Note de lecture

N. Polony et le Comité Orwell : L’oligarchie au scalpel

par Claude Ruche. 15 juillet 2017

Natacha Polony & le Comité Orwell, Bienvenue dans le pire des mondes. Le triomphe du soft totalitarisme, Plon, 14,90 €.

JPEG - 80 koLe Comité Orwell est récemment devenu "Les Orwelliens" par la volonté des ayant droit de l’auteur visionnaire de 1984 et de La Ferme des animaux. Ce groupe de journalistes et de citoyens, mené par Natacha Polony, a l’ambition de défendre la liberté comme le faisait Georges Orwell selon lequel "parler de liberté n’a de sens qu’à la condition que ce soit la liberté de dire aux gens ce qu’ils n’ont pas envie d’entendre". Et le moins que l’on puisse dire c’est que Bienvenue dans le pire des mondes, qu’ils publient chez Plon, est le contrepoint de ce monde de Bisounours que veulent nous faire avaler les médias, le personnel politique et certains universitaires.

Le soft totalitarisme que nous décrivent les Orwelliens est un monde aussi inquiétant que le roman 1984, à la différence que ce n’est pas une fiction mais une réalité qui se trouve sous nos yeux, pourvu que l’on ait le courage de la regarder vraiment. Et ce que dévoilent Natacha Polony et ses acolytes est terrifiant. Prenant pour point de départ la pensée de Georges Orwell et, me semble-t-il, de Michel Clouscard avec le concept de "libéral-libertaire", ils y ajoutent les apports d’auteurs dont la pensée n’a cessé de nous éclairer sur les méfaits du capitalisme et sur ses ambitions désormais mondialisées. On retrouve ainsi, en arrière plan, Christopher Lasch, Jean-Claude Michéa, Hans-Peter Martin et Harald Schumann, Christophe Guilluy, Serge Tchakhotine, Paul Yonnet et bien d’autres. Ils ne sont pas connus du grand public, c’est normal, tout est mis en œuvre pour que leurs paroles soient le moins audible possible car elle met en lumière ce nouveau monde totalitaire qui ne dit pas son nom mais qui est à l’œuvre avec l’objectif de détruire le monde ancien et d’en effacer toutes traces.

Tous ces auteurs ont décrit les mêmes phénomènes. Grâce à la technologie, grâce aux contrôles des flux financiers et commerciaux, quelques dizaines de multinationales, la plupart américaines, entendent organiser, orienter, régenter notre vie quotidienne. Pour parvenir à leurs fins, elles ont élaboré des outils d’une rare efficacité. Que se soit l’enseignement de l’ignorance à la base du nivellement vers le bas, l’appropriation de nos données, la surveillance permanente, le contrôle de nos choix, la captation de notre argent, la normalisation de nos goûts, l’uniformisation de nos besoins. Une hyperélite mondialisée, que Karl Marx nommait la super structure, s’arroge progressivement tous les pouvoirs. Le pire et de loin le plus insupportable, est que cette dérive se fait, le plus souvent, avec le consentement tacite de ceux qui en sont les victimes.

Et malheur à celui ou à celle qui ose s’opposer à cette marche destructrice des valeurs, des modes de vie, des nations et des peuples. Natacha Polony vient d’en faire les frais en se faisant "virer" des médias audiovisuels dans lesquels elle officiait. Instruire les citoyens est devenu un jeu dangereux. Son crime : avoir décrit, dans le détail, toutes les étapes de la construction de ce nouveau modèle de société qui est le pouvoir de l’argent, par l’argent, pour l’argent. En assemblant des éléments apparemment sans relation, les Orwelliens reconstituent l’immense puzzle de la prise de pouvoir d’une oligarchie financière et sans scrupules qui manipulent les masses à leur profit exclusif.

Pour le discréditer, certains, n’hésiterons pas à dire que ce livre a été écrit par des adeptes de la théorie du complot. En d’autres temps, critiquer Staline vous rangeait immédiatement dans les rangs des anti-communistes primaires. Hélas ! Les éléments et les analyses économiques et politiques que proposent les Orwelliens n’ont rien de fantaisistes et sont suffisamment étayées pour placer le lecteur devant le choix qui nous incombe tous : qu’êtes-vous prêts à faire pour sauver la démocratie ?

Claude Gabriel Ruche


Comité Laïcité République
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