par Jonathan, Délégué du CLR pour la jeunesse 6 décembre 2009
Lors d’un récent dîner, l’occasion m’a été donnée de voir une fois encore à quel point les conclusions hâtives sont néfastes. Pendant qu’un succulent tartare de bœuf émerveillait mes papilles, mon interlocuteur a eu la bonne idée de glisser une remarque sur l’actualité :
« Tu as vu ce qui s’est passé en Suisse ? Si c’n’est pas révoltant ! »
De là tout est parti…
« Je suppose que tu veux parler du rejet de la construction de nouveaux minarets par environ 57 % des votants ?
– Exactement ! Quelle intolérance !
– Je serais plus prudent que toi sur la question, ne ce serait-ce qu’en raison de ma méconnaissance de la société helvétique.
– Sois plus précis…
– Au vu de certaines affiches de campagne, je ne nie pas la dimension xénophobe du vote d’un certain électorat. Mais je me refuse à considérer ce résultat comme l’expression d’un vote islamophobe faisant des Suisses une horde de nationalistes obscurantistes.
– Ce n’est pas ce que j’ai dit non plus. Comme toi, je me méfie des généralités mais constate le résultat.
– Souviens-toi du référendum de l’année 2005 sur le projet d’une constitution européenne. Les Français s’étaient prononcés à près de 55 % contre ! Très vite, trop vite, certains ont estimé que c’était l’expression d’un rejet du projet européen, de son idéal. Les Français apparaissaient comme des antieuropéens. Certains, dédaigneux, accusaient les électeurs de n’avoir compris ni l’enjeu, ni le texte… La démocratie devenait l’expression du pouvoir d’un peuple incapable de prendre les bonnes décisions pour lui-même !
– J’en étais moi-même choqué, mais pour les Suisses…
– Pour les Suisses, ce n’est peut-être qu’une question de paysage !
– C’est-à-dire ?
– En France par exemple, les PLU garantissent que l’urbanisation de nos régions réponde à une politique d’aménagement du territoire en cohérence avec les héritages culturels locaux. Ainsi dans nos communes, tu ne peux pas construire ce que tu veux où tu veux. Il te faut respecter l’architecture, les matériaux, etc…
– Oui, mais comme tu me l’as fait remarqué précédemment, des minarets ont déjà été construits en Suisse.
– Dans ce cas, ce ne doit pas être une question d’aménagement du territoire.
– Non. Et pour ma part, j’en reviens à l’idée d’intolérance en matière de liberté de culte.
– Une fois encore, je ne peux te suivre dans ta conclusion. Permets-moi de te rappeler que le minaret n’est pas la mosquée. Et même, il n’est pas nécessaire pour pratiquer sa religion. C’est un élément architectural. A la grande mosquée de Paris, le minaret n’est pas utilisé pour l’appel à la prière, ce qui ne nuit ni à la foi des fidèles ni à leur liberté de culte.
– Tu n’as pas tort, je vais même t’avouer que si on me demandait ce que je pense de l’érection d’un minaret devant ma fenêtre, j’y serais opposé.
– Tu rends compte de ce que tu viens dire. En 5 minutes tu es passé du « pendez-les hauts et court » à finalement j’aurais certainement voté comme eux.
– Effectivement, ça fait réfléchir… »
Ce petit dialogue nous rappelle qu’il est nécessaire de porter un regard critique sur l’information de manière à éviter certains jugements radicaux aux fondements biaisés. Nous sommes maîtres de notre pensée. Plus généralement, il est peut-être temps de refuser de sombrer dans un politiquement correct partisan d’un manichéisme intellectuellement confortable (remarque qui ne concerne pas mon interlocuteur avec lequel, ne vous en faites pas, mon repas s’est bien terminé.)
Jonathan,
Délégué du CLR pour la jeunesse
Lire aussi La laïcité au coeur des enjeux politiques (30 nov. 09) (note du CLR).
Comité Laïcité République
Maison des associations, 54 rue Pigalle, 75009 Paris
Voir les mentions légales