Revue de presse

"Najat Vallaud-Belkacem, jupe trop longue et laïcité Canada Dry" (J. Sereni, lefigaro.fr/vox , 30 av. 15)

Julia Sereni, Ceru (Centre d’études et de recherches universitaires), collaboratrice parlementaire. 2 mai 2015

"Pour Julia Sereni, la polémique suscitée par l’exclusion de cours d’une jeune musulmane pour sa jupe trop longue reflète le manque de repères pour une application concrète du principe de laïcité, lui-même mis à mal par la ministre de l’Éducation nationale."

" [...] Si la Ministre était aussi déterminée à défendre [la laïcité], elle n’aurait certainement pas décidé, dès son arrivée rue de Grenelle, d’autoriser le port de signes religieux pour les parents accompagnateurs de sorties scolaires, marquant ainsi le retour du voile à l’école. Même dans sa famille politique, ni son prédécesseur Vincent Peillon ni le Président François Hollande, pourtant jamais avares de détricotage partisan, n’avaient souhaité remettre en cause cette interdiction. Le premier avait en effet considéré que « le milieu scolaire est un cadre qui doit être particulièrement préservé », le second que la « circulaire Chatel » devait continuer d’être appliquée.

Quant à sa « Grande mobilisation de l’École pour les valeurs républicaines » -250 millions d’euros tout de même-, une fois l’illusion de la communication dissipée, elle laissera aux défenseurs sincères de la laïcité un goût amer. En effet, ce plan s’appuie sur les associations d’éducation populaire, dont la principale la Ligue de l’Enseignement, considère le combat pour la laïcité comme faisant partie des « violences assimilationnistes de la culture dominante ». En effet, pour la Ligue, il est bien plus urgent de « faire courageusement l’examen critique des prétentions hégémoniques d’une culture dont l’universalité proclamée cache souvent des tentations uniformisantes » (« la laïcité pour faire société », la Ligue de l’Enseignement), plutôt que d’être fermes sur nos valeurs vis-à-vis de ceux qui testent chaque jour la République… Voilà comment au nom de la laïcité, le ministère finance et ouvre grand la porte des classes à une organisation qui défend tout sauf notre conception de la laïcité. Cette duplicité ne manquera pas de participer à la radicalisation des positions de chaque camp, défenseurs de la laïcité versus militants communautaires. [...]

En effet, même le nouvel « enseignement moral et civique » est loin d’être l’outil que les Français attendent. C’est le relativisme le plus total qui prévaut. Les programmes de cette discipline commencent par une mise en garde, qui sonne comme une lâche retraite, « les valeurs et les normes que cet enseignement a pour objet de transmettre et de faire partager doivent pouvoir être acceptées par tous, quelles que soient les convictions, les croyances ou les choix de vie personnels. » Sic ! La faute d’orthographe est comprise (CSP, projet d’enseignement moral et civique, 2014). Ces « valeurs » et ces « normes » ne sont à aucun moment explicitées clairement dans le document, ce qui revient à dire aux enseignants « débrouillez-vous ! ». Mais attention, choisissez bien les valeurs que vous allez enseigner pour qu’elles ne heurtent personne.

Les enseignants devront réussir le tour de force de transmettre « des valeurs » qui seront potentiellement invalidées au motif qu’elles sont contraires aux préjugés de leurs publics. Alors concrètement, un enseignant devra-t-il éviter de parler de l’égalité entre les hommes et les femmes, de la théorie de l’évolution sous prétexte que certaines croyances les contestent ? Devra-t-il considérer que la liberté d’expression peut être censurée par des considérations autres que celles définies par la loi comme le blasphème ? Dans le doute, on ne peut que lui conseiller d’éviter de mentionner que la Terre est ronde, on ne sait jamais.

Et que dire des nouveaux programmes d’histoire, qui au collège rendent obligatoire l’enseignement de l’Islam et facultatif celui de Voltaire et les Lumières, à qui nous devons l’idée philosophique et politique de la laïcité ! Idéal si le projet éducatif est de faire émerger des prochaines générations d’élèves qui verront dans « la France, pays des Lumières » une référence à « l’époque où les frères Lumières ont inventé l’ampoule électrique » -ce qui est encore considéré aujourd’hui comme une perle du bac. [...]"

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