Revue de presse

Terra Nova : "Innovations" américaines pour la France (Le Monde diplomatique, fév. 10)

10 mars 2010

"Un peu partout en Europe, les partis de gauche errent comme des bateaux ivres, incapables de définir une ligne politique, un projet de société. De là les mesures contradictoires, les discours creux et les difficultés croissantes à mobiliser, particulièrement dans les milieux populaires. Ce marasme favorise les entreprises de « refondation intellectuelle » du progressisme, parfois moins désintéressées que ne l’affirment leurs ambitieux promoteurs."

Une enquête d’Alexander Zevin (historien, université de Californie à Los Angeles).

"[...] Terra Nova joue un rôle, mais indirect, par l’entremise de certains organes d’information. La fondation a en effet signé des partenariats avec, entre autres, Libération, Rue89, Métro et le Nouvel Observateur. Le rapprochement avec Libération s’est avéré particulièrement fructueux puisque le journal sous-traite à l’association deux pages mensuelles d’analyses, lui offrant à la fois l’accès à un public certes réduit (les ventes du quotidien dépassent désormais à peine les cent mille exemplaires) mais réel, et l’occasion de se présenter comme « le » think tank de gauche.

Quelques semaines avant l’université d’été du PS, alors que ni l’appareil ni les militants ne se passionnaient pour ce sujet, démarrait une campagne de grande ampleur en faveur des primaires. Que le parti ait paru résister ou se soumettre à cette influence exercée par la presse, au nom même des valeurs démocratiques dont celle-ci se réclame, la question, au fond, n’importait guère. Car, dans un cas comme dans l’autre, nul ne pouvait ignorer d’où soufflait le vent de la rénovation : fort de son astucieuse stratégie de communication, Terra Nova incarnait l’innovation intellectuelle à gauche.

En juin 2009, M. Ferrand et l’un de ses soutiens au PS, M. Arnaud Montebourg, présentent un rapport sur le sujet à Mme Aubry, puis en tirent un livre sobrement intitulé Primaire, comment sauver la gauche (Seuil, Paris, 2009). « Il faut en finir avec le vieux parti », répète à l’envi M. Ferrand, au cours d’innombrables interviews. Pendant l’université d’été, Libération publie un sondage ciselé pour établir qu’une majorité de Français (environ 70 %) considèrent des primaires ouvertes aux sympathisants et non plus seulement aux adhérents comme un « bon système de désignation du candidat socialiste (2) ». Un système d’autant plus admirable qu’il octroie aux médias et aux experts le pouvoir de choisir les candidats à la place des militants.

Evoquant la perspective d’une grande coalition centriste et l’« aspiration profonde à de nouvelles formes de démocratie, plus directes, plus participatives », Laurent Joffrin explique que, de nos jours, « les militants, aussi méritants soient-ils, ne suffisent plus à la légitimité d’un candidat ». Et le quotidien de publier la « pétition citoyenne pour des primaires populaires à gauche » lancée par Terra Nova et paraphée par des banquiers, sociologues, acteurs, personnalités politiques ainsi que par un champion olympique de canoë-kayak.

Egalement mis en ligne sur le site de la « boîte à idées », l’appel recueillera, entre août 2009 et janvier 2010, un peu moins de cinq mille six cents signatures, sur un objectif annoncé de... cent mille. Le jour où, pour des raisons internes liées à la « crise de direction » que traverse le PS, Mme Aubry annonça qu’elle était favorable à des primaires, M. Ferrand se précipita pour répondre aux questions de Rue89 et mettre en avant le rôle prépondérant de Terra Nova dans la décision socialiste. Une tempête médiatique se déchaîna alors, à laquelle aucun journaliste ne put échapper et à laquelle tous les hommes politiques importants furent sommés de réagir. Dans l’œil du cyclone, grimpant tel un ballon météo, se trouvait M. Ferrand (« l’homme qui monte », d’après Le Monde du 27 août 2009).

Innovations américaines pour la France

La question des primaires ouvertes n’a pas suscité un engouement particulier dans la sphère politique, et encore moins à l’échelle du pays. Pour cette raison même, il est intéressant de se demander pourquoi Terra Nova a fait de cette idée son cheval de bataille et continue de la défendre avec ses moyens limités, mais bruyants. S’y révèlent en effet son véritable objectif et les changements que cette organisation cherche à provoquer dans la sphère politique et intellectuelle française.

Le PS a besoin d’idées nouvelles. « Il faut des idées » est une phrase répétée pratiquement tous les jours à la radio, à la télévision ou dans les journaux, et avant tout par les socialistes eux-mêmes, simples militants ou membres du bureau national. Mais c’est une chose de chercher des idées novatrices, c’en est une autre de savoir où les trouver. La solution « think tank » ne manque pas d’élégance. Soutenus par l’Etat, notamment à travers des exonérations d’impôts accordées aux fondations, et valorisés par l’importance croissante accordée à la « société civile » dans nos démocraties, ceux-ci prospèrent depuis longtemps aux Etats-Unis. Comme souvent, c’est vers ces cieux bienheureux que se tourne le regard du courageux « réformateur » français.

Ces « universités sans étudiants » exercent une influence majeure sur la vie politique américaine depuis les années 1980, lorsque la Heritage Foundation et des dizaines d’autres think tanks néolibéraux apportèrent à l’administration de Ronald Reagan le bagage intellectuel et idéologique qui allait rendre possible la révolution conservatrice (3). Leur prestige a atteint son apogée depuis que les stratèges démocrates se sont réapproprié cette technique.

Le Center for American Progress (CAP), fondé par M. John Podesta, l’ancien chef de cabinet de M. William Clinton, pendant la traversée du désert des démocrates en 2003, est la plus célèbre de ces institutions. Le CAP a rédigé de nombreux documents utilisés par M. Obama pendant sa campagne, et il fournissait aux journalistes des questions à poser à son adversaire républicain, M. John McCain. Il a également supervisé la transition entre les deux administrations et a publié un ouvrage destiné à guider le président (4), comme le fit la Heritage Foundation pour Reagan en 1981, avec son Mandate for Leadership.

Quand on l’interroge sur les origines de sa « boîte à idées », M. Ferrand part du principe qu’il s’agit d’une innovation radicale dans le paysage institutionnel français. La production intellectuelle y pèche, nous explique-t-il, car « le diagnostic et les solutions politiques sont séparés ». Il y aurait, d’un côté, des journaux et des revues dans lesquels les experts discutent des problèmes (M. Ferrand cite Esprit et La République des idées de Pierre Rosanvallon, d’où viennent les principaux collaborateurs de Terra Nova) et, de l’autre, les partis politiques comme le PS, assoiffés d’idées rapidement exploitables.

Pour remédier à ce problème, M. Ferrand compte « importer le modèle de think tank américain », et en particulier celui du CAP, auquel il se réfère sans cesse. C’est avec le CAP que Terra Nova (et d’autres associations) organisèrent en 2008 un voyage d’étude sur l’élection présidentielle américaine. A l’issue de ce périple, la « boîte à idées » française publiait en janvier 2009 son rapport « Moderniser la vie politique : innovations américaines, leçons pour la France ».

[...] Non seulement la tradition philanthropique n’est guère répandue en France, mais l’histoire, la structure et le fonctionnement du Parti démocrate et du PS sont difficilement comparables. La culture de militantisme et la tradition intellectuelle des démocrates restent très limitées, alors que le PS demeure un parti d’élus et de militants dont la ligne fut longtemps discutée et fixée dans des revues sérieuses et au cours de longs congrès.

Dans ces conditions, le CAP peut prétendre combler un besoin réel des démocrates, qui comptent sur des organisations extérieures pour leur proposer des idées et pour les représenter auprès des médias. A l’inverse, les socialistes français ont très tôt disposé d’organes de presse plus ou moins acquis à leurs idées (L’Humanité, Le Populaire, L’Unité) et formulé eux-mêmes un discours théorique (dans La Nouvelle Revue socialiste, notamment) ; leur programme fut constamment étudié, travaillé et transformé par leurs différents courants internes (poperénistes, Ceres et chevènementistes, rocardiens, etc.). Aujourd’hui encore, le PS publie L’Hebdo des socialistes ainsi que le trimestriel La Revue socialiste, et dispose d’une « boîte à idées » interne, la Fondation Jean Jaurès.

Si sa filiation avec les think tanks américains se révèle largement imaginaire, Terra Nova peut plus légitimement trouver un ancêtre hexagonal en la Fondation Saint-Simon, créée en 1982 par des patrons, intellectuels et haut fonctionnaires de centre droit ou gauche afin de « décloisonner » la société française (6). Sa dissolution en 1999 préluda à une germination de clubs et de cercles de réflexion réformistes caressant le projet d’influencer les gouvernants et, plus vraisemblablement, de médiatiser leurs animateurs : En temps réel (2000), La République des idées (2002), A gauche en Europe (2003), Telos (2005), Terra Nova (2008).

Candidat à l’investiture socialiste à la prochaine élection présidentielle, le député Pierre Moscovici, pour lequel M. Ferrand a travaillé en tant que secrétaire général d’A gauche en Europe, estime la jeune organisation capable de produire « des notes, des mises à jour, des réflexions courtes », mais juge impensable que Terra Nova remplace un jour la Fondation Jean Jaurès, qui restera le « plus important think tank de la gauche ». D’après M. Moscovici, il serait bien plus bénéfique pour la rénovation du PS d’encourager les intellectuels à rejoindre le parti, une démarche d’ailleurs engagée - sans grand succès - par Mme Aubry avec son « Lab » du PS. Loin de répondre à un besoin d’ordre structurel, concret ou idéologique, Terra Nova semble en fait être en compétition avec le parti...

Le rôle de l’organisation présidée par M. Ferrand dans la rénovation du parti n’apparaît pas plus clairement lorsqu’on se plonge dans les textes définissant ses objectifs, méli-mélo sans saveur de discours managériaux plus ou moins bien digérés. Sa présentation officielle consacrait quelques lignes à la « rénovation intellectuelle de la social-démocratie ». Mais, dans sa forme actuelle, cette référence historique, déjà un peu légère, a été raccourcie pour laisser place à la liste des émissions de télévision et de radio auxquelles M. Ferrand a participé. « La nouvelle social-démocratie, c’est Bad Godesberg de 1957 [sic] (7) », se hasarde-t-il dans « Portrait de décideur », sur EcoNet, « le rendez vous des acteurs du e-business ».

Terra Nova reste tout aussi vague sur le plan de la méthodologie, se désignant successivement comme un « espace participatif », un « travail collectif », « ouvert à tous ceux qui cherchent un lieu pour travailler sur le fond, au-delà des courants et des partis ». Même le CAP décrit sommairement ses objectifs concrets : la couverture santé universelle, une croissance plus équitable, les énergies propres, une domination américaine bienveillante, etc. Et, lorsque le think tank washingtonien se qualifie de « progressiste », il renvoie au moins à une véritable doctrine politique, née au début du XXe siècle aux Etats-Unis, avec ses mouvements, ses factions, ses causes et ses grands noms.

Ce que signifie être « progressiste » pour un Français reste un mystère que Terra Nova ne semble pas soucieux d’élucider. La liste bigarrée des membres du « conseil scientifique », dirigé par M. Michel Rocard (cent cinquante notables internationaux - intellectuels, patrons, associatifs, hauts fonctionnaires - entassés pêle-mêle sans autre logique que celle de la notoriété), ne contribue pas à l’éclaircir.

Dans les locaux anonymes de la « boîte à idées », avenue des Champs-Elysées, loués et meublés aux frais d’un proche de M. Rocard, M. Henry Hermand, les tapis étouffent les bruits de pas ; les plantes vertes paraissent abandonnées. Ni la vague odeur de cuisine indienne provenant d’un centre commercial ni l’arrivée soudaine de M. Manuel Valls, lui aussi candidat à l’investiture socialiste à la prochaine élection présidentielle, entièrement vêtu de noir et l’air maussade, n’allègent une ambiance faite de professionnalisme sur-joué - chacun s’affaire. Selon un ancien stagiaire, M. Ferrand « ne gère ni les études, qui doivent pourtant être le cœur du travail de Terra Nova, ni le quotidien de “son” think tank ». Des tâches dévolues à un adjoint, « certes sympathique, mais inexpérimenté ».

Les cinq cent cinquante notes produites par le cercle de réflexion sont bien plus remarquables par leur profusion étourdissante que par leur contenu ou leur cohérence idéologique. Elles sont réparties en vingt et une catégories (finances publiques, éducation, Europe, défense, agriculture et pêche, etc.), dont la plus fournie, après celle des primaires, est consacrée à la crise économique. La place de la France au sein de l’Union européenne élargie constitue un autre thème important.

Le ton est parfois professionnel, mais tout aussi souvent indigeste ou simplement confus. Aussi polies que mesurées, truffées d’« opportunité manquée », d’« effets ambigus » ou de « méthodes contestables », les critiques formulées à l’encontre de la politique de M. Nicolas Sarkozy s’adressent le plus souvent à la forme plutôt qu’au fond. Les choix politiques de la droite « méritent d’être nuancés », « suscitent de nombreuses inquiétudes », ont été adoptés d’une « manière précipitée », auraient dû « passer par une réflexion profonde » et, en tout état de cause, réclament un « débat démocratique d’ampleur ». MM. Sarkozy, François Fillon et Eric Besson n’ont qu’à bien se tenir...

Des experts spécialistes du flou

[...] Dans d’autres cas, les positions de Terra Nova sont tout simplement contradictoires. De manière explicite à propos de la loi Hadopi, avec une contribution « contre » publiée en juin 2008 (« Un texte coupé de toute réalité ») et une autre « pour », en mars 2009 (« Une loi indispensable »). Ou de manière plus discrète lorsqu’il s’agit d’encourager les syndicats dans « Quelles stratégies de croissance pour la gauche ? », puis de condamner le Rassemblement contre les profits abusifs et l’exploitation (LKP) en Guadeloupe pour son nationalisme démodé et son mépris scandaleux de la propriété privée (8).

Au fil des notes, l’un des rares thèmes à ne laisser planer aucune équivoque est sans doute l’admiration pour les Etats-Unis et pour leur quarante-quatrième président. Plus de la moitié des contributions consacrées à la politique internationale traitent en effet de M. Obama. L’une d’elles est entièrement dévolue au « nouveau féminisme » de sa femme, Michelle. Un hommage particulier est rendu aux démocrates américains pour leurs politiques ambitieuses en matière d’immigration, d’intégration, de logement, de salaire minimum. Et, avant tout... au système de primaires en vigueur aux Etats-Unis, dont la France gagnerait à s’inspirer.

Si Terra Nova ne fonctionne pas comme un think tank américain, si ses principales contributions « intellectuelles » se distinguent par leur flou, c’est sans doute que sa véritable vocation est ailleurs. Pour la comprendre, il faut quitter l’univers éthéré des idées dans lequel l’organisation prétend évoluer, et se tourner vers des réalités plus crues : l’ambition personnelle et les luttes générationnelles au sein du PS.

M. Ferrand a pratiquement tout en commun avec la direction du PS. Sauf la date de naissance, ce qui s’est avéré tragique pour sa carrière. Comme la majorité des caciques actuels du parti, il a intégré les bonnes écoles — Sciences Po, Ecole nationale d’administration (ENA) et HEC — avant d’entrer en politique. On accède désormais aux sommets du parti « par le haut », en raison de son expertise, gestionnaire notamment. Et tout le problème est là, car cette évolution joue contre les nouvelles générations (9). En effet, les personnalités qui ont accédé au pouvoir à la fin des années 1970, brillants élèves de l’ENA choisis pour diriger les cabinets et les ministères de François Mitterrand, n’ont pas quitté la scène. MM. Laurent Fabius et François Hollande, Mmes Aubry et Ségolène Royal, pour n’évoquer que les plus connus, ont conservé leurs mandats, leurs réseaux de partisans dans les fédérations et parmi les maires — de même que leur santé et des ambitions insatisfaites.

Cette professionnalisation du parti, aujourd’hui largement dominé par des gens qui n’ont que la politique pour métier, a entraîné un vieillissement des élus. En 2006, parmi les députés, les sénateurs et les élus européens socialistes, environ 70 % avaient gagné leur premier mandat après l’âge de 47 ans (10). L’embouteillage a atteint de telles proportions que, selon le politiste Rémi Lefebvre, « les chances de faire une carrière politique au sein du PS apparaissent extrêmement restreintes pour tous ceux qui ont intégré le parti après 1981 ».

Blancs-becs contre caciques

Monsieur Ferrand le sait. Il a pourtant tout fait dans les règles et même enjolivé son parcours (11). Administrateur civil, il a conseillé M. Lionel Jospin (pour les affaires européennes), MM. Dominique Strauss-Kahn et Romano Prodi, alors président de la Commission européenne. Puis il fut parachuté dans la 4e circonscription des Pyrénées-Orientales, avec le soutien du bureau national et de ses anciens supérieurs, au nom du « renouvellement générationnel » — et en dépit des... primaires organisées par les militants, qui avaient désigné M. Pierre Aylagas, maire d’Argelès-sur-Mer (12).

Malgré les mises en garde de la Rue de Solférino, ce dernier refusa de se retirer et se présenta sous l’étiquette divers gauche. Après avoir perdu la primaire, M. Ferrand échoua au premier tour contre M. Aylagas, qui s’inclina lui-même au second tour contre le candidat Union pour un mouvement populaire (UMP). Les critiques n’ont pas manqué contre ce technocrate parisien « arrogant » et « hypocrite » qui défend aujourd’hui le principe de primaires. A 38 ans, M. Ferrand aurait dû attendre encore dix ans avant qu’une candidature à un poste d’élu accessible ne récompense son expertise. Mais de sa défaite vint l’inspiration.

En 2008, il lance Terra Nova et une guerre à outrance en faveur de primaires ouvertes... Ainsi cette question, qui devrait être anecdotique pour une « boîte à idées » vouée au renouvellement de la « matrice intellectuelle de la gauche », acquiert-elle une position centrale : son véritable objectif est de changer les règles qui président à la désignation des élites du parti. M. Ferrand étant loin d’être le seul ambitieux à manquer d’appuis et d’influence au sein du PS, il est rejoint dans son projet par des collègues souffrant des mêmes maux. La première étude de Terra Nova plaide pour l’organisation de primaires afin que « les leaders nationaux de la nouvelle génération, que leur talent qualifie pour la présidentielle (...), des outsiders comme Manuel Valls, Vincent Peillon, Arnaud Montebourg, puissent se présenter ». Au moins, le dernier courant socialiste en date ne dissimule pas ses objectifs derrière un quelconque référent intellectuel ou idéologique. Il vise tout simplement à rassembler une « nouvelle génération d’outsiders ».

Dans cette bataille, Terra Nova sait faire retentir le carillon des médias. « Si ce n’est pas au journal, ça n’est pas arrivé », nous assure sans rire son président. L’agitation médiatique apparaît comme une fin en soi. Si le CAP peut revendiquer une stratégie cohérente face aux grands moyens d’information — contrer leur penchant droitier —, Terra Nova cherche frénétiquement à établir des partenariats, au point, se rappelle une ancienne stagiaire, de solliciter « des supports n’ayant strictement rien à voir avec Terra Nova (...) comme Skyrock et Elle (...) qui ne servent qu’à alimenter une hyperactivité brouillonne en matière de com’ ». Diffuser des notes, des essais et des communiqués de presse sur tous les sujets concourt à cette dynamique.

Notre interlocutrice raconte qu’au cours des six premiers mois le personnel de Terra Nova était submergé par « un trop grand nombre de missions, qui avaient pour seul but de donner une envergure à une personne qui, il faut le dire, n’en a jamais eu en politique ». Sur ce plan, au moins, l’initiative de M. Ferrand est une réussite. Il est passé directement du statut de parachuté menacé par l’oubli à celui d’expert multimédia perçu comme « désintéressé » parce que ne dirigeant aucune faction identifiable. [...]"

Lire "Terra Nova, la « boîte à idées » qui se prend pour un think tank".


"(1) Olivier Duhamel et Olivier Ferrand, « Pour une primaire à la française », Terra Nova, Paris, août 2008.

(2) Libération, Paris, 26 août 2009, également source des deux citations suivantes.

(3) Lire Serge Halimi, « Les « boîtes à idées » de la droite américaine », Le Monde diplomatique, mai 1995.

(4) Mark Green et Michele Jolin (sous la dir. de), Change for America. A Progressive Blueprint for the 44th President, Basic Books, New York, 2009.

(5) A titre de comparaison, la Fondation Friedrich Ebert, associée au Parti social-démocrate allemand (SPD), employait en 2008 six cent douze personnes et disposait d’un budget de 120 millions d’euros (provenant pour l’essentiel de fonds publics).

(6) Lire Vincent Laurent, « Les architectes du social-libéralisme », Le Monde diplomatique, septembre 1998.

(7) Evénement majeur dans l’histoire de la social-démocratie dont tout étudiant en première année de science politique connaît la date, le congrès de Bad Godesberg, à l’issue duquel le SPD abandonne la référence au marxisme et se rallie à l’économie de marché, s’est déroulé... en 1959.

(8) Alex Céleste, « La crise guadeloupéenne entre dans sa cinquième semaine », Terra Nova, 19 février 2009.

(9) Rémi Lefebvre et Frédéric Sawicki, La Société des socialistes, Editions du Croquant, Bellecombe-en-Bauges, 2006, p. 79 et 84.

(10) Lire Rémi Lefebvre, « Faire de la politique ou vivre de la politique ? », Le Monde diplomatique, octobre 2009.

(11) Le Canard enchaîné du 30 septembre 2009 révélait ainsi qu’il avait inventé certains postes...

(12) Gérald Andrieu, « Olivier Ferrand a le bras long et la mémoire courte », Marianne2, 6 octobre 2009."


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