Revue de presse

Le camp d’été interdit aux blancs fait polémique (lepoint.fr , 25 août 16)

28 août 2016

"Un séminaire "antiraciste" interdit aux Blancs ? C’est ainsi qu’est présentée la rencontre "non mixte" qui se tient jusqu’au 28 août à Reims.

Le « camp décolonial » sur le thème de « l’antiracisme politique » fait couler beaucoup d’encre. Ouverte jeudi 25 août et prévue jusqu’à dimanche, au Centre international de séjour de Reims, la manifestation fait scandale. « Le camp s’inscrit dans la tradition des luttes d’émancipations décoloniales anticapitalistes et d’éducation populaire », affiche benoîtement le site internet de l’événement, auquel assistent 180 participants.

« À l’approche de la campagne présidentielle, il semblait important que nous, les concerné·e·s par le racisme d’État, soyons préparés à être les sujets principaux des discours politiques. Pour cela, nous vous proposons de nous réunir afin de se former, de partager et de nous renforcer pour les luttes et mobilisations à venir. C’est indispensable ! » expliquent Sihame Assbague et Fania Noël, co-organisatrices de l’événement.

Anti-blanc ?

Pas de quoi fouetter un chat, a priori. Oui, mais voilà... la manifestation est « non mixte ». Comprenez : « interdite aux Blancs ». Ses organisatrices ont beau dire que leur manifestation n’est nullement anti-blanc. Elle est bel et bien réservée aux seules « victimes de racisme structurel », excluant de facto les personnes caucasiennes, pour reprendre une terminologie anglo-saxonne. « Quels que soient les groupes sociaux dominés concernés, il nous semble que oui, la non-mixité est une nécessité politique », peut-on lire sur le site internet présentant le programme de ce séminaire.

Si « le camp d’été est réservé uniquement aux personnes subissant à titre personnel le racisme d’État en contexte français », écrivent les organisatrices, « nous accepterons cependant quelques inscriptions de personnes subissant le racisme d’État, mais vivant dans d’autres pays ».

Une opération de « com »

Sihame Assbague et Fania Noël énoncent leurs intentions sur une page présentée comme une « foire aux questions ». Elles y indiquent clairement que « les observateurs » (traduction : les journalistes) ne sont pas les bienvenus. Elles ajoutent que « le camp d’été n’est ni un terrain anthropologique ni un vivier à idées pour militantes. Il s’agit d’un espace pour créer des mobilisations politiques d’émancipation. » Le programme du séminaire comprend, de fait, des ateliers et des tables rondes établissant des parallèles entre « capitalisme et racisme », des formations visant à « construire une campagne de mobilisation » et des « résistances » allant de la « lutte anti-négrophobie » au « féminisme décolonial », en passant par la « désobéissance civile ». La dernière table ronde s’intitule d’ailleurs « 2017 : la construction d’un rapport de force est-elle possible ? »

Ses organisatrices ne sont pas des inconnues des médias. Sihame Assbague, qui affiche son hostilité à la laïcité française qu’elle qualifie d’« islamophobe », milite dans plusieurs associations : le Collectif contre le contrôle au faciès, le Conseil représentatif des associations noires (Cran), les afroféministes ou encore le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF). Fania Noël, d’origine haïtienne, est porte-parole du collectif Stop au contrôle au faciès.

Une injure faite au combat antiraciste et à la République

La tenue de ce camp a suscité une grande polémique sur les réseaux sociaux. La Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) est très vite montée au créneau. « Rosa Parks doit se retourner dans sa tombe », proteste Alain Jakubowicz, son président. Pour cet avocat, la manifestation rémoise « est une injure faite au combat antiraciste et à la République, et ceux qui en ont pris l’initiative sont des imposteurs. [...] Prétendre qu’il faut avoir été victime d’une discrimination pour la combattre est une aberration qui, sous couvert d’antiracisme, établit une ségrégation qui n’a rien à envier aux assemblées du Ku Klux Klan ou aux pires pavillons des expositions coloniales. Séparer les Noirs des Blancs pour lutter contre le racisme est la négation même du combat pour l’égalité. » Son association a appelé les internautes à se mobiliser sur les réseaux sociaux pour dénoncer ces « pseudo-antiracistes », selon ses termes.

Gilles Clavreul, délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme (Dilcra), dénonce lui aussi ce séminaire. « Le racisme d’État, c’est le régime nazi, c’est l’apartheid. Cela ne peut pas s’appliquer à la République française. Ce procès d’intention, on ne peut pas l’accepter », a-t-il affirmé sur France Info.

Sur son compte Twitter, le camp décolonial « oublie » de se présenter comme « antiraciste », se contentant d’affirmer qu’il est une « formation politique militante, radicale et décoloniale ». Le séminaire a reçu le soutien de Madjid Messaoudene, conseiller municipal Front de gauche de Saint-Denis.

Au moment où sont publiées ces lignes, ni SOS Racisme, ni le Mrap, ni le Cran, autres associations antiracistes, n’avaient officiellement pris position sur ce « camp ». Il est vrai que la question de l’existence d’un « racisme anti-blanc » est loin de faire l’unanimité au sein de ces formations. La Licra estime que ce racisme est une xénophobie comme une autre et a d’ailleurs obtenu, dans un arrêt du 29 mars 2016 de la cour d’appel de Lyon, la condamnation pour injures à caractère racial à trois mois de prison ferme d’un individu ayant traité un autre de « sale Français, sale Blanc » lors d’une altercation intervenue à bord d’un train.

Rien ne permet d’interdire cette rencontre à ce jour

Pour Martine Solczanski, directrice du centre de séjour qui dépend de la ville de Reims, le séminaire n’interfère pas avec les principes de non-discrimination défendus par son établissement. « Nous avons traité leur demande de réservation comme tous les groupes, et professionnellement, ça ne me pose pas de problème », a-t-elle déclaré à l’AFP. « Rien ne permet d’interdire cette rencontre à ce jour », a, quant à elle, la ville de Reims, qui siège au conseil d’administration du centre de séjour et s’est entretenue avec l’organisation de ce stage aux « intentions discutables ». [...]"

Lire "Pourquoi le "camp décolonial" fait polémique".



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