18 mars 2020
[Les articles de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]
"Les opposants à Jacques-Alain Bénisti (LR) l’accusent de s’être assis sur le principe de laïcité, vendredi après-midi. Lui dit avoir répondu à une « invitation », comme « à toutes les élections ».
Par Corentin Lesueur.
Drôle d’orateur pour une fin de prière, vendredi après-midi, à la mosquée de Villiers. Micro-casque sur la tête, accompagné de son ajointe à la cohésion sociale, Monique Facchini, le maire (LR), Jacques-Alain Bénisti, est venu dire « un petit bonjour » aux fidèles. Et bien leur rappeler « qu’il va y avoir les élections municipales bientôt ».
« Il faut que la démocratie soit présente et que chaque candidat puisse s’exprimer auprès de vous », s’est d’abord justifié l’édile, immortalisé dans une vidéo captée par son opposant et adversaire, Adel Amara, « présent à titre personnel » dans le lieu de culte.
Dans sa prise de parole de deux minutes, Jacques-Alain Bénisti se targue d’avoir « beaucoup agi » pour offrir aux musulmans un « espace le plus convivial possible ».
« Je compte sur vous »
Surtout, il annonce une prochaine « transaction » avec l’aménageur EpaMarne pour que la ville récupère le parking attenant, et puisse organise sa réfection. Une annonce et un dernier rappel, pour conclure : « Je compte sur vous, évidemment, pour ces élections municipales. »
Diffusée quelques heures après sur les réseaux sociaux, la séquence a fait bondir les opposants du maire, qui dénoncent en chœur un douteux mélange des genres et une atteinte au principe de laïcité. « Ce qui nous pose problème, c’est qu’il vienne en tant que candidat pour prononcer un discours politique dans un lieu cultuel, s’insurge Adel Amara, à la tête de la liste citoyenne Villiers à venir. Si M. Bénisti ne comprend pas le principe de laïcité, moi, j’y suis attaché. »
« La loi, rien que la loi »
« Un maire n’est pas légitime d’aller chercher les voix à la mosquée, ajoute Frédéric Massot (PS). On est pour l’application de la loi, rien que la loi. » Conseiller municipal d’opposition et tête de liste aux municipales, il annonce avoir sollicité ses avocats pour « analyser dans quelle mesure ça va perturber le processus électoral ».
Jérôme Auvray, conseiller municipal (RN), est lui « scandalisé » : « Bénisti s’acharne à aller mendier des votes auprès d’un groupe de personnes qui ne sont pas des aficionados de la République. » Une référence au passé sulfureux de la mosquée, fermée dans le cadre de l’état d’urgence, entre 2016 et 2018, et identifiée alors par la préfecture comme un « lieu de référence influent de la mouvance salafiste ». L’association de gestion de la mosquée n’a pu être contactée.
Quelle que soit leur couleur politique, les opposants brandissent le même texte pour tancer l’intervention du maire : l’article 26 de la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Églises et de l’Etat, qui « interdit de tenir des réunions politiques dans les locaux servant habituellement à l’exercice d’un culte ».
Réunion politique ?
« À toutes les élections, je suis invité par les communautés pour parler aux fidèles », se défend le maire. Surtout, Jacques-Alain Bénisti explique ne pas avoir pris le micro pendant un temps consacré au culte : « Je m’interdis formellement d’intervenir dans un moment de prière. »
En mentionnant plus largement les « locaux servant habituellement à l’exercice d’un culte », la loi ne semble cependant pas restreindre l’interdiction au seul moment de prière. Reste la notion de « réunion politique ».
Même si ces propos peuvent suggérer le contraire, le maire jure avoir invité à se prononcer aux municipales, pas forcément pour lui. « Ils sont des électeurs et des citoyens de la ville avant d’être des croyants, dit-il. Je compte donc sur eux pour aller voter. »
Et Jacques-Alain Bénisti ne « compte » pas que sur les musulmans : « Samedi prochain, j’irai voir la communauté juive. »"
Lire "Municipales : à Villiers, l’intervention du maire à la mosquée fait polémique".
Lire aussi le communiqué du CLR Marseille : Mme Vassal, « il est interdit de tenir des réunions politiques dans les locaux servant habituellement à l’exercice d’un culte » (CLR, 26 fév. 20) et "Le Printemps Républicain appelle au respect de l’interdiction des réunions politiques dans les lieux de culte" (Printemps républicain, 6 mars 20) (note du CLR).
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