22 juillet 2013
"Une nuit d’affrontements, et puis l’attente. Samedi 20 juillet, dans la matinée, une ambiance lourde régnait à Trappes, où le calme était revenu après que la ville a été secouée par des émeutes autour de son commissariat, dans la nuit de vendredi à samedi.
La veille, environ 250 jeunes de la ville étaient venus réclamer la libération d’un Trappiste de 21 ans. Lequel avait été placé en garde à vue pour rébellion, pour avoir sauté à la gorge, donné un coup de poing et tenté d’étrangler un policier qui contrôlait l’identité de sa femme, portant un voile intégral, près d’un Abribus, selon la police.
Une version policière infirmée par celle de la jeune mère de famille, qui a expliqué dans un communiqué transmis au Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) avoir "subi une injustice de la part de la police", qui aurait aussi bousculé sa mère et insulté son mari.
Vendredi soir, les violences devant le commissariat, qui ont opposé les forces de l’ordre aux émeutiers – qui ont échangé tirs de Flash-Ball et de gaz lacrymogènes contre cailloux et mortiers – se sont déroulées "en deux temps", explique le préfet de police des Yvelines, Erard Corbin de Mangoux.
Le commissariat a d’abord connu un "siège violent" par des jeunes, entre 20 h 30 et 21 h 45, l’heure de la rupture du jeûne. Un garçon de 14 ans a été hospitalisé "dans un état grave" après avoir été blessé à l’œil. Une enquête de l’inspection générale de la police nationale (IGPN) a été diligentée pour savoir si, comme le disent les habitants du quartier, il s’agit bien d’un tir de Flash-Ball qui est à l’origine de la blessure.
La seconde partie, de minuit à 2 heures du matin, a donné lieu à des affrontements plus "sporadiques", des dégradations d’Abribus, des voitures cassées et des poubelles brûlées, dont les stigmates étaient encore visibles samedi après-midi. Ces violences auraient cessé aux alentours de 3 heures du matin.
Six personnes ont été placées en garde à vue, alors que, selon le procureur de la République de Versailles, Vincent Lesclous, le mari de la femme en niqab, déféré au parquet de Versailles, "devrait être convoqué dans environ deux mois après avoir été libéré avec un contrôle judiciaire". Surtout, ce qui inquiète le préfet des Yvelines, département qui détient le record de contrôles d’identité visant des femmes voilées, c’est "ce petit noyau d’individus à Trappes qui profite de chaque occasion pour tenter d’embraser la ville". [...]
Tous les Trappistes interrogés évoquent des contrôles d’identité qui ne visent "que les musulmans", une atmosphère islamophobe propre à Trappes, selon eux. "Toute la ville est énervée ! Vous pensez qu’on se révolte juste pour un contrôle qui tourne mal ? C’est toute l’atmosphère de Trappes qui nous donne des envies de révolution", s’emporte un homme d’une trentaine d’années devant un centre commercial de la ville.
Pour celui qui se présente comme un "penseur de Trappes", "ça peut recommencer. Ça va recommencer. Mais pas qu’ici : dans n’importe quelle banlieue. On en a marre que les politiques ici veuillent ’blanchiser’ la ville". La veille, "c’est allé crescendo, dit-il. C’est quand ils ont tiré sur le petit que c’est parti en vrille ! Nous, on en a marre des policiers bandits qui jouent à ’qui interpellera le mieux une femme voilée’." C’est alors qu’un de ses amis croit voir passer un policier en civil. Il crie : "Ça va être chaud pour vous ce soir ! Préparez-vous, nous on est prêts !"
Kamel Laouadi, 32 ans et père de famille, exhibe fièrement ses deux imposants fusils... à eau. "Ça, c’est du gros calibre !", plaisante-t-il, avant de reprendre l’air grave. "On n’a pas la haine par hasard. On se battrait pour la France, mais il faut arrêter de venir toucher à la religion tout le temps." Pour lui, "ce qui va se passer ce soir" n’est qu’un début. "Dans vingt ans, Trappes, c’est la Tchétchénie !""
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