Communiqué du Comité Laïcité République

« Sauvez, sauvez la France, au nom du sacré-cœur... » (CLR, 15 oct. 20)

15 octobre 2020

Le Comité Laïcité République est surpris de voir surgir dans le débat national la question de l’inscription à l’ISMH et du futur classement déjà annoncé pour 2021 de la Basilique du Sacré-Cœur.

Ce lieu de culte, construit entre 1875 et 1910 et consacré en 1919, appartient à l’église catholique et précisément à l’association diocésaine de Paris, puisque son édification s’est achevée postérieurement à la promulgation de la loi de Séparation du 9 décembre 1905 et de la loi de janvier 1907, disposant de la propriété des biens immobiliers de l’église catholique.

Outre le statut de ce bien, le CLR rappelle que c’est en réaction à la fondation de la République et à la grande peur des bien-pensants déclenchée par la Commune de Paris, que cent députés royalistes et ultramontains ont accompli en 1873 un pèlerinage à Paray-le-Monial « consacrant la France au sacré-cœur de Jésus ». Ils lancèrent aussi une souscription nationale et firent voter la déclaration d’utilité publique de la basilique par une Chambre majoritairement antirépublicaine. Ces députés qui haïssaient la République, voulaient lui substituer la monarchie et il fallut attendre jusqu’en 1877 pour que leur marionnette, le président Mac-Mahon, refusant de se soumettre au verdict massivement républicain des urnes, se démette de sa fonction pour laisser la place, enfin, à un président et à des gouvernements républicains.

Rappelons encore que c’est volontairement, pour humilier le peuple de Paris qui avait refusé de se rendre aux Prussiens et qui refusait encore de les laisser entre dans Paris au début de 1871, que la « meringue » fut construite à l’emplacement du « Champ des Polonais », où commença la Commune, lorsque les troupes versaillaises vinrent tenter de dérober aux Parisiens les canons qu’ils avaient achetés pour la Garde nationale.

C’est donc un monument clérical, réactionnaire, royaliste, ultramontain, anti-républicain, destiné à effacer la mémoire de la Commune et des massacres vengeurs qui ensanglantèrent Paris et firent près de 30 000 morts parmi les insurgés, que l’on décide aujourd’hui de porter au rang de monument historique…

N’oublions pas bien entendu les deux points essentiels de cette affaire. D’une part, cette amabilité faite à l’archevêché fera porter aux contribuables, y compris les athées, les agnostiques, les croyants d’autres religions ou les catholiques laïques, les plus nombreux, jusqu’à 50% du coût des travaux qui doivent être entrepris prochainement, du fait de l’impéritie de l’archevêché qui n’a pas fait depuis vingt ans les efforts nécessaires. Ces investissements seraient plus à leur place au service de tous les Français, dans les hôpitaux par exemple…

D’autre part, il n’est pas symboliquement acceptable qu’à la veille de la célébration du 150e anniversaire de la Commune de Paris, cette église fasse l’objet de cette inscription à l’ISMH et qu’il soit prévu pour 2021, année-même du cent-cinquantenaire, son classement définitif. La République et les Républicains étaient pour une toute petite partie à Versailles et pour l’essentiel sur les barricades de la Commune. Leurs ennemis acharnés et mortels étaient tous à Paray-le-Monial, à l’origine de la fondation écrasante du sacré-cœur, tant chanté par les enfants des classes primaires à l’époque de Vichy ("sauvez, sauvez la France, au nom du sacré-cœur").

Est-ce cela que l’on veut retenir de la célébration de la fondation de la 3e République, de la Commune de Paris et de leur immense Révolution morale, sociale et progressiste ?

Le CLR demande aux autorités de la République de renoncer au moins au classement de ce monument à la gloire de ses ennemis et de revenir sur l’inscription à l’ISMH.

Le Comité Laïcité République,
le 15 octobre 2020.



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