Revue de presse

"Ces terroristes sont le produit de l’islamisme, pas de notre société" (A. Versaille, causeur.fr , 7 juin 17)

André Versaille, écrivain et éditeur. 7 juin 2017

"En Asie et en Afrique, en Amérique et en Europe, l’islamisme tue. Que ce soit des musulmans qui, au nom de leur foi, provoquent de tels désastres humains, nous, « progressistes », refusons de le voir : attention ! Islamophobie ! Ne faisons pas le jeu des racistes et de l’extrême droite !, crions-nous avec toute la vigilance requise. Dès qu’un quidam met en cause quelque aspect que ce soit de l’islam, le téméraire est remis à sa place, nous le traitons d’islamophobe et nous parlerons bientôt de lepénisation des esprits. En vérité, nous avons du mal à envisager sereinement la question de l’islamisme. Comme le dit Gilles Kepel : « Entre le marteau de la “radicalisation” et l’enclume de “l’islamophobie”, il est devenu très difficile de penser le défi culturel que représente le terrorisme jihadiste. »

« Ces monstres sont le produit de notre société » (Edwy Plenel, 14 janvier 2015)

Islamophobie… C’en est au point que nous sommes incapables de simplement considérer le djihadisme. Le malaise de bien des « progressistes » face à l’islamisme tyrannique, est tel qu’ils en viennent à traiter, de manière quasi pavlovienne, d’islamophobes et de racistes ceux qui prennent la liberté de questionner l’islam. L’embarras est tel, que beaucoup répugnent jusqu’à prononcer le mot d’islamisme, et recourent systématiquement au déni.

« Ces monstres sont le produit de notre société, déclarait Plenel au Bondy Blog au lendemain des attentats de janvier 2015. Ce n’est pas l’islam qui a produit ces terroristes. Ces derniers se prétendent de l’islam mais n’ont rien à voir avec l’islam. En revanche ils sont le produit de toutes les fractures, de toutes les déchirures de notre société. » Le politologue François Burgat tiendra à peu près le même langage : « Je considère que nous sommes en réalité les partenaires indissociables de cette violence trop simplement qualifiée d’“islamique” par les uns, de “nihiliste” par les autres. […] Le recours à la violence sectaire fait donc suite à des dysfonctionnements majeurs du “vivre ensemble” européen ou oriental qui poussent ces individus à la rupture. […] La question n’est donc pas pour moi de combattre les djihadistes mais d’arrêter de les fabriquer. »

Nos dysfonctionnements, toujours nos dysfonctionnements. Mais les tueries en Allemagne et en Angleterre, sont-elles également le « produit de fractures et de déchirures » ?

Contrairement à la France, ces pays ont pourtant instauré cette politique multiculturaliste que tant d’idéologues « progressistes » souhaitent voir instaurée en France ? Décidément, nos vertueux ne savent plus comment prouver leur bienveillance à ceux qu’ils veulent à tout prix tenir pour des « dominés ».

La « phrase inacceptable » d’Alain Finkielkraut

Prenons le livre d’Edwy Plenel, Pour les musulmans. Publié en 2014, il reste le reflet de la position que l’auteur tient aujourd’hui. À contre-courant dans le sens de la marche, cet ouvrage est un festival d’égarements compatissants. Mon livre, dit l’auteur, est une réaction à la « phrase inacceptable » d’Alain Finkielkraut prononcée en juin 2014 sur France Inter : « Il y a un problème de l’islam en France. » Cette seule phrase aura suffi à Plenel pour se mettre en branle. Pourtant Finkielkraut s’était expliqué : « Je pense que l’islam doit se soumettre aux lois de la république. Et d’ailleurs, je lis avec beaucoup d’intérêt le dernier document publié par le Conseil français du culte musulman (CFCM). Ça, c’est un moment d’espoir. […] Le CFCM est absolument clair sur le devoir d’intégration et il explique que l’islamophobie existe, mais que les musulmans ne doivent pas se dédouaner de leurs responsabilités dans l’entretien d’un tel sentiment. […] Il y a un problème de l’islam en France. Gilles Kepel, dans une tribune tout à fait éclairante du Monde , disait qu’un tueur comme celui de Bruxelles était endoctriné par des textes qui expliquaient qu’il fallait mener des actions, notamment contre les lieux communautaires juifs pour solidariser les musulmans. Et comme il y a des lieux où ceux-ci sont majoritaires, cela pourra former des enclaves musulmanes en Europe. Ce n’est pas le discours du CFCM, il faut le dire, mais ce discours existe, ces majorités existent, il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt, nous devons avoir une réponse appropriée et ferme dans le cadre républicain. Si la réponse est faible, le Front national prospérera. »

De cette argumentation, Plenel n’en a cure. Comme tant d’autres, ce héraut du « padamalgam » assimile toute critique de l’islam à la stigmatisation des croyants et au racisme. Le 18 septembre 2014, au micro de Léa Salamé, il ne citera que la « phrase inacceptable ». « Inacceptable » ? « Parce qu’elle globalise, parce qu’elle essentialise ». Elle globalise et essentialise quoi ? Cette phrase ne parle pas des musulmans mais de l’islam radical utilisé comme idéologie. Cette méfiance vis-à-vis de l’islamisme peut se comparer à celle du président du Conseil Ramadier, en 1947, envers les communistes qu’il avait exclus du gouvernement : cette mesure n’était pas une manifestation d’hostilité envers les communistes en tant qu’individus mais une marque de défiance envers le PCF dont les positions, au moment de la guerre d’Indochine, étaient regardées comme incompatibles avec les intérêts de la politique étrangère de la France.

Islam et idéologie. Deux mots qu’Edwy Plenel n’imagine probablement pas pouvoir relier. Au lieu de réfléchir sur le fait qu’une idéologie sectaire (religieuse ou laïque, d’ailleurs) pourrait ou non poser un problème en France (ou dans n’importe quelle démocratie occidentale), le cofondateur de Mediapart se dépêche de disqualifier toute interrogation relative à cette question, et de traiter systématiquement d’islamophobes ceux qui les posent. Edwy Plenel pense à la manière des catholiques de l’Ancien régime, rugissant contre les philosophes des Lumières qu’ils nommaient blasphémateurs dès qu’ils osaient critiquer l’Église et son enseignement.

Globaliser ? Essentialiser ? Amalgamer ? Mais que fait d’autre Edwy Plenel dans son livre ? Pour les musulmans ? Bizarrement, on n’en aperçoit aucun dans son ouvrage. Pas une de leurs paroles n’est rapportée. Il parle d’une masse musulmane compacte composée de victimes indistinctes qu’il est urgent de protéger comme une espèce zoologique menacée. On croirait entendre Brigitte Bardot parler des bébés phoques…"

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