Revue de presse

Martine Cerf : "Alsace : les sages ont conforté la laïcité au moins autant que le concordat" (fait-religieux.com , 26 fév. 13)

28 février 2013

"Les tenants du statu quo concordataire se sont réjouis semble-t-il un peu vite à l’annonce de la décision du Conseil constitutionnel, du 21 février 2013, en réponse à la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur le traitement des pasteurs en Alsace et en Moselle.

Ils ont même dans leur élan, encensé la « laïcité à l’alsacienne ». Cette affirmation en forme d’oxymore semble ignorer que le principe de laïcité exclut la reconnaissance de tous les cultes par la puissance publique.

En réalité, le Conseil constitutionnel n’a fait que confirmer une décision antérieure (n° 2011-157, QPC du 05 août 2011, Société SOMODIA) dans laquelle il avait établi la validité des dispositions particulières d’Alsace et de Moselle, à titre provisoire, tout en les « gelant » dans leur état actuel. En particulier, pour le régime dérogatoire des cultes, cela revenait à le laisser en vigueur sous 3 réserves :

  • Qu’il était provisoire en attendant d’être remplacé par le droit commun,
  • Qu’il ne pouvait être étendu, ni à un autre culte, ni territorialement
  • Qu’il n’était modifiable que dans le sens de son abrogation ou d’un rapprochement avec le droit commun, c’est à dire la laïcité.

Ceci explique en partie que tout le monde reste réservé sur les possibilités de financer le culte musulman, à l’égal des autres cultes reconnus : la Constitution l’interdit.

Rien de nouveau donc pour les cultes, sauf que le Conseil constitutionnel a été plus loin vis-à-vis de la laïcité. Il a affirmé le caractère constitutionnel de presque tous les principes de la loi de séparation des Eglises et de l’État du 9 décembre 1905. En particulier, que : « ... le principe de laïcité figure au nombre des droits et libertés que la Constitution garantit, qu’il en résulte la neutralité de l’État ; qu’il en résulte également que la République ne reconnaît aucun culte ».

Il a également précisé « que le principe de laïcité impose notamment le respect de toutes les croyances, l’égalité de tous les citoyens devant la loi sans distinction de religion et que la République garantisse le libre exercice des cultes ; qu’il implique que celle-ci ne salarie aucun culte ». Cette consolidation omet cependant un point essentiel : le non subventionnement des cultes.

Elle vient pourtant fort à propos alors que certaines voix s’élevaient pour prétendre que la loi de séparation n’était pas constitutionnelle. Ce n’est pas l’effet du hasard, mais bien d’une volonté affirmée par Jean-Louis Debré, le président du Conseil constitutionnel lui-même.

Il est cependant flagrant que le régime dérogatoire des cultes en vigueur en Alsace et en Moselle repose sur une inégalité de traitement entre les quatre cultes reconnus (catholique, luthérien, réformé et israélite) et les autres. Cette inégalité deviendra de plus en plus insoutenable avec le temps. Sans parler de la vulnérabilité que la France offre ainsi à une condamnation éventuelle par la Cour Européenne des droits de l’homme, s’il y avait plainte (de n’importe quel groupuscule ou secte) pour discrimination et atteinte à la liberté de conscience des citoyens non concernés pas les cultes reconnus. [...]

Martine Cerf"

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