par Gérard Durand. 6 septembre 2021
[Les échos "Culture" sont publiés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]
Mathieu Bock-Côté, La Révolution racialiste, Presses de la cité, av. 2021, 240 p. 20 €.
Mathieu Bock-Côté est né en 1980 à Lorraine, au Québec. Il fait ses études de philosophie à Montréal. D’abord à l’université de Montréal dont il est diplômé (maîtrise) puis à l’université du Québec, à Montréal, où il obtient son doctorat de sociologie. Ses recherches portent principalement sur le nationalisme québecois.
Actuellement il enseigne à l’université du Québec à Montréal. Il est également chargé de cours à l’université Sherbrooke ainsi qu’à HEC Montréal. Il est chroniqueur et blogueur pour le Journal de Montréal.
Sa notoriété fait un bond lors de la publication de La Révolution racialiste où il démonte le fourre-tout de la théorie woke comme le danger qu’elle représente pour l’universalisme républicain et ses valeurs, c’est-à-dire les nôtres. Ses positions courageusement affirmées lui ont valu de nombreux ennemis. Si vous ne pensez pas comme les woke, vous êtes nécessairement un fasciste. Eh bien, si le fascisme était cela, j’en ferais partie.
Le livre commence par une tentative de définition de ce qu’est la pensée woke. C’est une nouvelle mouvance tout droit sortie des universités américaines. Une nouvelle gauche religieuse qui se veut "éveillée" (woke), éclairée par la révélation diversitaire qui fait de la race la catégorie sociologique et politique la plus importante. L’ennemi, c’est l’Occident et plus précisément l’homme blanc. La "gauche" woke est très ferme sur ses positions : ceux qui ne reconnaissent pas la théorie diversitaire ne sont même plus des adversaires mais « des bouseux, des tarés, des ploucs, de pitoyables minus, des racistes, c’est-à-dire des blancs encore trop blancs, devant se déblanchir pour gagner en humanité ».
Fortement aidé par l’affaire Georges Floyd, le mouvement diversitaire ne tarde pas à faire apparaître son intolérance. Il tend son emprise vers le passé et entend exercer sa souveraineté sur l’ensemble du patrimoine culturel. Il faut déboulonner les statues, interdire des pièces de théâtre, renommer certains romans. Un nouveau métier apparait, celui de [relecteur des ouvrages à paraître-rub898], devant s’assurer que le texte soumis ne pourra pas heurter la sensibilité de quelque minorité. Le New York Times annonce fièrement qu’il n’écrira plus le mot "noir" qu’avec une majuscule, sans faire la même chose avec le mot "blanc".
L’Europe, et tout particulièrement la France, sont des ennemis de choix. Le mouvement « décolonial » y fait rage, même s’il est représenté par des personnages contestables, comme Assa Traoré. Mais il a des appuis de haut niveau. Telle Christiane Taubira : « Jusqu’ou résistent nos convictions sur la liberté et l’égalité, sur la démocratie comme système institutionnel pour tous ? Quel dérangement de confort, quelles privations de privilèges sommes nous, sont-ils, prêts à consentir pour que les proclamations sur la liberté, l’égalité, la démocratie ne soient pas que de pures tartufferies ? » Et Mathieu Bock-Côté de compléter : « la décolonisation engagée dans les années 1950 n’ira au bout d’elle-même que quand les peuples européens seront étrangers chez eux. »
L’Europe n’est pas seule visée, le Québec, si proche des Etats-Unis, n’est pas épargné. Il n’est pas rare de voir des reportages des médias publics s’inquiéter du caractère trop blanc de la fonction publique. Tous les secteurs sont concernés et l’on voit des inspecteurs diversitaires venir dans des institutions ou des salles de spectacles pour y décréter que les Blancs y sont encore trop présents. En France, on a pu voir l’actrice Aïssa Maïga entrer sur la scène de la cérémonie des Césars en déclarant « C’est plus fort que moi, je ne peux pas m’empêcher de compter le nombre de Noirs dans la salle ».
Eliminer le Blanc, voila la finalité, car seul le Blanc est raciste et ne croyez pas qu’il existe de bons Blancs. Le Blanc qui se prétend anti-raciste ne faisant qu’une tentative de légitimation de sa propre race, c’est à peu près le pire de tous.
Les diversitaires n’hésitent pas à gommer l’Histoire. L’esclavage devient un comportement de Blancs et surtout pas de Noirs ou d’Arabes, comme l’attestent les documents les plus anciens. Christiane Taubira, ministre d’une République de Bancs, ne dira rien dans une loi sur la traite des Noirs concernant l’esclavage organisé par des Arabes et surtout pas des Noirs entre eux.
Dans le monde occidental s’installe partout une régression sans précédent de la liberté d’expression. Le pire est que ce mouvement est, pour une large partie, inspiré par les universités. Le nombre de travaux universitaires fondé sur la couleur de peau et, plus récemment, sur les théories du genre, dont notre auteur parle longuement, est considérable. Un chercheur qui publierait un texte en opposition n’a déjà plus que peu de chances de voir sa carrière évoluer favorablement.
Les banlieues donnent un écho fort au mouvement en lui apportant le nombre nécessaire de partisans, nombre qui progresse de façon très rapide comme l’on montré les derniers rapports de France Stratégies. Dans certains quartiers, les enfants nés de parents non européens représentent près des trois quarts de l’ensemble des enfants.
Le livre de Mathieu Bock-Côté est une démonstration magistrale du danger d’effondrement de notre civilisation. Sa conclusion est sans appel, il nous parle de l’homme : « C’est à partir d’une langue qu’il accède au monde, c’est à partir d’une culture qu’il part à la rencontre des autres hommes, et c’est dans la mesure où il se sait et se sent maître chez lui qu’il peut accueillir dans le respect de ses capacités d’intégration ceux qui rêvent de partager son destin. C’est seulement en gardant à l’esprit ces vieilles leçons que la philosophie politique n’aurait jamais dû abandonner qu’on peut encore espérer résister au fantasme effrayant de la guerre des races. »
A lire et à garder comme livre de chevet.
Gérard Durand
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