11 février 2014
"Les 3750 salariés de Paprec, leader indépendant du recyclage, ont voté à l’unanimité un règlement interdisant le port de signes religieux dans leurs locaux. Après l’affaire « Baby Loup », le débat sur la laïcité en entreprise est relancé.
Voilà vingt ans qu’il mûrissait ce projet. Mais, de son propre aveu, en soumettant il y a six mois l’idée d’une « charte interne de la laïcité et de la diversité » à son comité exécutif, Jean-Luc Petithuguenin, PDG du groupe Paprec, n’envisageait pas un tel plébiscite. Car plébiscite il y eut. Après trois mois de concertation, les 3750 salariés français de l’entité ont adopté d’une seule et même voix, fin décembre, un texte dont le but premier est, selon son préambule, de « favoriser la cohésion d’entreprise et le vivre-ensemble ». Une première en France.
Présenté officiellement mardi, ce document de huit articles reprend, peu ou prou, les grandes thématiques figurant dans les Chartes de la laïcité des organismes publics et de l’école : rejet des discriminations, bannissement du prosélytisme, devoir de neutralité, affirmation de la liberté d’expression et, à l’article 7, interdiction des signes religieux. « Je prends le modèle qui prévaut dans la sphère publique et je l’applique à l’entreprise. C’est pour moi le seul moyen de facilité la paix sociale en interne », commente Jean-Luc Petithuguenin, régulièrement cité parmi les chefs d’entreprise les plus en pointe sur la mixité sociale et le multiculturalisme.
Récompensé par un « Prix spécial du Jury » lors des Trophées de la diversité 2013, le groupe Paprec compte aujourd’hui quelque 4000 collaborateurs entre la France et la Suisse, originaires de 52 pays différents. « Tous ont pu s’exprimer, soit par le biais d’un comité, soit par voie de référendum. Pour se faire, mes équipes et moi-même avons sillonné la France tout l’automne, visité quelque 54 usines et tenu près d’une quarantaine de réunions. Personne n’a été mis de côté », affirme l’entrepreneur. Pour ce dernier, qui se voit volontiers « militant » et « antiraciste », son initiative est aujourd’hui le seul moyen d’inciter le législateur à « cesser tout immobilisme » et à « faire bouger les lignes ».
Dès 2003, la commission Stasi préconisait de laisser aux chefs d’entreprise, en concertation avec les partenaires sociaux, la possibilité de réglementer les tenues vestimentaires et le port des signes religieux sur les lieux de travail, « pour des impératifs tenant à la sécurité, aux contacts avec la clientèle et à la paix sociale interne ». Un avis repris cinq ans plus tard par Jean Glavany dans sa proposition de loi sur « la promotion de la laïcité dans la République », puis par le Haut-Commissariat à l’intégration (HCI) dans un rapport du 6 septembre 2011. Dès 2008, les divers rebondissements de l’affaire Baby Loup ont jeté un éclairage nouveau sur cette carence législative et multiplié les appels à légiférer. Sans que jamais les gouvernements ou les assemblées successives ne trouvent un juste milieu entre respect du pacte républicain et lutte contre les discriminations."
Lire "Pour la première fois, une entreprise adopte sa « charte de la laïcité »".
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