par Guylain Chevrier, docteur en histoire, enseignant et formateur en travail social, vice-président du Comité Laïcité République. 8 septembre 2017
Le débat laïque est souvent l’objet d’outrances, envers ceux qui osent défendre une laïcité sans concession aux religions, quelles qu’elles soient. Dans ce prolongement, on ne s’étonne même plus de l’accusation qui leur est faite de "racisme", d’"islamophobie", de "défendre les idées du FN"… Mais ici, c’est une méthode d’un nouveau genre qui a été initiée.
Suite à la publication d’un article concernant l’affaire de la suspension des menus de substitution à Chalon-sur-Saône [1], dans lequel je défends l’application de la loi qui n’oblige nullement les maires à introduire dans les cantines scolaires de tels menus, je me vois accusé par la Libre pensée [2], non seulement d’être un « doriotiste », en référence directe à un Jacques Doriot, fasciste et collabo bien connu devant l’histoire, qui a été jusqu’à combattre sous l’uniforme allemand, mais aussi de penser unilatéralement comme on marche « au pas de l’oie », allusion directe une fois encore à la façon dont défilaient les nazis. Sans compter, de surcroît, avec l’insinuation que je serais « collaborateur » de Riposte laïque. J’ai condamné publiquement l’opération Apéro saucisson-pinard dans un article publié sur Agoravox [3], et rompu, sans ambiguïté, tout lien avec ce site depuis (2010), en raison de sa dérive.
L’article ne s’en prend pas d’ailleurs qu’à moi, mais aussi à une autre personne que l’on ose associer aux SA et à Joseph Goebbels… Au passage, cela donne l’occasion de montages photos dégradants, qui, si je puis dire, valent le coup d’œil. Face à ce procès en fascisme, dois-je encore rappeler mon combat de toujours sans concession contre l’extrême droite [4], dont on attend ce genre de méthode plus que d’une association qui se revendique comme représentant la libre pensée ?
Dans ces accusations, on ne voit ni défense de la liberté, ni de la pensée. On ne voit que la méthode peu reluisante qui est utilisée ici en guise d’argument et qui révèle l’indigence du discours. Elle illustre la défaite de la pensée. Il faudrait n’y voir que de la bêtise si la chose n’était pas si grave, au regard des références qui sont évoquées. Ce positionnement intellectuel me laisse d’autant moins indifférent que je suis issu d’une famille qui a connu l’étoile jaune et l’abomination de la déportation.
La décision prise par le Tribunal Administratif de Dijon de réintroduire les menus de substitution dans les cantines de la ville de Chalon-sur-Saône, est grosse d’enjeux. Car, introduire dans les cantines scolaires l’exigence de la différenciation des repas, qu’on le reconnaisse ou pas, c’est répondre à une demande confessionnelle, versus accommodements dits « raisonnables ». La multiplication des tables « sans porc » dans ces cantines, devrait pourtant alerter sur les risques qui pèsent ici sur les principes communs grâce auxquels nous pouvons vivre ensemble. La Libre pensée entend imposer aux maires les menus de substitution au nom du « respect de la liberté absolue de conscience ». Mais cette exigence est elle-même absolutiste ! On croit en ce que l’on veut, certes, mais on ne l’exprime pas partout comme on veut. Il en va de la liberté des autres.
Par cette violence des coups, cette outrance éloignée de tout humanisme, on attaque en réalité la liberté de pensée, et on ternit le débat public sur la laïcité. Contrairement à cette méthode stérile, les laïques ont besoin de la plus grande sérénité pour débattre, et répondre à des enjeux de société qui engagent le pronostic vital de notre République laïque, au regard de la montée de nouveaux périls. Cette façon de faire, ne peut que l’y exposer un peu plus.
L’attaque est de l’excès d’un tel niveau, d’une telle démesure, qu’elle en devient heureusement largement inopérante. Rajoutons, que de faire de tout adversaire de ses idées un fasciste, banalise les vrais nazis et leurs complices. Face à cette infamante agression, j’invite tous ceux qui partagent mon indignation, à y répondre sous toutes les formes qu’ils jugeront utiles, dans le respect de la personne humaine.
Texte publié initialement sur agoravox (note du CLR).
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