par Gérard Durand. 2 mars 2020
Didier Daeninckx, Municipales. Banlieue naufragée, Gallimard, coll. Tracts, 48 p., 3,90 €.
Didier Daeninckz est né à Saint Denis et y a toujours vécu jusqu’au moment où, héritier d’une longue lignée de résistants, communistes ou anarchistes, il décide de quitter la ville. Son départ n’est pas un déménagement c’est une fuite. Et il crie sa désillusion dans ce petit texte de 40 pages à 3,90 euros, dans l’espoir, très ténu, d’être entendu. Il ne crie pas vengeance et ne cite aucun nom, il sonne simplement l’alerte.
Il dit non à cette ville qui cède au profit du clientélisme, à la tambouille politicarde et à la mainmise islamo-mafieuse. Mais l’écrivain l’emporte sur le désespéré et il ne peut s’empêcher de nous donner les raisons de sa fuite. Ce « tract » est une descriptions de la réalité que vivent les habitants de certaines villes de banlieue et frappe plus fort que bien des livres dix fois plus gros. Didier Daeninckz dit non, comme avant lui ses parents et grands parents.
Non aux élus qui pillent la ville par leurs projets immobiliers et qui, devant la vindicte des habitants, s’entourent de gros bras qu’ils remercient en créant pour eux des postes d’employés municipaux, parfois importants, auxquels la loi ne leur permet pas de prétendre car ils n’ont aucune des qualifications nécessaires.
Non à une ville de 90 000 habitants dont 18 000 se sont inscrits sur les listes électorales et dont 70 % ne viennent pas voter, ce qui permet à une liste de prendre la ville avec moins de 5.000 voix. Phénomène déjà décrit par François Pupponi pour Sarcelles.
Non à l’effondrement des partis traditionnels, comme le Parti communiste qui ne compte plus que quelques dizaines de militants, pour la plupart retraités, ou le parti radical dont les membres sont « moins nombreux que les doigts de la main gauche de Django Reinhardt », et qui n’hésitent pas à recruter dans la pègre locale pour pouvoir constituer leurs listes.
Non aux déclarations qui à la suite d’un attentat, qualifient le tueur de « martyr » et aux groupuscules comme « Ensemble » qui assimilent l’action de répression de l’immigration clandestine à la collaboration de Pierre Laval avec les nazis.
Non à cet élu qui multiplie les postes en cumulant les indemnités tout en restant payé par une entreprise privée et qui au soir du massacre de Charlie assimile ceux qui participent aux marches silencieuses à des islamophobes et au soir des crimes de Mohamed Merah déclarait qu’il allait s’entraîner à pleurer. C’est le même homme qui en novembre dernier organisait la marche contre l’"Islamophobie" dans laquelle sont venus s’égarer de trop nombreux responsables de gauche. Défenseurs en peau de lapin de la Laïcité et sourds aux cris d’Allah Akbar.
Non au fait de trouver dans un local municipal 500 kilos de cannabis, des voitures volées et des motos, tout aussi volées, à la multiplication des actes de barbarie, comme pour ce passant à qui l’on arrache à la main des dents en or, aux lycéens tués à coup de couteaux pour de vagues réglements de comptes, aux incendies volontaires et meurtriers contre ceux qui ne plaisent pas aux caïds, à l’arrachage de sacs par des tandems en scooters, etc…
L’odeur de décomposition est telle qu’elle attire des « personnages disruptifs qui ne prospèrent que sur le fumier » ainsi Alexandre Benalla qui se fait acclamer en sillonnant les rues de la ville, ou le plus dangereux Tarik Ramadan qui y possède un pied à terre et organise chaque année des conférences sous l’égide de la municipalité.
Tous les politiques et policiers connaissent en détail ce pourrissement, du haut en bas de l’échelle ils ont les noms des vrais responsables de ce détournement de démocratie, qu’en font ils ? Rien. Didier Daeninckx se retrouve traité en paria, ses livres retirés des bibliothèques, interdit de conférence dans les bibliothèques et voit les journalistes municipaux interdits de prononcer son nom. Alors, il décide de partir, entasse dans le camion de Djibril, le déménageur recruté sur Le bon coin, les livres de sa bibliothèque, ses notes, ses dossiers et ses affaires dans deux cents cartons.
« Je pars sans regarder derrière moi, non pas soulagé mais comme désentravé. Je ne déserte pas ce territoire, ou, pendant quarante années j’ai écrit la totalité des dix mille pages publiées, parce que j’ai fini par comprendre que c’était lui qui m’avait quitté, abandonné. »
Gérard Durand
Voir aussi la rubrique Seine-Saint-Denis (note du CLR).
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