26 octobre 2018
[Les articles de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]
Par David Caviglioli
Lire "Ne soyez pas si conservateur·trice·s, soyons tout·e·s inclusif·ve·s !"
"Un·e certain·e Alpheratz, dont on ignore le genre, publie une « Grammaire du français inclusif ». On sait qu’iel est chercheur·euse, doctorant·e à la Sorbonne. Selon le dossier de presse, c’est lui·elle (luel ?) qui est l’« autaire » (le mot est d’iel) de « Requiem », roman n’utilisant que des formes neutres, comme le pronom « iel ».
Ce·tte courageux·se auteur·trice entend défendre l’écriture inclusive. Et iel a bien raison ! J’ai moi-même décidé de ne plus écrire que de cette manière. Seulement les directeur·trice·s et autres chef·fe·s de ce journal sont inquiet·ète·s : iels craignent que l’écriture inclusive rende mes articles incompréhensibles pour le·a lecteur·trice moyen·ne. Je m’écrie : mais vous êtes fou·olle·s ! Ne soyez pas si conservateur·trice·s ! Les Français·es ne sont pas des arriéré·e·s, rétif·ve·s à toute évolution ! Iels sont, au contraire, ouvert·e·s au changement. Iels l’ont prouvé plus d’une fois dans l’histoire.
L’autre jour, à la terrasse d’un bar, je discutais de féminisme avec des copain·pine·s : tou·te·s étaient heureux·euses de voir les mentalités évoluer. Parmi eux·elles, pourtant, quelques-un·e·s étaient des détracteur·trice·s fougueux·euses du français inclusif. Mes arguments les ont convaincu·e·s. Iels sont reparti·e·s en fervent·e·s ambassadeur·drice·s de la cause.
Tou·te·s ceux·celles qui critiquent l’écriture inclusive me semblent bien immoraux·ales. Comment, dans un pays démocratique, un·e citoyen·ne peut-iel être si insoucieux·euse de justice sociale ? Que diable faut-iel faire pour les convaincre ?
Soyons positif·ve·s ! L’écriture inclusive, c’est d’abord pour nous tou·te·s l’occasion d’être plus inventif·ive·s dans notre usage de la langue. Un·e·tel·le préférera utiliser des mots épicènes ; un·e·tel·le, plus audacieux·se, adoptera l’usage des points médians. A chacun·e sa manière ! Alpheratz, qui propose de créer des néologismes, propose d’écrire « copaines » plutôt que « copain·pine·s », ou « lae producteur·trice » au lieu de « le·a producteur·trice », pour plus de simplicité. Qu’iel fasse comme bon lui semble. C’est ce qui est beau avec le langage : chacun·e choisit le sien, dans son coin.
Ce texte, je le sais, aura rassuré les lecteur·trice·s les plus dubitatif·ve·s : lire l’écriture inclusive, quel plaisir ! Ecrire inclusif, c’est tout aussi joyeux. Le réflexe du point médian s’acquiert vite. Iel suffit de taper Alt+0183. Les utilisateur·trice·s des traitements de texte s’habitueront. J’entends déjà les râleur0183euse·s dire qu’iels trouvent ça complexe. Je vous assure qu’on prend vite le pli. J’ai tapé ce texte en à peine 3h40.
Le français inclusif n’est pas seulement plaisant à lire et simplissime à maîtriser : il est une évolution nécessaire. La langue française, genrée de part en part, est la matrice du sexisme. Changer le langage, c’est changer le monde. La preuve : l’anglais est une langue neutre, qui ne masculinise rien, ne féminise rien, ne connaît pas les accords ; les pays anglophones sont par conséquent épargnés par le sexisme. A quand la France ?
Cela dit, soyons franc·he·s : l’écriture inclusive peut poser des difficultés. Iel est probable que cela compliquera l’apprentissage des écolier·ière·s et des lycéen·ne·s. Iels auront peut-être plus de mal à comprendre la consigne écrite du·de la professeur·e ou de l’instituteur·trice. Il faudra tout réécrire. Les agent·e·s administratif·ive·s devront tout refaire et les traducteur·trice·s, tout retraduire. Mais croyez-moi : le jeu en vaut la chandiel."
Voir aussi dans la Revue de presse la rubrique Ecriture "inclusive" dans Langue française (note du CLR).
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