18 janvier 2021
[Les éléments de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]
"Le projet de loi confortant le respect des principes de la république est tentaculaire. Examiné à partir du lundi 18 janvier en commission, il traite de sujets aussi divers que la laïcité, l’instruction à domicile, la polygamie, la fiscalité des associations ou la haine en ligne.
Bernard Gorce
♦ La neutralité
L’article premier étend la neutralité des fonctionnaires, qui découle du principe de laïcité, aux salariés d’entreprises privées délégataires d’une mission de service public. Par exemple, le chauffeur d’une société de car qui fait du ramassage scolaire sera tenu de ne pas porter de signes religieux.
Certains élus veulent étendre ce régime de neutralité à tous les bénévoles qui collaborent à un service public ou encore à toute personne qui s’occupe de mineur.
♦ Les maires
Dans son projet initial, le gouvernement prévoyait que, lorsqu’un élu prend une mesure contraire au respect de la neutralité, le préfet puisse assortir un recours devant le juge administratif d’une suspension immédiate de ladite mesure. Il s’agit de lutter contre les dérives clientélistes.
Le texte à l’examen permet plus modestement au préfet de faire une demande de suspension à laquelle le juge devra répondre dans les 48 heures. Les maires sont aussi très concernés par les articles sur les subventions des associations. Si une association ne respecte pas les principes républicains, l’élu aura l’obligation de retirer ou de demander le remboursement des sommes allouées.
♦ Les agents publics
Après l’assassinat du professeur Samuel Paty, le 16 octobre 2020, le gouvernement a musclé le projet de loi en ajoutant deux articles qui visent à renforcer la protection des fonctionnaires. Le projet de loi crée un nouveau délit qui vise « les menaces, les violences ou tout acte d’intimidation exercés à leur encontre dans le but de se soustraire aux règles régissant le fonctionnement d’un service public ». De plus est créé un délit de mise en danger de la vie d’autrui par diffusion d’informations, qui prévoit une peine aggravée si la victime est un agent public.
♦ Les associations
L’article 6 de la loi dispose que toute subvention publique accordée à une association est conditionnée au respect d’un « contrat d’engagement républicain » qui contiendra certains principes : liberté, égalité, fraternité, dignité de la personne, sauvegarde de l’ordre public. Le contenu exact du texte doit être présenté cette semaine par le gouvernement.
Le projet de loi élargit aussi les motifs de dissolution d’une association en conseil des ministres. Enfin, la réforme compte des mesures de fiscalité et de contrôle des finances des associations. Elles seront tenues à une déclaration annuelle du montant des dons reçus ouvrant droit à une déduction fiscale.
♦ Les associations cultuelles
Le texte de loi modifie la loi de 1905 en instaurant une procédure de déclaration d’association cultuelle en préfecture. Le représentant de l’État peut s’y opposer dans un délai de deux mois. La réforme impose, d’autre part, de nouvelles règles de fonctionnement ou comptables. En contrepartie de ces mesures, la reforme permet aux associations cultuelles de tirer des revenus des immeubles reçus par don, afin de leur garantir une plus grande autonomie financière.
Cette réforme très technique vise à inciter les associations non cultuelles qui gèrent des mosquées à passer sous le statut d’association cultuelle pour apporter plus de transparence dans l’organisation de l’islam de France.
♦ La police des cultes
La loi de 1905 est également modifiée sur le volet de la police des cultes. L’échelle des peines qui sanctionnent par exemple l’interdiction de tenir des réunions politiques dans des lieux de culte, est renforcée (le projet de loi renforce aussi les peines en cas d’atteinte à la liberté de culte). Une mesure vise la fermeture administrative - temporaire - des lieux de culte possible actuellement uniquement en cas de menace d’acte de terrorisme.
L’État pourra le faire pour prévenir et lutter contre « les agissements de nature à troubler gravement l’ordre public en provoquant à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes ». Pourront aussi être fermés des locaux dépendant du lieu de culte, par exemple une salle d’enseignement.
♦ L’éducation
Le projet de loi prévoit deux mesures importantes. L’une vise les écoles privées hors contrat sur lesquelles le contrôle de l’administration va être renforcé. Il s’agit aussi de faciliter la fermeture administrative de ces établissements « lorsque sont constatés des dérives ou des manquements graves et réitérés ».
L’autre mesure concerne l’instruction à domicile. Le principe devient celui de l’instruction obligatoire dès trois ans à l’école ; il sera possible d’y déroger sur autorisation de l’administration.
♦ La dignité de la personne
Le projet de loi prévoit quatre mesures qui visent certaines situations contraires à la dignité de la personne. Il s’agit de renforcer la lutte contre les mariages blancs (entretien obligatoire de l’élu local avec chacun des époux, séparément) ou contre la polygamie.
La délivrance des certificats de virginité tombera désormais sous le coup de la loi. Enfin un article vise à établir un dispositif de « réserve héréditaire » pour protéger les femmes qui sont exclues d’un héritage.
♦ La radicalisation, le terrorisme
L’inscription au fichier des auteurs d’infractions terroristes (FIJAIT) est élargie aux personnes qui se rendent coupables de provocation à des actes de terrorisme et à l’apologie publique de tels actes. De nouveaux motifs de dissolution d’associations en conseil de ministres sont prévus et de nouvelles peines complémentaires sont créées. Il pourra être interdit à une personne condamnée pour incitation à la haine de paraître dans un lieu de culte ou à une personne condamnée pour terrorisme de diriger une association cultuelle.
♦ La haine en ligne
Une nouvelle procédure judiciaire va permettre qu’après une décision de justice constatant l’illicéité d’un site Internet ou d’un contenu, le bénéficiaire d’une telle décision ou l’autorité administrative pourra obtenir le blocage d’une diffusion identique sur un autre site. Une procédure de comparution immédiate est instaurée pour les auteurs de provocations à la haine. Cet article ne modifie pas la loi de 1881 sur la liberté de la presse et le gouvernement assure que les journalistes ne sont pas concernés par cette disposition."
Voir aussi dans la Revue de presse la rubrique Loi "Principes de la République" (2020-21) ; le communiqué du Comité Laïcité République "Séparatisme" : plusieurs propositions du président vont dans le bon sens (CLR, 2 oct. 20) (note du CLR).
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