Revue de presse

“Mesuré à la télé, Ramadan se lâche à la mosquée” (bakchich.info , 29 fév. 08)

2 mars 2008

« Un bon musulman, de sexe mâle, ne peut fréquenter une piscine ouverte aux femmes. » On suppose, mais la chose n’est pas dite, que l’inverse est vrai : « Pas d’hommes dans les piscines pour femmes. » Cette histoire de piscines qui doivent se plier aux principes islamiques est une vieille scie de l’actualité. La télévision nous a déjà montré l’embarras de ces maires, en général des patrons de communes du nord de la France, qui sont pris d’assaut par des associations musulmanes. Pour imposer un jour l’écriteau « femmes » à la piscine municipale.

Ce qui est cocasse, c’est que ce principe de bains séparés est défendu par Tarik Ramadan qui, par ailleurs, prêche sur le petit écran un islam séculier fait de respect des droits et coutumes des autres. Dans une conférence – dont le titre fait assez froid dans le dos, « Les grands péchés » – délivrée dans une mosquée de la Réunion, frère Tarik nous confirme que se baigner avec des sirènes est le meilleur moyen de paver son chemin vers l’enfer. Et c’est son droit, dit-il, et c’est le droit de tous les musulmans de se tremper en monosexe. La façon qu’ont les autres de se baigner ne dérange personne. Tant que l’on ne demande pas aux maires, aux patrons de lycées ou de facs d’instaurer ce fameux « jour des femmes ».

En fait, dans le sermon de Tarik Ramadan, ce qui est gênant, c’est la manifestation d’un double langage autant que ses exigences. Une pratique de tous les clergés aussi vieille que l’histoire. Il y a les propos que l’on tient à la télé. Il y a ceux qu’on lâche à la mosquée, à l’église, au temple ou à la synagogue. Et, dans ce genre d’affaires, Martin Ricard et son sari safran n’est pas plus neutre en paroles que les autres grands prêtres. La religion sans religion de Bouddah peut être vue comme une forme de jésuitisme très oriental. Et tout cela, mes frères, ne doit pas vous empêcher de prier pour mon salut.

Le problème, c’est qu’il est difficile de critiquer Tarik Ramadan en compagnie de n’importe qui. Vu que ce petit fils du fondateur des Frère Musulmans est devenu la tête de turc (si l’on peut dire) de tout ceux qui, faute d’avoir le courage d’affirmer au grand jour leur racisme anti-arabe, se défoulent sur leurs pratiques, leurs rites ou leur apparence. Et l’islamophobie devient le cache sexe de l’arabophobie…

Nous ne jouons pas sur ce terrain là. Nous restons dans le champ d’un laïc, dont la vie tranquille est gravement perturbée depuis que Nicolas Sarkozy a décidé d’être notre petit télégraphiste auprès de tous les bons dieux. Le prêche de Ramadan, ajouté aux discours de Latran, de Riad et du Crif (« Tout élève, dans sa vie, doit rencontrer un homme de Dieu ») est une montée en chaire de trop. Dans son sermon sur « Les Grands péchés », on voit bien où notre imam itinérant veut en venir. Le premier « Grand péché », c’est de « penser, de croire en autre chose qu’en Dieu ». Ici, le discours est clair : « libérez-vous de tout pouvoir humain ».

Ce qui, en langue vulgaire, veut dire : n’obéissez pas au prof, au « surgé », au recteur, au maire, au député, au juge, au flic, à la caissière, à l’arbitre, au gardien de square. Seul Dieu est Dieu et son seul amour mérite obéissance. Ce dogme de l’obéissance à Dieu et à rien d’autre entraîne forcément un frein à l’intégration dans un monde profane pas forcément halal. Et prêcher ça, frère Tarik, n’est pas rendre service à des gosses pour lesquels les chemins de la liberté passent plutôt par des rails. On constate ici que le mythe du roi, jusqu’à Louis XVI, vécu comme le « représentant de Dieu sur terre » a rendu service aux cathos. Bien obligés de verser un volume de temporalité dans leur calice, puisque ce roi était un Dieu quand même assez homme.

Là où Ramadan, par ailleurs le plus fort de tous nos docteurs de la loi en matière de culture et de dialectique biphasée, orientale ou occidentale, nous énerve, c’est quand après l’avoir écouté dans l’émission de Frédéric Taddeï, sur FR3 « Ce soir ou Jamais », on tombe sur son sermon sur les « Grands péchés ». Chez Taddeï, qui est le dernier carré, le Cameron de la libre parole, Ramadan discute du Djihad, l’explique, en dose et module les effets. Il discute même de la Charia qui pourrait semble-t-il subir un moratoire, un rabotage, sans que cela ne fasse de révolution… Tout est chez lui doux, oecuménique, consensuel. Son islam est fait de tolérance (Claudel, grand spécialiste du divin, disait : « La tolérance ? Il y a des maisons pour ça… »). Et paf, vous tombez sur les « Grands péchés » pour entendre une toute autre musique. Ramadan devient inquisiteur, met des culottes aux statues et des burqas de bain aux femmes."



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