21 septembre 1994
"Depuis plusieurs années, de nombreux incidents sont intervenus dans les établissements scolaires, à l’occasion de manifestations spectaculaires d’appartenance religieuse ou communautaire.
Les chefs d’établissements et les enseignants ont constamment manifesté leur souhait de recevoir des instructions claires.
Il m’a donc paru nécessaire de vous apporter les précisions suivantes.
En France, le projet national et le projet républicain sont confondus autour d’une certaine idée de la citoyenneté. Cette idée française de la nation et de la République est, par nature, respectueuse de toutes les convictions, en particulier des convictions religieuses, politiques et des traditions culturelles. Mais elle exclut l’éclatement de la nation en communautés séparées, indifférentes les unes aux autres, ne considérant que leurs propres règles et leurs propres lois, engagées dans une simple coexistence. La nation n’est pas seulement un ensemble de citoyens détenteurs de droits individuels. Elle est une communauté de destin.
Cet idéal se construit d’abord à l’école. L’école est, par excellence, le lieu d’éducation et d’intégration où tous les enfants et tous les jeunes se retrouvent, apprennent à vivre ensemble et à se respecter. La présence, dans cette école, de signe et de comportement qui montreraient qu’ils ne pourraient pas se conformer aux mêmes obligations, ni recevoir les mêmes cours et suivre les mêmes programmes, serait une négation de cette mission. À la porte de l’école doivent s’arrêter toutes les discriminations, qu’elles soient de sexe, de culture ou de religion.
Cet idéal laïque et national est la substance même de l’école de la République et le fondement du devoir d’éducation civique qui est le sien.
C’est pourquoi il n’est pas possible d’accepter à l’école la présence de signes si ostentatoire que leur signification est précisément de séparer certains élèves des règles de vie commune de l’école. Ces signes sont, en eux-mêmes, des éléments de prosélytisme, à plus forte raison lorsqu’ils s’accompagnent de remise en cause de certains cours ou de certaines disciplines, qu’ils mettent en jeu la sécurité des élèves ou qu’ils entraînent des perturbation dans la vie en commun de l’établissement.
Je vous demande donc de bien vouloir proposer aux conseils d’administration, dans la rédaction des règlements intérieurs l’interdiction de ces signes ostentatoires, sachant que la présence de signes plus discrets, traduisant seulement l’attachement à une conviction personnelle, ne peut faire l’objet des mêmes réserves, comme l’ont rappelé le Conseil d’État et la jurisprudence administrative.
Je vous demande aussi de ne pas perdre de vue que notre devoir est d’abord l’éducation.
Aucune entreprise éducative n’est concevable sans énoncé préalable d’une règle claire. Mais l’adhésion à la règle est souvent le résultat d’un travail de persuasion.
Les recteurs et inspecteurs d’académie soutiendront donc tout les efforts qui seront les vôtres pour convaincre au lieu de contraindre, pour rechercher des médiations avec les familles, et pour prouver aux élèves qui seraient en cause que notre démarche est une démarche de respect. L’accès au savoir est le moyen privilégié de la construction d’une personnalité autonome. Notre mission est de continuer de l’offrir à tous et à toutes.
Je vous prie de ne pas omettre d’informer toutes les familles des règlements intérieurs adoptés par les conseils d’administration des établissements.
Je vous prie de demander aux enseignants de toutes disciplines aux personnels d’éducation et à l’ensemble de vos équipes, d’expliquer aux élèves dont ils ont la charge ce double mouvement de respect des convictions et de fermeté dans la défense du projet républicain de notre pays.
Responsables de vos établissements, en liaison avec les équipes pédagogiques, représentants du ministre, je vous confirme que vous avez toute ma confiance pour rechercher le meilleurs rythme et les meilleures conditions d’applications de ces principes.
Annexe Proposition d’article à insérer dans le règlement intérieur des établissements.
« Le port par les élèves de signes discrets manifestant leur attachement personnel à des convictions, notamment religieuses, est admis dans l’établissement. Mais les signes ostentatoires, qui constituent en eux-mêmes des éléments de prosélytisme ou de discrimination, sont interdits. Sont interdits aussi les attitudes provocatrice, les manquements aux obligations d’assiduité et de sécurité, les comportements susceptibles de constituer des pressions sur d’autres élèves, de perturber le déroulement des activités d’enseignement ou de troubler l’ordre dans l’établissement. »"
Voir "Circulaire n° 1649 du 20 septembre 1994 (Education nationale)".
Comité Laïcité République
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