21 avril 2015
"Selon une enquête, le nombre de conflits sur la laïcité a doublé en un an dans la sphère professionnelle. Au point de devenir un casse-tête pour les manageurs.
Une demande d’absence pour célébrer une fête, une pause supplémentaire dédiée à la prière ou un tee-shirt revendiquant de façon ostentatoire l’appartenance à une communauté : en seulement une année la question de la religion, jusque-là très discrète, s’est bien davantage posée au travail.
C’est ce que montre l’étude réalisée par l’Institut Randstad, spécialisé dans les actions favorisant l’égalité des chances, et l’Observatoire du fait religieux en entreprise (Ofre). Leur enquête, que nous révélons, a été réalisée auprès de plus de 1 000 salariés, dont la plupart exercent des fonctions de cadre.
En 2015, 23 % des personnes interrogées déclarent rencontrer régulièrement la question du fait religieux. Elles n’étaient que 12 % en 2014, soit presque deux fois moins. Les cas conflictuels (6 %) ont également doublé en un an et triplé en deux ans. Désormais, la moitié des manageurs gère au moins occasionnellement une situation liée à la religion.
Les raisons de cette crispation ? Les attentats de janvier. Ils ont suscité une « implication défensive » des pratiquants qui, se sentant stigmatisés, ont souhaité affirmer avec plus de force leur religion, analyse Lionel Honoré, président de l’Observatoire du fait religieux en entreprise.
En face, les cadres ne savent pas comment réagir. « Les manageurs se mettent plein de barrières et ont peur d’être discriminants, remarque Aline Crépin, responsable chez Randstad. Ce serait presque plus facile pour eux de traiter une demande d’absence pour aller pêcher que pour motif religieux. » C’est que, dans un pays où la laïcité fait partie du socle identitaire, beaucoup peinent à démêler les fils enchevêtrés des libertés individuelles et des principes républicains. [...]
Ce que dit la loi
Dans le service public. La laÏcité, c’est-à-dire l’obligation légale de neutralité vis-à-vis des religions, s’applique aux représentants de l’Etat de même qu’aux employés de structures privées ou d’associations qui agissent pour son compte, dans le cadre d’un service public. Les agents doivent respecter le principe de laÏcité, censé garantir leur neutralité à l’égard de tous les citoyens. Ils n’ont donc pas le droit de porter dans le cadre de leurs fonctions des signes ostentatoires d’appartenance à une religion (voile islamique, kippa, etc.). Idem dans les collèges et les lycées publics.
Dans l’espace public. Liberté de culte oblige, on peut arborer des signes religieux que ce soit dans la rue, sur les bancs des universités ou dans les transports en commun par exemple. Seul le voile intégral est prohibé, au motif qu’il dissimule le visage et l’identité de la personne qui le porte. Quant aux manifestations religieuses sur la voie publique, elles doivent faire l’objet d’une demande d’autorisation à la préfecture, sauf s’il s’agit de traditions locales répétées tous les ans (par exemple les processions catholiques du 15 août).
Dans le privé. Le principe de laïcité ne s’applique pas. Liberté de conscience oblige, un employeur ne peut pas interdire à un salarié d’exprimer ses convictions religieuses. Toutefois, un employeur a le droit d’émettre des restrictions précises et proportionnées si la pratique religieuse est incompatible avec les fonctions exercées, la sécurité ou la bonne marche de l’entreprise. Par exemple, un employeur n’est pas tenu d’accorder des jours d’absence pour des fêtes religieuses. Il peut aussi interdire certaines tenues en présence de machines dangereuses, ou si les employés sont amenés à représenter l’entreprise à l’extérieur."
Lire "Religion : deux fois plus de revendications au travail".
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