11 février 2024
[Les éléments de la Revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]
"Analyse Entre autres missions, le nouveau ministre délégué à la santé devra porter, aux côtés de la ministre Catherine Vautrin, le projet de loi sur la fin de vie ouvrant un possible accès à l’aide à mourir. Un rôle qui risque de se heurter aux convictions qu’il a exprimées quand il était député de la majorité.
Antoine d’Abbundo, le 10/02/2024 à 07:00
Lire "Fin de vie : le dilemme du ministre Frédéric Valletoux".
La nomination, jeudi 8 février, du député Horizons Frédéric Valletoux comme ministre délégué à la santé chargé, entre autres, aux côtés de la ministre Catherine Vautrin, du dossier sur la fin de vie, suscite des réactions pour le moins contrastées parmi les principaux acteurs concernés. Le message de félicitations publié sur le réseau social X (ex-Twitter) par Claire Fourcade, présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP), laisse percer une certaine satisfaction après des mois de relations plus que tendues avec sa prédécesseure Agnès Firmin Le Bodo.
« Cette arrivée est un motif de satisfaction car nous allons pouvoir reprendre un dialogue apaisé et constructif. Mais nous restons vigilants car si Frédéric Valletoux a déjà exprimé, par le passé et à de multiples reprises, que la priorité devait être le développement des soins palliatifs, il devra également porter un projet de loi ouvrant à l’aide à mourir qui nous préoccupe », confirme Claire Fourcade, interrogée par La Croix.
Un message au vitriol
À l’opposé, l’association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), qui milite activement pour une évolution de la loi, ne cache pas son inquiétude, teintée d’une certaine amertume. « On ne sait pas encore si cette nomination est une mauvaise nouvelle, mais on est sûr que ce n’en est pas une bonne. Il reste à espérer que ce n’est pas un revirement, voire une forme de trahison des engagements pris par le président Macron de répondre à la demande de patients qui réclament le simple droit de pouvoir choisir », s’alarme Philippe Lohéac, délégué général de l’organisation.
Dans un message au vitriol également publié sur le réseau X, la juriste Martine Lombard, une des figures majeures du mouvement pro-euthanasie, voit même dans cette nomination « une déclaration de mépris à l’égard du souhait de près de 90 % des Français qu’a faite Emmanuel Macron en désignant comme ministre de la santé Frédéric Valletoux, c’est-à-dire l’un des très rares députés de sa mini-majorité à s’être publiquement prononcé contre toute légalisation de l’aide à mourir ».
Elle fait référence à deux tribunes cosignées par le nouveau ministre délégué à la santé qui ont marqué le débat public sur la fin de vie. La première a été publiée par le quotidien Le Monde le 22 juin 2023 et réunit six députés aux convictions politiques différentes, allant de LR au PCF en passant par la majorité présidentielle et le parti socialiste. Dominique Potier, député PS de Meurthe-et-Moselle, figure parmi les signataires.
Un dilemme terrible
« Dans ce texte, nous exposions trois convictions fortes au nom d’un même humanisme », souligne-il. « D’abord, la nécessité d’entendre l’inquiétude de la plupart de nos soignants qui nous disent que la relation de soin est un bien commun, une alliance entre le malade et le patient qui doit être protégé et que le lieu où l’on soigne ne peut être celui où l’on donne la mort. Ensuite, l’obligation collective, au nom de la fraternité, à développer l’offre de soins palliatifs qui nous semble un préalable éthique avant d’envisager une évolution de la loi. Enfin, le devoir d’attention aux plus vulnérables, aux plus isolées, l’expérience des pays étrangers ayant légalisé l’euthanasie montrant que ce sont ceux là qui sont les premiers concernées par les demandes de mort anticipée par crainte de peser. »
La seconde tribune est, elle, parue dans l’hebdomadaire L’Express le 28 septembre 2023. Cette fois, le collectif transpartisan de 12 députés, dont Frédéric Valletoux, appelle le gouvernement à disjoindre de son projet de loi en préparation le volet qui concerne le développement des soins palliatifs de celui qui touche à l’aide active à mourir. « Ces deux objets ne peuvent et ne doivent se trouver dans un même texte », écrivent-ils car le premier fait l’objet d’un consensus alors que le second suscite la controverse éthique. « Il nous est apparu que combiner dans un même texte des questions par essence si différentes reviendrait à fausser le débat démocratique », souligne Dominique Potier qu’on retrouve parmi les signataires.
Reste à savoir si, maintenant qu’il est en charge [1] du portefeuille de la santé, Frédéric Valletoux restera ferme sur ses positions et quelle est exactement la feuille de route que lui a fixée l’Élysée. « Ce qui est sûr, c’est que s’il doit porter une loi fin de vie qui ouvre le droit à la mort programmée, ce sera un dilemme terrible pour lui », confie un proche."
[1] "chargé" (note de la rédaction CLR).
Voir aussi dans la Revue de presse la rubrique Fin de vie,
les éditos Fin de vie : les religions auront-elles le dernier mot ? (G. Abergel, 28 fév. 23), Le droit à mourir dans la dignité : un combat laïque (P. Kessel, 18 mars 10),
Avec la participation du CLR "Le modèle français d’accompagnement à la fin de vie doit permettre le suicide assisté et l’euthanasie" (Pacte progressiste sur la fin de vie, 2 oct. 23) dans Pacte progressiste sur la fin de vie,
la VIDEO Webinaire "Un droit fondamental : le droit à mourir dans la dignité" (CLR, 17 fév. 22), le Colloque "Fin de vie, la liberté de choisir" (CLR, Paris, 28 oct. 17),
les communiqués du CLR Droit de mourir dans la dignité : le Comité Laïcité République dénonce le poids exorbitant des morales religieuses (10 oct. 03), Droit de mourir dans la dignité : un droit inaliénable pour tout être humain (15 oct. 04),
dans les Initiatives proches ADMD, Terra Nova B. Poulet : "Je ne veux pas aller en Suisse" (tnova.fr , 2 mars 23) et dans les Liens Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité (ADMD), Le Choix Citoyens pour une mort choisie (note de la rédaction CLR).
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