par Guylain Chevrier, docteur en histoire, universitaire, membre du Conseil d’administration du Comité Laïcité République. 25 octobre 2023
[Les tribunes libres sont sélectionnées à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]
En une dizaine de jours le massacre de juifs que les nazis n’auraient pas renié semble s’effacer derrière ce qui se joue en ce moment à Gaza. On ne parle plus que d’humanitaire, « il faut agir maintenant pour mettre fin à ce cauchemar » déclare Antonio Guterres, le patron de l’ONU. La banderole de la manifestation parisienne du 22 octobre à Paris titre : « Halte au massacre à Gaza ». Réunis au Caire « pour la paix », des dirigeants du monde entier ont réclamé un « cessez-le-feu », alors que les premiers convois d’aide humanitaire sont entrés dans Gaza salués comme une goutte d’eau au regard des besoins.
Personne ne peut rester insensible à la détresse des civils palestiniens, mais que pouvaient espérer de mieux les terroristes ? N’est-ce pas là l’expression de ce qu’ils ont intégré dès le départ dans leur stratégie de terreur que leur population leur serve de bouclier humain pour faire tourner jusqu’à l’information de l’ennemi en leur faveur ? Un habitant de Gaza est interviewé sur France info qui, après avoir décrit ce qu’il vit, dit : « On ne sait si on va mourir de cette "guerre israélienne" ». Pourquoi ne rectifie-t-on pas pour dire que cette guerre est celle voulue par le Hamas, qui, en perpétrant un crime d’une telle abjection, un crime contre l’humanité, impliquait inévitablement une réponse sans concession ?
Les terroristes retournent notre pensée d’homme libre contre notre propre humanité
La demande de cessez-le-feu est aussi sous la pression de la question des otages, avec une émotion considérable. Nos médias reprennent telle quelle la mise en scène de la libération de deux otages américains par le Hamas, qui dit l’avoir fait, comble de la provocation, « pour des raisons humanitaires ». Deux nouveaux otages ont été libérés ce lundi sous le même motif. L’une des deux femmes raconte avoir été battue lors de son enlèvement puis, bien traitée en détention, reflet de l’esprit de subversion des terroristes. Le Hamas affirme que cette libération a eu lieu grâce à la médiation du Qatar et de l’Egypte. Le CICR déclare avoir "facilité leur libération " en ayant directement négocié avec le Hamas leur sortie de Gaza. Quatre sur quelque deux cents otages, libérés au compte-gouttes. Les terroristes islamistes savent parfaitement utiliser notre façon de penser d’homme libre, pour laquelle chaque vie compte, pour la retourner contre nous comme une arme, en jouant sur les victimes civiles. Ils nous déshumanisent au passage en nous faisant accepter de négocier avec eux. Ainsi, faut-il relayer les communications du Hamas, dont les chiffres des morts palestiniens qu’il est le seul à fournir, impossible à vérifier de façon indépendante, qui comprennent sand doute ceux que l’on s’est précipité à attribuer à l’armée israélienne de façon indue lors du bombardement d’un hôpital de Gaza causé par un tir erroné des islamistes, et plusieurs milliers de ses djihadistes ?
A propos des crimes islamistes dénoncés par la première ministre à l’Assemblée nationale, on parle sur France info d’« assassinats pour lesquelles les images sont aussi des armes. L’armée israélienne a dévoilé des enregistrements de commandos du Hamas » alors que l’on évoque des bombardements qui ont redoublé d’intensité sur la bande de Gaza. Faudrait-il comprendre que montrer ces images serait de la propagande de guerre ? Oui, il faut les voir ces images, dire ce qui s’est fait, et assez jusqu’à la nausée, car c’est un effet salutaire pour la conscience que l’on doit en avoir : des personnes blessées mais encore en vie que l’on décapite avec une bêche de jardin aux cris d’Allah Akbar, des corps dénudés, mutilés, frappés à coups de pieds sans fin, une femme enceinte éventrée avec son bébé encore relié à elle par son cordon ombilical poignardé, tous ces enfants décapités, brulés vifs, ces morceaux de corps laissés éparpillés, que l’on ramasse… Et ces mêmes terroristes d’appeler avec le téléphone de leurs victimes les membres de leurs familles pour leur faire vivre en direct l’horreur de ces sévices ! On doit regarder cela en face, comme la lie de l’humanité.
Attention à ne pas fournir au Hamas la justification de ses crimes pour renforcer le terrorisme
Une responsable du CICR qui réclame un cessez-le-feu pour pouvoir répondre aux besoins des Gazaouis ajoute qu’en matière d’aide humanitaire « même les guerres ont des règles ». Le Hamas respecterait-il un cessez-le-feu ? Sommes-nous dans une guerre entre deux parties qui respectent les mêmes choses ? Absolument pas, nous sommes face à la bête immonde dont le ventre reste fécond et qui promet bien pire si on ne l’éradique pas, et jusqu’à la racine. Ce qui vaut pour Israël mais aussi pour nous, les pays démocratiques, pour la France durement encore touchée par le terrorisme avec l’assassinat d’un autre professeur après Samuel Paty, Dominique Bernard, dont aucun mot ne pourra nous guérir de l’effroi et de la tristesse.
"Sionistes, c’est vous les terroristes", voilà ce qu’on pouvait entendre dans la manifestation propalestinienne de dimanche. Ceux qui crient cela en inversant la réalité des faits, banalisent ainsi l’innommable, et encouragent à l’antisémitisme. 588 actes antisémites ont été recensés dans notre pays depuis le 7 octobre, plus qu’en un an.
Le Premier ministre palestinien condamne les prises de position qui donnent selon lui "un permis de tuer à Israël", mettant en cause "son droit de se défendre". Il dit craindre de sa part "davantage de crimes, d’atrocités et de déplacement forcé". Mais que ne craint-il pas d’autres atrocités des terroristes palestiniens qui continuent d’envoyer des roquettes sur Israël ? Jean-Paul Chagnollaud, président de l’Institut de Recherche et d’Études Méditerranée Moyen-Orient, invité du 12/13 info (23 octobre), exprime ne voir comme seule solution « que la séparation (…) En s’appuyant sur le droit international et sur deux États. (…) On dit qu’Israël est une démocratie attaquée, ce qui est vrai. Mais c’est aussi un État qui est une puissance occupante », ajoute-il [1].
Si la fin des colonies juives en Cisjordanie est l’une des conditions au règlement de la question palestinienne, attention à laisser entendre que l’on pourrait renvoyer dos-à-dos le Hamas et Israël. Rappelons que l’Etat hébreux, bien que dirigé par la droite dure avec une frange d’extrême droite, reste une démocratie, et que les manifestations contre le gouvernement sur la réforme de la justice y ont eu lieu sans violence policière, avec une gauche qui a toutes ses chances de prendre plus tard le pouvoir par les urnes, que 20% de la population israélienne est arabe et a des députés à la Knesset, pendant que le Hamas n’a pas fait d’élections depuis 2006 et domine Gaza par les armes depuis 2007, réprime violemment sa population lorsqu’elle manifeste, tout juif étant proscrit sur son territoire, et entend instaurer à terme un dictature islamiste à l’Iranienne.
Appeler au cessez-le-feu ne peut se faire pour envisager de parler aujourd’hui de deux Etats sans mettre hors-la-loi le Hamas, sinon, ce serait le placer en position de force, et lui fournir sur un plateau la justification de ses crimes. Mais aussi, banaliser le terrorisme qui continuera de frapper partout, le sentiment d’impunité nourrissant la toute-puissance. Il a malheureusement déjà des alliés en France qui sont dans le déni.
Emmanuel Macron : Il faut « bâtir une coalition internationale » contre le Hamas
« Il faut que les bombardements de l’armée israélienne cessent » si on veut pouvoir acheminer une aide à la mesure des besoins, dit-on. Certes, mais pas seulement ! Pourquoi donc ne manifeste-t-on pas pour que le Hamas dépose les armes ? Le cessez-le feu serait immédiat, avec la possibilité de dialoguer enfin sur la question de deux Etats ? Nul règlement de la cause palestinienne ne peut impliquer le Hamas, dont les criminels doivent être jugés. Car un Etat palestinien n’est entendable que démocratique, débarrassé de toute forme de terrorisme, voire d’antisémitisme, véritable culture dans les territoires palestiniens entretenue par l’islamisme. Voilà ce qui doit être la ligne diplomatique de la France de soutien aux deux peuples, retrouvant une cohérence de projet. Emmanuel Macron a proposé, de Palestine ce 24 octobre, de « bâtir une coalition internationale » contre le Hamas et les groupes terroristes, et d’avancer sur une « relance décisive » du processus de paix. Allons-y, avant qu’il ne soit trop tard !
Le 7 octobre s’est ouvert une nouvelle page sombre de l’histoire, n’en doutons pas, celle du combat à mort entre la démocratie comme fait humain, si imparfaite soit-elle parfois, et une folie religieuse islamiste qui dépasse le point de non-retour, qui partout où elle le peut, porte en elle la guerre et l’horreur absolue, la destruction totale, le néant, de Daech au Hamas.
Guylain Chevrier
Voir aussi dans la Revue de presse le dossier Guerre Hamas-Israël (2023-24) dans Palestine dans Israël (note de la rédaction CLR).
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