) Le prix national a été décerné au café « La Mer à boire ». (Jeune équipe menacée par des intégristes après une exposition de photos donnant à voir des visions caricaturales des extrémistes religieux de tous bords.)

En 2009

Le prix international a été décerné à Nadine ABOU ZAKI (journaliste libanaise rédactrice en chef d’une nouvelle revue féminine) Le prix national a été décerné à Guillaume LECOINTRE (chercheur au muséum d’histoire naturelle et par ailleurs journaliste engagé dans le combat pour la liberté de la recherche)

2010

Sans déflorer les noms que le jury a retenus pour cette année, il est important de noter qu’il a souhaité souligner deux idées force de la laïcité :

  • Le droit à mourir dans la dignité,
  • L’indispensable réhabilitation de l’école républicaine, des enseignants et particulièrement des instituteurs qui sont en première ligne.

Il me reste à remercier mon ami Jean-Pierre CHANGEUX, membre de l’Institut, Chef du département des neurosciences à l’Institut Pasteur, Professeur au Collège de France, Président d’honneur du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, auteur de nombreux ouvrages, notamment de « L’Homme Neuronal ». Ce chercheur de renommée mondiale explore le cerveau des Hommes depuis de longues années. Quel beau symbole pour présider le jury du Prix de la Laïcité !

Je lui laisse le soin de présider la cérémonie de remise du prix 2010, merci à tous et par avance félicitations aux lauréats.




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