11 novembre 2017
"Une pétition lancée vendredi par une enseignante s’insurge « contre ces combats féministes qui abîment la langue ». Un collectif de professeurs adresse une lettre ouverte à Jean-Michel Blanquer.
Entre pétition et lettre ouverte, les opposants à l’écriture inclusive, dont de nombreux enseignants, commencent à s’organiser. Professeur de lettres au lycée Saint-Louis-de-Gonzague, à Paris, fréquenté il y a peu par Brigitte Macron, Emmanuelle Fontenit a créé vendredi 10 novembre une contre-pétition sur le site change.org destinée au ministre de l’Éducation. « J’espère qu’elle permettra de contrer les Trissotin des temps modernes », nous indique cette enseignante qui entend représenter la « majorité silencieuse ». Elle souhaite ainsi s’opposer à la pétition lancée par le professeur de lettres Eliane Viennot laquelle prône l’abandon de la règle qui veut que le masculin l’emporte sur le féminin.
Intitulée « Contre ces combats féministes qui abîment la langue française », la pétition d’Emmanuelle Fontenit débute ainsi :
« Entre écriture dite « inclusive » et retour sur des règles appliquées depuis des siècles sans que personne n’y ait rien trouvé à redire jusqu’à maintenant, certains idéologues ont décidé de mener une attaque en règle contre notre langue, déjà bien mise à mal par des pratiques pédagogiques débiles qui ont abîmé des générations d’écoliers, collégiens, lycéens. Ceux-ci ne savent plus écrire sans faire de fautes grossières.
Il est temps d’arrêter le massacre. Que la voix de la majorité silencieuse s’élève enfin pour soutenir un combat vraiment légitime : permettre à tout enfant de France d’acquérir les bases élémentaires de l’orthographe et de la grammaire !!! Et non pas leur bourrer le crâne d’insanités sous prétexte de « féminisme ».
Nous souhaitons donc voir bannir de l’Education Nationale tout manuel, « apprentissage », ou méthode propre à semer la confusion dans les esprits en formation dont nous, professeurs, avons la charge. »
L’anti exemple canadien
De son côté le collectif Condorcet « regroupant des enseignants et des parents d’élèves qui refusent les réformes mettant à mal l’Éducation Nationale » a envoyé une lettre ouverte à Jean-Michel Blanquer au sujet de l’écriture inclusive, « avec un regard nouveau, celui du Canada qui en a connu une utilisation massive il y a 20 ans, puis s’en est détaché ».
« Loin de vouloir attiser conflits et polémiques, nous souhaitons éviter que la lutte au quotidien pour l’égalité entre les femmes et les hommes - idée louable en soi - ne se transforme en erreur fatale pour notre société, toujours imprégnée par un idéal de clarté, d’intelligibilité, voire d’élégance (...) .
Et cette erreur serait la propagation de l’écriture inclusive dans le quotidien des Français, et plus particulièrement dans le contexte de l’école, que ce soit dans un manuel scolaire, tel que l’ouvrage Magellan et Galilée Questionner le monde, destiné aux élèves de CE2 et publié en mars 2017 par Hatier, ou dans un récent document de rentrée émanant de l’Inspection Pédagogique à destination des enseignants de Lettres dans l’académie de Lyon (rédigé en écriture inclusive. Ndlr).
Le Canada, autre grande nation francophone, s’est ainsi penché sur cette question de l’égalité entre les femmes et les hommes à travers le langage. Si l’on observe de près ce qui s’est passé dans la province de l’Ontario dans les années 90, on peut constater que l’écriture inclusive y était en usage. Leur réflexion a continué à s’enrichir des apports de leur expérience, et dès 2002 l’Office of Francophone Affair a publié un « Guide de rédaction non sexiste » dans lequel il préconise d’éviter la graphie inclusive, indiquant que : « Le recours aux parenthèses, points, barres obliques et traits d’union gêne la lisibilité et ne respecte pas la grammaire. » Cette présentation graphique semble d’ailleurs contre-productive au regard de l’égalité, puisque, plaçant le masculin en premier, au contact de la racine, elle le fait toujours « l’emporter sur le féminin », relégué et isolé par un point. (...)
Pourquoi ne pas se servir de l’expérience et des conclusions du Canada qui a compris il y a 20 ans déjà l’impasse que représente l’écriture inclusive et a su la dépasser sans faire de concession sur l’égalité hommes/femmes ? Avons-nous besoin nous aussi de tester une catastrophe annoncée ? (...)
Les résultats de tests le montrent : nos élèves sont déjà en décrochage par rapport à la lecture standard. La maîtrise de la langue à l’école élémentaire ainsi que le principe de plaisir lié à la lecture sont des priorités absolues. Retrouver de la sérénité à l’école, tant au niveau des élèves qu’à celui du corps enseignant, mais aussi dans la société, est également une priorité. Mais comment être une nation « une » si la langue nous divise jusqu’au cœur de sa graphie ? »"
Lire "L’appel des anti-écriture inclusive à Jean-Michel Blanquer".
Voir aussi la pétition "Contre ces combats « féministes » qui abîment la langue française", "Écriture inclusive : un outil d’exclusion" (I. Riocreux, causeur.fr , 3 nov. 17), "L’écriture inclusive porte atteinte à la langue elle-même" (D. Bona, franceculture.fr , 27 oct. 17), Ecriture "inclusive" : "la langue française se trouve désormais en péril mortel" (Académie française, 26 oct. 17), "Langue française et écriture : la confusion des genres" (G. Konopnicki, Marianne, 13 oct. 17), "Féminisme : les délires de l’écriture "inclusive"" (Le Figaro, 6 oct. 17), Ecriture "inclusive" : "Apprivoisez la novlangue égalitaire" (Le Figaro, 6 oct. 17), Écriture "inclusive" : "Pour les grammairiens, le masculin est aussi neutre" (Le Figaro, 6 oct. 17), "Ecriture inclusive" : « L’inculture rejoint l’hypocrisie » (A. Bentolila, lefigaro.fr/vox , 26 sep. 17), Raphaël Enthoven : "L’écriture "inclusive" est un négationnisme vertueux" (Europe 1, 26 sep. 17), "Un manuel scolaire écrit à la sauce féministe" (lefigaro.fr , 22 sep. 17), "Féminisation des titres et des fonctions" (Académie française, 14 juin 84), "La féminisation des noms de métiers, fonctions, grades ou titres" (Académie française, 10 oct. 14) (note du CLR).
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