Revue de presse

"Oscillations…" (D. Medioni, Ernest, 3 juin 24)

David Medioni, journaliste, fondateur et rédacteur en chef d’Ernest 16 juin 2024

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"[...] Pourquoi ce mot est-il resté dans la tête. Obligeant à chercher. Obligeant à interroger. Et si cette persistance traduisait un sentiment profond, plus large, d’une oscillation permanente des pensées, des certitudes, des peurs aussi. Alors que l’interrogation était présente, ce qui a occupé l’esprit est la relecture du livre de Stefan Zweig, « Le Monde d’hier ». Quelques passages s’imposèrent. « Peu à peu, il devint impossible d’échanger avec quiconque une parole raisonnable. Les plus pacifiques, les plus débonnaires étaient enivrés par les vapeurs de sang. Des amis que j’avais toujours connus comme des individualistes déterminés s’étaient transformés du jour au lendemain en patriotes fanatiques. Toutes les conversations se terminaient par de grossières accusations. Il ne restait dès lors qu’une chose à faire : se replier sur soi-même et se taire aussi longtemps que durerait la fièvre. »

Un autre : “ J’ai été le témoin de la plus effroyable défaite de la raison. […] Cette pestilence des pestilences, le nationalisme, a empoisonné la fleur de notre culture européenne.” La pestilence des amuseurs dangereux de la télé du tycoon Breton, la pestilence d’un homme autrefois républicain qui flatte désormais le communautarisme et l’antisémitisme les plus abjects, la pestilence pourrie et fourbe d’une extrême droite qui tente de faire croire qu’elle est différente alors qu’elle n’a changé en rien. La pestilence d’un pays qui se vautre dans ces bêtises.

Encore : “Cette houle se répandit si puissamment , si subitement sur l’humanité que, recouvrant la surface de son écume, elle arracha des ténèbres de l’inconscient , pour les tirer au jour, les tendances obscures, les instincts primitifs de la bête humaine, ce que Freud, avec sa profondeur de vue, appelait “le dégoût de la culture” , le besoin de s’évader une bonne fois du monde bourgeois des lois et des paragraphes et d’assouvir les instincts sanguinaires immémoriaux.”
Dégoût de la culture. Nous y sommes aussi, tant l’abrutissement issu des logiques algorithmiques semble inarrêtable.

Et toujours : “C’était toujours la même clique, éternelle à travers les âges, de ceux qui appellent lâches les prudents et faibles les plus humains, pour demeurer eux-mêmes désemparés au moment de la catastrophe.”
Oscillations dans les mots des écrivains qui résonnent avec l’actualité. Celle du nationalisme rampant, rejet des autres, à l’inverse du patriotisme qui constitue l’amour des siens. Celle de cette furie populiste, xénophobe et antisémite qui menace de s’abattre sur la France et l’Europe

Furie alimentée par les deux extrêmes de la tenaille identitaire. Osciller entre colère et tristesse. [...]"



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