1er décembre 2010
"Il fut pendant quelques mois l’un des internautes les plus détestés du monde musulman. Sa page Facebook, qui s’intitulait "Ana Allah" ("Je suis Dieu "), était remplie de saillies blasphématoires et d’apologies de l’apostasie. A la surprise générale, le mystérieux effronté, arrêté au début du mois, s’est révélé être un timide garçon coiffeur de Qalqiliya, une bourgade de Cisjordanie.
Walid Husayin, 26 ans, désormais emprisonné dans une cellule des moukhabarat (services secrets) palestiniens, menait une double vie à l’insu de toute sa famille. La journée, il travaillait dans le salon de coiffure de son père, un pieux musulman. Ses amis le connaissaient comme un garçon effacé, déçu de ne pas avoir trouvé d’emploi dans l’informatique, la discipline qu’il avait étudiée à l’université. Mais, dès qu’il en avait l’occasion, le jeune homme s’échappait dans un café Internet à l’écart du centre-ville pour rédiger et poster ses textes incendiaires. Dans l’un d’eux, il affirmait que Mahomet était un Bédouin primitif. Dans un autre, il écrivait qu’il était Dieu et il ordonnait à ses fidèles de boire du whisky et de fumer du haschich. Ouvert en novembre dernier, le blog qu’il tenait sous le pseudonyme de Walid Al-Husseini, parallèlement à sa page Facebook, a reçu près de cent mille visiteurs. A ceux qui l’accusaient de faire le jeu de l’Occident chrétien, le jeune barbier répondait que "les religions sont toutes un ramassis de légendes et de non-sens qui défient l’entendement" et "qu’elles jouent à laquelle sera la plus stupide".
Cette bouffée de libre-pensée sur un média aussi incontrôlable que le Net finit par inquiéter les autorités religieuses sunnites, à l’université Al-Azhar, en Egypte, ainsi qu’en Arabie saoudite. Des enquêtes commencèrent. C’est finalement le patron du café Internet de Qalqiliya, intrigué par ce client atypique, qui passait jusqu’à sept heures d’affilée devant l’écran, qui alerta la police. L’annonce de son arrestation fit l’effet d’une bombe à Qalqiliya, une ville conservatrice qui s’était dotée d’un maire Hamas en 2005. Depuis ce jour, la population ne décolère pas contre le bloggeur apostat, qu’elle qualifie au mieux de "malade mental" et au pire d’"infidèle". Cette émotion est l’une des raisons citées par les autorités palestiniennes pour justifier son incarcération. " Je ne pourrais pas garantir sa sécurité s’il sortait de prison aujourd’hui", assure le directeur de la police. L’autre raison est un article du code pénal jordanien, toujours en vigueur en Cisjordanie, qui punit toute insulte à la religion de un à trois ans de prison. [...]"
Comité Laïcité République
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