par Jean-Pierre Sakoun, président du Comité Laïcité République. 14 octobre 2018
Le 9 octobre dernier, Europe 1 dévoilait une note des services de renseignement, présentée comme « ultraconfidentielle », adressée au Premier ministre, au Président et au ministre de l’Éducation nationale, alertant sur l’augmentation des tensions communautaires principalement d’origine musulmane au sein des établissements scolaires. Refus de dessiner des êtres humains, refus d’écouter de la musique, refus des garçons de donner la main aux filles, refus d’aller à la piscine, refus de côtoyer à la cantine un camarade mangeant du porc, refus d’entre dans une classe au mobilier rouge (!), pression sur les enfants considérés comme musulmans qui ne mangent pas hallal… En deux mois près de 400 cas ont ainsi été recensés et transmis à la plateforme mise en place par l’EN sur l’initiative de M. Blanquer. On doit ici remercier le ministre d’avoir enfin rétabli un thermomètre que tous ses prédécesseurs avaient cassé ou caché, dans cette atmosphère trouble. Nous pouvons enfin constater la réalité et celle-ci est sans pitié.
Rien de nouveau, pour tous ceux qui ont lu Les Territoires perdus de la République, ouvrage fondateur dirigé par Georges Bensoussan en 2002 ou plus récemment Principal de collège ou imam de la République de Bernard Ravet, publié en 2017. Mieux encore, au sein-même de l’Éducation nationale, le rapport de 2004 de l’Inspecteur général Jean-Pierre Obin, « Les signes et manifestations d’appartenance religieuse dans les établissements scolaires », a été rendu au ministre de l’époque, M. Fillon, et fut immédiatement mis sous le boisseau tant il décrivait une réalité inquiétante. Il fut publié grâce à l’action du CLR et de la LICRA et il disait déjà tout de ces dérives désespérantes.
Mais les choses ont, en quinze ans, empiré. Désormais c’est dans les classes primaires et dès la 6ème que ces signes de séparatisme culturel, de violence physique parfois, d’hostilité et de refus de la République apparaissent. Ces manifestations, à cet âge, démontrent qu’il s’agit de comportements acquis dans les familles des « quartiers » ou plutôt des territoires perdus. Ce sont les parents qui inculquent ces calembredaines aux enfants. Ce sont les entrepreneurs de haine qui sillonnent désormais ces quartiers, Français, Algériens, Saoudiens, Qataris, qui portent cette pensée radicale et régressive. Ce sont les indigénistes de tout poil, auxquels la presse et la télévision, y compris publique, font la part belle, qui diffusent sans cesse, avec des moyens qui laissent songeurs, ces messages de retrait, de haine de l’autre et d’hostilité agressive vis-à-vis de l’universalisme républicain. Où sont donc dans ces médias les citoyens laïques de religion ou de culture musulmane, largement majoritaires, que l’on ne voit et n’entend jamais ?
Les trois millions de paraboles tournées vers le Qatar, l’Arabie Saoudite, l’Algérie et les voyages low cost qui facilitent désormais le « retour » vers le pays qui n’est même plus d’origine, deux fois par an plutôt qu’une fois tous les deux ans, contribuent à maintenir la permanence d’une appartenance fantasmée pour des enfants nés en France. Ils poussent à faire le choix de construire sa maison là-bas plutôt qu’ici, quitte à s’imposer en France une vie de pauvreté plus grande encore (réf. Fatiha Boudjahlat).
Au même moment, est-ce un hasard, le ministre de l’Intérieur démissionnaire dit publiquement lors de la passation de pouvoir « Je suis allé dans tous ces quartiers. La situation est très dégradée. On ne peut plus continuer à travailler commune par commune, il faut une vision d’ensemble pour recréer de la mixité sociale […] Aujourd’hui, on vit côte à côte. Moi, je le dis toujours : je crains que demain on vive face à face ». Au même moment, Martine Aubry, qui pourtant n’a guère brillé par sa clairvoyance et son courage laïques dans le passé, alerte à son tour sur l’extrême danger que courent les quartiers tombés aux mains des trafiquants de drogue et des islamistes. Mais au même moment encore, la maire de Rennes, Mme Appéré, livre au patriarcat le plus rétrograde les femmes en lutte contre leur soumission, en autorisant, d’ailleurs contre toute règle d’hygiène et de sécurité, le burkini dans les piscines de sa ville…
N’est-il pas temps, après des années d’hésitation, de pusillanimité, de reculs et – osons le mot – de lâchetés, que ce gouvernement, ce président de la République, après tant d’autres depuis près de trente ans, réaffirment la laïcité de notre pays, son plus grand trésor social et culturel, pour garantir l’émancipation et la liberté des individus ? Ils peuvent et doivent redonner aux élus locaux la fierté de cette grande idée, mettre en place les moyens réels et lourdement financés d’une reconquête optimiste et progressiste de nos concitoyens égarés.
Nous appelons tous nos concitoyens à s’emparer de cette grande idée et à la faire vivre.
Jean-Pierre Sakoun
Lire aussi "Les dérives du communautarisme à l’école pointées par une note des services de renseignement" (Europe 1, 9 oct. 18), "Laïcité : trente conflits répertoriés par jour à l’école" (Le Figaro, 10 oct. 18), G. Collomb : Dans certains quartiers, « c’est plutôt la loi du plus fort qui s’impose, des narcotrafiquants, des islamistes radicaux, qui a pris la place de la République » (3 oct. 18), la note de lecture B. Ravet : Contre l’obscurantisme, les héros de l’école publique par Jean-Pierre Sakoun, "Burkini, à Rennes on nage en eaux troubles !" (Les VigilantEs , 11 oct. 18), "A Rennes, le burkini sème la zizanie" (Le Figaro, 10 oct. 18), "Rennes. Le burkini autorisé à la piscine : laïque ou pas laïque ?" (ouest-france.fr , 8 oct. 18), La mairie de Rennes autorise le burkini à la piscine (ouest-france.fr , 26 sep. 18) (note du CLR).
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