Tribune libre

Appliquer la Loi laïque sur l’ensemble des territoires de la République (J. Schellhorn)

Jacques Schellhorn, membre du Conseil d’administration du CLR. 6 avril 2021

[Les tribunes libres sont sélectionnées à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

Préambule

La récente affaire de la mosquée islamiste turque « Eyyub Sultan » à Strasbourg, suite à une subvention généreuse accordée par la nouvelle municipalité écolo-islamo-gauchiste à l’association Milli Görüs proche de l’extrême droite nationaliste turque, met en évidence la politique d’entrisme du pouvoir néo-ottoman d’Ankara de Receip Erdogan, en France et en Europe.

Cette subvention d’un montant de 2,5 millions d’euros sur un total estimé de 32 millions représente finalement le symbole d’une dérive politico-religieuse et électoraliste d’une partie des mouvements politiques en France.

Il est nécessaire de rappeler brièvement la situation inédite de l’Alsace en la matière.

Principes de la Loi de 1905 en regard du droit local alsacien

Tout d’abord, on peut considérer que la Laïcité est une obligation de neutralité de l’Etat républicain envers les religions, ce qui pèse avant tout sur les pouvoirs publics dans son application. C’est parce que l’Etat n’a pas de religion qu’il reconnait à tous la liberté de conscience et donc le libre exercice religieux. La Loi de 1905 dans ses divers articles permet le financement de lieux de culte, dans des conditions qui peuvent apparaître discriminatoires.

Cette Loi sur la Laïcité est avant tout avantageuse pour les religions qui existaient en France en 1905, principalement le Catholicisme, et accessoirement par règlement ultérieur le protestantisme et le judaïsme, mais défavorise celles qui se sont depuis développées, spécialement l’Islam, le Bouddhisme et les églises Evangéliques.

Pour autant, diverses législations ont tenté dans le passé de remédier à cette situation : Loi de février 1996, aménagement du code général des collectivités territoriales en 2006… Ainsi, les édifices cultuels bâtis avant 1905 bénéficient d’une aide financière publique. Le législateur devrait s’emparer de cette situation au motif juridique mais également politique (sanction de la Cour européenne des droits de l’homme).

Par ailleurs, il existe de nombreuses exceptions à l’interdiction des subventions publiques par la Loi de 1905. En matière d’enseignement, les établissements privés peuvent obtenir des locaux par les collectivités territoriales ou de l’Etat lui-même. De ce fait, les associations à vocation cultuelle sont contrôlées au niveau financier par les divers échelons des pouvoirs publics qui ne sont donc pas démunis pour faire respecter la Loi.

Il faudrait rajouter pour finir sur cet aspect qu’une proposition de Loi pourrait imposer aux ministres des différents cultes une formation adéquate les qualifiant pour l’exercice de leur religieux et l’utilisation du français (cas des Imams détachés ne parlant pas la langue – Arabie Saoudite, Turquie).

Finalement, le modèle de Loi 1905, un concordat du non-dit, vise à la concorde entre l’Etat républicain et les diverses religions et non à la discorde voulue par le séparatisme islamique ! C’est pour cela, que la meilleure solution consisterait à l’application de la Loi laïque sur l’ensemble des territoires de la République.

L’application du Concordat de 1801 en Alsace

Le concordat de 1801 signé par le Premier Consul Napoléon Bonaparte et la Papauté romaine concerne le culte reconnu de cette époque, le Catholicisme sur l’ensemble du territoire républicain. Des aménagements suivront pour les cultes protestants et israélites. Dans ses 17 articles organiques datant de1802, rien n’est prévu pour le financement des lieux de culte. Il est seulement indiqué que les églises, basiliques et cathédrales nécessaires au culte catholique seront mises à disposition des diocèses.

Ces dispositions étaient donc valables pour toute la France jusqu’en mai 1871 (traité de Francfort). L’Alsace et ce qui deviendra le département de la Moselle en 1919 ne connaitront pas la Loi de décembre 1905 ainsi que les trois départements algériens pour d’autres raisons.

De ce fait, en Alsace, et c’est toute l’ambiguïté de la situation actuelle de la mosquée de Strasbourg, la loi de 1905 ne s’applique pas, mais également l’Islam n’est pas reconnu par le Concordat de 1801. Le financement de cette mosquée ne peut relever ni du Concordat, ni de la Loi de 1905. C’est une des raisons pour lesquelles des associations musulmanes sont régies par la Loi de 1901, outre l’aspect sur le financement étranger des Etats musulmans.

C’est le régime actuel de l’autre « grande mosquée » de Strasbourg édifiée sur des fonds saoudiens et marocains. Elle a bénéficié de subventions de la municipalité et du département du Bas-Rhin ainsi à la mise à disposition d’un terrain aux conditions de cession avantageuse.

L’application du Concordat de 1801 en Alsace et en Moselle conduit en final à ce que se sont les contribuables qui financent les besoins des cultes reconnus catholique, protestant et israélite. Pour les autres cultes, non reconnus, et ne rentrant pas dans le cadre de la Loi de 1905, un financement reste possible au niveau des collectivités locales de droit alsacien ayant pour objet des associations musulmanes (loi de 1901).

Cette situation ubuesque doit cesser par l’application sans limite territoriale de la Loi sur la Laïcité. Un vaste programme pour les partis politiques et leurs dirigeants en période électorale…

Contexte général des ingérences étrangères

Nous en avons la preuve avec la Turquie, forte d’une communauté d’origine ethnique turco-musulmane sunnite de plus de 600000 personnes, travaillée par les mouvements politiques islamo-conservateurs et nationalistes, soumis à la volonté autocratique d’Ergodan dans ses rêves de grandeur néo-ottomane. Il est bon de rappeler une phrase prononcée lors d’un de ses discours s’adressant aux musulmans français : « Vous êtes sous ma protection. Celui qui touchera aux musulmans de France me touche ».

Il faudrait également se souvenir des insultes et mensonges publics proférés par le même personnage contre le président de la République, totalement inacceptables.

En France, c’est plus de 300 mosquées contrôlées par Milli Görüs et le CCMTF qui sont les relais du département des Cultes (Diyanet) du ministère turc de l’intérieur avec ses 120000 imams fonctionnaires, dont 200 sont détachés en France, la plupart ne parlant pas le français et payés par l’Etat turc. Il faut noter que Milli Görüs et le CCMTF ont refusé de signer la charte des imams de France. L’extinction progressive des détachements doit améliorer cette situation inédite d’ingérence.

A l’avenir, ce refus de signature de la charte devrait permettre de poursuivre toute association cultuelle disposant de financement non conforme à la Loi. L’application de la Loi sur le « séparatisme » est une opportunité pour mettre fin à ces dérives identitaires étrangères. Le ministère de l’Intérieur a pris des dispositions de refus de négocier avec ce type d’association.

En Europe, l’Allemagne subit quant à elle, une communauté turcophone de plus de 2 millions et demi de personnes disposant de plus 500 mosquées. Mais les lois régissant les rapports Etat fédéral – Lander - religions ne sont pas les mêmes, liées à la Constitution allemande. C’est donc une situation différente avec le cas alsacien en particulier, et français en général.

En conclusion de cette brève analyse de la situation des cultes en Alsace et en regard de la situation présente de la Mosquée de Strasbourg en cours de construction par l’association Milli Görüs, il apparait une nécessité absolue de faire étendre la Loi de 1905 sur l’ensemble du territoire français.

Jacques Schellhorn



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