Revue de presse

"Qui est Rachid Nekkaz, celui qui paie les amendes des femmes voilées ?" (rue89.com , 24 juil. 13)

25 juillet 2013

"Promoteur immobilier controversé aux airs de BHL, ex-candidat aux législatives, Rachid Nekkaz se dit contre le niqab, mais pour la liberté de circuler avec.

661 amendes ont été dressées depuis la loi de 2011 interdisant le port du voile intégral dans l’espace public. Rachid Nekkaz dit en avoir payé 653. La dernière, c’était celle de Liala, mardi 23 juillet. Il s’est déplacé en personne, pour aller déposer un chèque de 119 € à la trésorerie d’Evry. « Chez Manuel Valls », nous dit-il au téléphone, d’une voix souriante.

Trois jours après les émeutes de Trappes, « l’homme qui paie les amendes des femmes en niqab » n’est pas mécontent de son nouveau pied de nez. Liala a contacté Rachid Nekkaz, directement, « en passant par le site de mon association Touche pas à ma constitution », assure-t-il. [...]

Pour lui, il s’agit de défendre une liberté fondamentale : pouvoir se déplacer dans la rue. C’est sur ce principe qu’il s’est appuyé pour déposer un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme, afin de faire invalider la loi de 2011.

Pour ce militant PS, qui assure être membre de la fédération du XVIe arrondissement (le PS, interrogé par Rue89 dit que non), ce serait plus simple si le gouvernement avait le « courage » d’amender la loi :

« Il faut annuler l’interdiction de porter le niqab dans les espaces publics ouverts. Sinon, dans les mois à venir on va être confrontés aux mêmes débordements qu’à Trappes. »

En attendant, il est persuadé qu’en payant les amendes, il « neutralise sur le terrain » la loi de 2011.

Ça lui a coûté 119 000 euros, frais d’avocat compris. Mais Rachid Nekkaz ne serait pas à ça près. On le dit millionnaire. Il esquive :

« J’ai suffisamment de biens immobiliers pour pouvoir payer des amendes pendant des années. »

[...] « Son fonds de commerce, c’est l’image et la communication », confirme son ami Moussa Khedimellah, sociologue de l’islam et des quartiers populaires :

« Nekkaz est un lanceur d’alerte. Il aurait pu avoir une carrière politique à la Tapie, mais il a préféré utiliser son argent pour éveiller les consciences. »

[...] Rachid Nekkaz est né en 1972 à Choisy-Le-Roi. Neuf frères et soeurs, des parents immigrés algériens et analphabètes. Leur fils fait de la philo à la Sorbonne, avant de s’engouffrer dans la bulle Internet, en créant une start-up à la fin des années 90.

Il la revend « bien » en 2000, et investit sa fortune dans l’immobilier. Depuis, le riche propriétaire est soupçonné d’être un marchand de sommeil.

Rachid Nekkaz porte plainte pour diffamation, expliquant loger ceux qui n’ont pas accès aux logements sociaux :

« Vous croyez qu’ayant vécu 25 ans dans une cité de transit totalement délabrée, je vais profiter de la misère des gens ? J’essaie d’aider ceux qui en ont besoin.

Mais de toutes façons en France, dès que vous faites quelque chose de bien on essaie de vous bloquer. Surtout, si vous avez de l’argent et que vous vous appelez Rachid ou Mamadou, vous êtes tout de suite suspect. »

C’est aussi comme ça qu’il interprète ses échecs politiques. Les 500 parrainages pour être candidat à la présidentielle de 2007 jamais obtenus par exemple. Une histoire « bizarre », qui n’a jamais été éclaircie, raconte Moussa Khedimellah :

« A quelques mois du dépôt des signatures, sa maison a été cambriolée et son ordinateur – où toutes les promesses de parrainages étaient enregistrées – a disparu. »

Rachid Nekkaz essaie ensuite, sans succès, de se présenter aux primaires PS de 2011. Candidat à l’élection législative partielle de Villeneuve-sur-Lot, chez Cahuzac, en juin 2013, il finit dernier avec 0% des voix.

Même dans les quartiers, les scores de celui qui s’était auto-proclamé « candidat des banlieues » sont catastrophiques. Candidat dans la septième circonscription de Seine-Saint-Denis aux législatives de 2007, il obtient 156 voix (0,56% des voix exprimées).

Les collectifs qui contestent la loi de 2011 sur le niqab ne veulent pas non plus entendre parler de lui. A l’évocation de son nom, le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) coupe court :

« Nous n’avons pas de lien avec ce monsieur. »

Abdelaziz Chaambi, le président de la Coordination contre l’islamophobie (CRI) préférerait qu’il rejoigne les initiatives existantes :

« Son combat serait plus crédible et plus efficace. C’est bien de jeter l’argent par les fenêtres, ça permet de se faire sa pub, mais ça n’est pas suffisant. »

Le 14 juillet, il demande à ne plus être français

Mohamed Mechmache, le président de l’Association collectif liberté égalité fraternité ensemble unis (ACLEFEU), est du même avis :

« On ne peut pas arriver sur des terrains où des gens luttent depuis 20 ou 30 ans juste parce qu’on a de l’argent. Nous, on se bat contre les amalgames et les exclusions avec les outils de la citoyenneté, on a pas les moyens de payer des amendes. »

Moussa Khedimellah propose une autre interprétation :

« Rachid a toujours voulu faire différemment, mais quand on est iconoclaste, on en paie le prix. »

Il en fait un symbole de cette génération « extra-européenne qui a du potentiel mais à qui la France n’a pas fait de place ». L’intéressé est en tout cas bien décidé à la quitter.

Le 14 juillet il a demandé la déchéance de sa nationalité. Cela devrait aussi lui permettre de mener à bien son prochain combat : il est candidat à l’élection présidentielle algérienne de 2014. Sa première promesse de campagne : réserver le poste de vice-président à une femme."

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