Discours de Jean-Michel Nivet, président du CLR Charente 9 décembre 2012
Mesdames, Messieurs, cher(e)s ami(e)s, Bonjour,
J’ai l’honneur et le plaisir – au nom du Comité Laïcité et République de la Charente et surtout en celui du collectif départemental constitué en 2009 pour célébrer la journée de la Laïcité – de vous souhaiter la bienvenue et de vous remercier d’être présents pour assister à la plantation de cet arbre de la Laïcité.
Ce collectif, comprend de nombreux mouvements associatifs, syndicaux et maçonniques charentais, tous attachés à la Laïcité et à la loi de 1905 de séparation des Églises et de l’État. Ils seront cités à la fin de ce discours.
Ce collectif a souhaité et pu, grâce au soutien et à l’aide active, il faut le souligner, de la Mairie – cette année – de La Couronne et de ses services, devant cette école publique laïque, cet arbre, un ginkgo biloba. Par cette action concrète, par le choix de l’arbre, en fixant la journée du 9 décembre comme journée de la Laïcité, les associations présentes veulent rappeler l’importance fondamentale de la Laïcité dans notre République.
Le ginkgo biloba qui existe depuis 200 millions d’années est le plus vieil arbre reconnu. C’est le premier arbre à avoir repoussé dans la zone touchée par l’explosion le la bombe nucléaire d’Hiroshima. Il symbolise ainsi, par son enracinement en terre, par la croissance de ses branches, par sa résistance et par sa longévité toutes les valeurs qui sont les fondements de Laïcité.
Et puisque nous sommes ici pour fêter et célébrer la Laïcité et s’imprégner de ses principes capitaux, à l’instar des eaux de vie qui s’imprègnent du bois, le collectif vous propose – comme l’année précédente – de lire ce qu’écrit le philosophe, grand défenseur de la Laïcité, Henri Pena Ruiz.
L’IDÉAL LAÏQUE ET SA CONDITION : LA LOI DE SÉPARATION
par Henri Pena Ruiz« La laïcité, il faut le rappeler, ce n’est pas seulement la liberté de conscience ; c’est aussi l’égalité de principe des athées et des croyants, et le souci de préserver l’espace public de toute mise en tutelle confessionnelle ou idéologique. C’est donc le souci de ne promouvoir, par la loi commune, que ce qui est d’intérêt commun à tous. Ce qui exclut tout privilège en faveur des tenants de la religion ou à l’inverse au profit des athées de conviction.
La préservation d’une sphère publique dégagée de toute emprise confessionnelle a pour but de valoriser ce qui peut unir tous les hommes, sans exception. Elle a également pour effet de protéger la sphère privée de toute ingérence illégitime, comme de toute stigmatisation. Nul ne doit être mieux considéré par la puissance publique parce qu’il est croyant, ou parce qu’il est athée. La liberté de choix des éthiques de vie, dans le respect du droit commun, exclut tout régime de cultes reconnus, qui reviendrait à favoriser l’option religieuse.La morale et les solidarités civiques ne requièrent aucun privilège accordé aux confessions. La connaissance éclairée du patrimoine culturel de l’humanité ne requiert pas non plus que soit portée une attention préférentielle au fait religieux. Les pensées du sens de la vie sont aussi bien assumées par les humanismes rationalistes que par les croyances religieuses, et les univers symboliques débordent de beaucoup la seule emprise des monothéismes en vigueur : les mythologies et la culture classique délaissées sous prétexte de modernité ou d’adaptation ont un rôle formateur tant de la sensibilité que de la capacité de comprendre ce qu’est une croyance.
La laïcité est un véritable idéal positif, porteur de valeurs irréductibles à une simple position à l’égard du religieux, et il serait dommageable à la République de l’oublier. Elle correspond à un souci d’universalité bien comprise. Celle-ci n’interdit pas l’expression des différences, mais refuse de consacrer des droits différents. Faire de la croyance religieuse ou de la conviction athée une affaire juridiquement privée, ce n’est pas méconnaître leur dimension sociale, puisque celle-ci peut s’organiser dans les associations de droit privé.
Doit être reconnu comme public seulement ce qui est commun à tous, et non ce qui unit certains hommes dans un credo commun. Bien des croyants soucieux d’une libre spiritualité s’étonnent d’ailleurs que certaines autorités religieuses revendiquent des emprises publiques, voire des soutiens matériels, alors qu’elles ne cessent d’exalter la valeur d’une spiritualité libre et désintéressée. Se soucient-t-elles alors du ciel, ou de la terre ?
En des temps de particularismes crispés et de dérives communautaristes, le mérite de l’idéal laïque est d’éviter tout enfermement dans la différence, en rappelant que l’humanité est une, et que ce constat prend forme dans les valeurs de justice et de solidarité. La laïcité n’est donc pas une option spirituelle parmi d’autres, ni une nouvelle religion séculière, mais une véritable condition de possibilité de la concorde civique et républicaine, incompatible avec tout privilège accordé à une option spirituelle. L’idée d’un monde commun à tous les hommes par-delà leurs différences lui est essentielle.
La séparation de Marianne et des dieux est à cet égard une garantie juridique contre toute confusion des genres. La loi du 9 décembre 1905 fut d’ailleurs une double libération : pour les religions, débarrassées du contrôle étatique et restituées à leur statut d’options spirituelles facultatives, c’est-à-dire libres ; pour l’Etat républicain, enfin affranchi de toute tutelle confessionnelle, et apte ainsi à remplir la vocation universelle qui est la raison d’être des institutions communes à tous.
Cette saine séparation, le poète croyant Victor Hugo l’avait anticipée en des termes d’une saisissante actualité : « L’Église maîtresse chez elle, et l’Etat maître chez lui. » Les multiples entorses faites à cette séparation par un Etat qui courbe l’échine devant le lobbie religieux ne sauraient être consacrées par une sorte de restauration rampante d’emprises publiques pour les religions. A cet égard, la lancinante mise en cause de l’indépendance de la sphère privée par des religieux a de quoi inquiéter. De même que leur volonté d’être reconnus comme des interlocuteurs privilégiés de la puissance publique, au mépris du principe démocratique selon lequel seuls les citoyens, par leur suffrage, peuvent concourir à l’élaboration des décisions politiques.
La laïcité n’est pas antireligieuse. Mais des religions qui revendiquent des privilèges publics ne sont plus de simples démarches spirituelles. Elles enveloppent un projet de domination politique plus ou moins avoué. Une telle domination tente bien sûr de se déguiser en « fidélité à une culture ». Elle s’efforce de se donner comme garantie de cohésion sociale et de civilisation, et réécrit l’histoire en s’attribuant les valeurs de l’humanisme et des droits de l’homme qui furent pourtant conquises contre elle, souvent dans le sang et les larmes. Ceux qui affranchissent sans état d’âme Jésus Christ de Torquemada sont moins généreux avec les idéaux profanes, et avec l’idéal de concorde promu par la laïcité, qu’ils s’obstinent à réduire à une posture réactive.
Certains dignitaires religieux veulent voir dans le rationalisme des Lumières la source de tous nos maux, alors qu’ils semblent fermer les yeux sur le livre noir du cléricalisme. Il est temps d’en finir avec ces polémiques anti laïques, et de se demander qui véritablement veut l’égalité de tous, dès lors que partout où les religions jouissent de privilèges officiels, elles ne s’en dessaisissent pas spontanément pour faire advenir l’égalité qu’elles prétendent pourtant appeler de leurs vœux.
A nous, républicains soucieux de justice sociale et d’égalité des droits, non seulement de préserver la laïcité contre tous ceux qui veulent la détruire sous prétexte de la rénover, mais aussi de la promouvoir. »
En conclusion, le message que tous les mouvements ici présents et représentés est que la Laïcité n’est surtout pas une notion passéiste, mais bien au contraire une idée de progrès. Ses règles sont applicables à l’ensemble du corps social et c’est une notion qui repose sur les plus grands principes humanistes forgés au cours de l’histoire.
Elle est le plus sûr garant de la paix civile et pour reprendre ce qui figure sur la plaque, elle permet à tous de vivre ensemble dans la paix et l’harmonie.
Je vous remercie.
Le collectif est composé des associations, organisations et mouvements suivants :
ADPEP 16 – Association Départementale des Pupilles de l’Ecole Publique de la Charente
CDAL – Comité Départemental d’Action Laïque
CEMEA - Centres d’Entrainement aux Méthodes d’Education Active
CLR - Comité Laïcité République de la Charente
Comité Valmy Charente
DDEN - Délégués Départementaux de l’Education Nationale
DH - Droit Humain Angoulême, Cognac
FCOL - Fédération Charentaise des Œuvres Laïques
FCPE - Fédération des Conseils de Parents d’Elèves
FRANCAS - Les Francas
FSU - Fédération Syndicale Unitaire
GLFF – Grande Loge Féminine de France Angoulême
GODF - Grand Orient De France – Angoulême, Cognac, Confolens, Ruffec
JPA - Jeunesse au Plein Air
LDH - Ligue des Droits de l’Homme
LP – Libre Pensée
UFAL – Union des Familles Laïques
UNSA & SE- UNSA - Union Nationale des Syndicats Autonomes & Enseignants.
Comité Laïcité République
Maison des associations, 54 rue Pigalle, 75009 Paris
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