Charles Coutel, universitaire, vice-président du Comité Laïcité République. 12 novembre 2024
« La plus inébranlable de toutes les bases est l’amour de l’humanité. »
Condorcet, Lettre à Voltaire, mars 1774
La problématique de la séparation des Églises et de l’État dans la philosophie des Lumières et chez Condorcet notamment est à la fois méconnue et originale [1]. Méconnue car victime de l’hagiographie républicaine et originale car elle exerça une influence sur le déroulement des débats préparant la loi de 1905. Condorcet a influencé la philosophie du radicalisme. Entre 1903 et 1904, deux ouvrages de Franck Alengry et de Léon Cahen, disciple d’Alphonse Aulard, contribuèrent à la diffusion du penseur des Lumières [2]. Un fil direct relie donc Condorcet et les hommes de la IIIe République.
Nous voudrions rendre compte ici de la complexité des positions condorcétiennes et de leur unité au sein de la philosophie républicaine : ce penseur reprend l’héritage des Lumières, notamment de Voltaire et le traduit au sein de la Révolution française. Condorcet, sur la problématique de la séparation, signale même des « erreurs » à ne pas commettre...
Allons plus loin : Condorcet adopte une méthodologie qui, pensée avant la Constitution civile du clergé et, a fortiori, avant le Concordat, indiquerait par avance les failles éventuelles de toute approche partielle de la séparation. Cet « en deçà » serait même un « au-delà » : Condorcet pourrait ainsi nous aider à mieux lire la loi de 1905 et son devenir actuel.
En un premier temps, nous insisterons sur la cohérence de la conception condorcétienne de la séparation. En un deuxième temps, nous montrerons comment cette synthèse de Condorcet se transforme en un programme institutionnel et politique précis, à partir de 1789. Enfin, nous insisterons sur l’actualité de cette approche.
Condorcet, traducteur humaniste des Lumières françaises
Dans les années 1770-1789, Condorcet élabore une théorie des relations du pouvoir politique et des religions. Cette méditation se nourrit notamment de la lecture de Voltaire, auquel il consacre un ouvrage très instructif, une Vie de Voltaire, en 1787. Il analyse aussi de près les causes de l’échec de Turgot dans sa Vie de Turgot, publiée en 1786. Enfin, il analyse le sort réservé aux protestants sous l’Ancien Régime, dans ses Pièces sur les protestants, publiées en 1781.
Ces textes rendent compte sans complaisance des situations créées par le cléricalisme religieux, sur le sort des juifs, des femmes, des noirs et des exploités en général. Beaucoup de pages dénoncent la collusion entre les pouvoirs politiques, religieux et économiques (par exemple dans la critique du Code noir, alors en vigueur dans les colonies).
Mais jamais Condorcet ne s’en prend à la religion en tant que telle. Dans son Éloge de M. de l’Hôpital, datant de 1777, nous le voyons attaquer les abus de la religion et non la religion : « Je parlerai des atrocités que le fanatisme a inspirées, sans craindre que ceux qui aiment la religion puissent m’en faire un crime. Si la religion a été établie pour le bonheur des hommes, par un Dieu leur père commun, certes, ce n’est pas elle qui allume des bûchers et ordonne des massacres. Je dirai qu’il y avait des abus dans l’Église : comparez les mœurs de notre clergé, ses lumières, l’ordre qui règne dans l’exercice de sa juridiction, la morale qu’il enseigne au peuple, avec ce qu’était au seizième siècle ce même clergé, et osez prétendre qu’il n’y avait point alors d’abus à réformer. » [3].
Pas de haine contre la religion mais une vive critique des dérives cléricales de celle-ci, dans une veine toute voltairienne.
L’expression « séparer la religion de l’État » figure même [4] pour résumer un chapitre de Voltaire dans l’Essai sur les mœurs et l’esprit des nations [5]. Cette formule est le point de départ de la réflexion de Condorcet : elle est dans le droit fil de Voltaire qui, le 19 mars 1765, écrivait à Elie Bertrand : « Il faut séparer toute espèce de religion de toute espèce de gouvernement. » Le souhait de Voltaire va être fondé et théorisé chez Condorcet, qui va s’appuyer sur sa pratique de savant et d’académicien, mais aussi d’ami des Lumières et de la justice – il contribue au succès de Beccaria et dénonce les erreurs judiciaires de l’Ancien Régime. Il faut souhaiter une séparation des religions et de l’État, afin de hâter la fin du constantinisme qui aliène à la fois le religieux et le politique. Condorcet se livre avec précision à une critique historique du constantinisme, dont il résume ainsi les méfaits en 1793 : « Bientôt le christianisme devint un parti puissant, se mêlant aux querelles des Césars ; il mit Constantin sur le trône et s’y plaça lui-même à côté de ses faibles successeurs » [6].
En 1787-1789, présentant les œuvres de Voltaire, il écrivait déjà : « Les troubles religieux, qui ont si longtemps déchiré l’Europe, ont pour première origine la faute que firent les premiers empereurs chrétiens de se mêler des affaires ecclésiastiques, à la sollicitation des prêtres qui, n’ayant pu, sous les empereurs païens, que diffamer ou calomnier leurs adversaires, espérèrent avoir sous ces nouveaux princes le plaisir de les punir. Soit mauvaise politique, soit vanité, soit superstition, on vit le féroce Constantin, non encore baptisé, paraître à la tête d’un concile. Ses successeurs suivirent son exemple, et les troubles qui ont depuis agité l’Europe furent la suite nécessaire de cette conduite. En effet, dès que l’on établit pour principe que les princes sont obligés en conscience de sévir contre ceux qui attaquent la religion de statuer une peine, quelle qu’elle soit, contre la profession ouverte ou cachée, l’exercice public ou secret d’aucun culte, la maxime que les peuples ont le droit, et même sont dans l’obligation de s’armer contre un prince hérétique ou ennemi de la religion, en devient une conséquence nécessaire » [7].
Le constantinisme eut un double effet pervers : primo une instrumentalisation du religieux par le politique, dont le gallicanisme comme l’ultramontanisme furent les effets en France ; et secundo une instrumentalisation du politique par le religieux, que Condorcet nomme le « machiavélisme des ministres du culte » [8]. Le philosophe ne cessera de dénoncer le retour du religieux au sein du pouvoir politique, notamment en 1793 lors de l’instauration du culte de l’Être suprême par les robespierristes, volontiers admirateurs de l’austère Sparte [9]. Il saura aussi condamner les prêtres qui en 1792 fomentèrent des troubles politiques à l’occasion de l’instauration de la Constitution civile du clergé. Il dénonce toute espèce de « transfert de sacralité » (formule de Mona Ozouf) entre le religieux et le politique.
À cette critique du constantinisme s’ajoute la critique de tout pouvoir à se constituer en ennemi des Lumières ; « l’esprit de secte » opposé à « l’esprit public » guette même la Révolution puis la République [10]. L’idée de séparation entend neutraliser le retour toujours possible de « l’esprit de secte » au sein du pouvoir politique ; aux croyants de faire le même travail critique au sein de leurs organisations ecclésiales.
Dès lors, se séparant de la religion, l’État renvoie la religion à sa destination propre. À charge, pour la République, de neutraliser en son sein « l’esprit de secte » par une promotion de la rationalité humaniste et scientifique, notamment grâce à l’instruction publique. La République évitera ainsi toute persécution contre les croyants ; la persécution en faisant des martyrs, donne raison à ceux qui ont tort. Condorcet note très finement dans les Pièces sur les protestants : « Tout catholique convaincu de la vérité de sa religion doit donc désirer que les protestants soient tolérés, puisque la persécution n’est qu’un moyen d’attacher les hommes, indifféremment, à l’erreur comme à la vérité » [11].
Cette problématique de la tolérance se retrouvera plus tard chez Condorcet : la République en persécutant les croyants se discréditerait et ferait de la « séparation » un « divorce » ! Les hommes de la IIIe République retiendront cette leçon dans l’élaboration de la loi de 1905.
Trois conséquences pratiques sont tirées de ces constatations théoriques sur le constantinisme et le danger clérical.
1 Une première d’ordre économique et démographique : le monde moderne et l’État impose un vrai état civil, qui ne doit plus être tenu par l’Église. C’est à l’État d’enregistrer les morts, les naissances et les mariages. Il faut laïciser l’état civil.
2 Une seconde conséquence d’ordre épistémologique et scientifique : si le politique et le religieux se séparent, un nouvel espace de sociabilité rationnelle se déploie : c’est le projet d’une arithmétique politique, nouvel art social prôné par Condorcet [12].
C’est la raison critique et non la théologie dogmatique qui constitue l’horizon du pouvoir politique et du droit naturel. Turgot échoua en voulant instaurer cette vision rationnelle du monde car la religion entendait encore contrôler les esprits. Dès 1781, dans les Pièces sur les protestants, Condorcet insiste sur cette nécessaire indépendance de la raison : « Quant à l’exercice des chaires d’instruction, à l’entrée dans les Académies, l’utilité publique semble exiger que ces places soient accordées à ceux qui ont le plus de lumières et de talents. […] À Alexandrie on n’imaginait point qu’il fallait être chrétien pour exposer les découvertes d’Archimède ou d’Hipparque ; pourquoi ne pourrait-on pas, sans être catholique, exposer celles de Newton ou d’Haller » ? [13].
La séparation de la religion et de l’État est requise par l’objectivité du progrès des sciences, des techniques et des lumières. Cette séparation assure donc la promotion d’une raison publique qui verra dans tout vœu majoritaire une figure provisoire du vrai. Cette séparation assure le passage de la démocratie vers la République : l’opinion commune devient une opinion publique !
3 Enfin, une conséquence éthico-philosophique. La critique du constantinisme implique une indépendance de la morale et de la religion et donc la constitution d’un lieu spécifique où les liens éthiques et civiques seront pensés pour eux-mêmes sans le détour par le religieux. Ce lieu sera l’instruction publique, protégée par la nature laïque des enseignements et des maîtres. Condorcet résume ainsi son analyse : « L’instruction morale du peuple devrait être absolument séparée et des opinions religieuses, et des cérémonies du culte » [14].
Ce thème essentiel est repris dans le Second mémoire sur l’instruction publique : « On doit […] séparer cette morale de tout rapport avec les opinions religieuses d’une secte particulière. […] Il ne faut même pas lier l’instruction de la morale aux idées générales d’une religion » [15]
Cette thématique est importante car elle donne un aspect positif à l’idée de séparation. Elle complète la critique du constantinisme : les croyants n’ont rien à craindre de l’idée de séparation, au contraire ; le Rapport sur l’instruction publique de 1792 précise même : « Ceux qui croient encore à la nécessité d’appuyer la morale sur une religion particulière doivent eux-mêmes approuver cette séparation : car sans doute ce n’est pas la vérité des principes de la morale qu’ils font dépendre de leurs dogmes ; ils pensent seulement que les hommes y trouvent des motifs plus puissants d’être justes ; et ces motifs n’acquerront-ils pas une force plus grande sur tout esprit capable de réfléchir, s’ils ne sont employés qu’à fortifier ce que la raison et le sentiment intérieur ont déjà commandé » ? [16].
Les croyants sont invités à revenir aux fondements propres à leur foi. La séparation renvoie l’État et la religion à leurs missions propres. Une fraternité humaniste et laïque pourra accompagner sans rivalité la fraternité religieuse. L’amour de l’humanité pourra être partagé par les croyants, comme par ceux qui ne croient pas. En disciple de Voltaire, Condorcet écrit : « L’intérêt général de l’humanité, ce premier objet de tous les cœurs vertueux, demande la liberté d’opinions, de conscience, de culte ; d’abord, parce qu’elle est le seul moyen d’établir entre les hommes une véritable fraternité ; car, puisqu’il est impossible de les réunir dans les mêmes opinions religieuses, il faut leur apprendre à regarder, à traiter comme leurs frères ceux qui ont des opinions contraires aux leurs. Cette liberté est encore le moyen le plus sûr de donner aux esprits toute l’activité que comporte la nature humaine, de parvenir à connaître la vérité sur tous ces objets, liés intimement avec la morale, et de la faire adopter à tous les esprits : or l’on ne peut nier que la connaissance de la vérité ne soit pour les hommes le premier des biens » [17].
Cette idée de séparation est donc indispensable à la fois sur le plan économique, épistémologique et éthique : elle assure le fondement de la thèse républicaine : le progrès des Lumières est une condition des progrès de l’humanité.
Entre 1789 et 1793 : la séparation en acte
La synthèse philosophique, analysée précédemment, s’applique dans l’action de Condorcet, dès le début de la Révolution. Cette action se déploie dans quatre types d’écrits.
1 Des écrits de circonstance, réagissant à chaud aux premières décisions de la Révolution en matière religieuse, notamment avec les questions de la Constitution civile du clergé, des biens ecclésiastiques et des prêtres réfractaires.
2 Des écrits plus réflexifs, jugeant l’action de la Révolution, repérant quelques erreurs, ouvrant des perspectives.
3 Des textes plus législatifs et institutionnels, confirmant le rôle effectif de Condorcet dans le processus de laïcisation à l’œuvre depuis 1789.
4 Enfin des synthèses juridiques et philosophiques, qui résument la théorie condorcétienne de la séparation : les Cinq mémoires sur l’instruction publique (1791), le Plan de Constitution (1793).
Nous ne saurions rendre compte de tout ce corpus ; insistons donc sur quelques écrits importants.
Par deux fois, en 1790 puis en 1792, Condorcet présente son programme, traduction de sa théorie de la séparation :
« Que les actes qui constatent la naissance, le mariage, la mort des citoyens, soient soustraits à une autorité étrangère, et ne reçoivent leur authenticité que d’officiers civils établis par la loi ;
que la morale fasse partie d’une éducation publique commune à toutes les classes de citoyens ; que l’on écarte avec soin de cette éducation toute influence sacerdotale ; que les prêtres nous exhortent à remplir nos devoirs, mais ne prétendent plus au droit d’en fixer l’étendue et les limites » [18].
Ces propositions inspirent l’action du philosophe dans les questions précises qui sont abordées.
1 Condorcet s’oppose au député Dom Gerle qui voulait présenter le catholicisme comme religion officielle de la France (Décret du 13 avril 1790).
2 Condorcet ne souhaite pas spolier les ministres du culte, lors du débat sur l’usufruit des biens ecclésiastiques. Il dénonce toute persécution.
3 Condorcet, lors du débat sur la Constitution civile du clergé, rappelle son attachement à la séparation et à la liberté du culte, mais signale la contradiction qu’il y a à continuer à salarier certains ministres du culte. Il y voit des germes de discorde. Dès le 12 juin 1790, il résumait ainsi sa position : « Toute religion doit être libre dans la constitution de son clergé, dans sa discipline, dans son culte comme dans ses dogmes. Le pouvoir de l’autorité civile se borne à réprimer ce qui serait contraire aux droits des citoyens. […] Ainsi l’unique but d’une constitution ecclésiastique, donnée par les représentants de la nation, doit être d’empêcher les ministres de la religion de former un corps dans l’État, de contracter un esprit particulier : surtout s’ils enseignent la morale, la constitution doit les empêcher de former un système de morale théocratique calculé sur leurs intérêts, qui, au lieu de se perfectionner par le progrès de la raison humaine, tende au contraire à la retarder ou à l’égarer, et qui ait pour objet, non d’éclairer les hommes sur leurs devoirs, mais de les gouverner par les terreurs de la conscience » [19].
4 En octobre 1791, Condorcet reprend la question de l’état civil avec plus d’efficacité [20] et l’on sait que le 20 septembre 1792, la législative sécularisera totalement les actes de l’état civil.
5 Enfin, en septembre 1792, Condorcet suit le vote de l’Assemblée sur la question des prêtres réfractaires [21].
En 1792, dans un texte synthétique, il résume son action, en faisant parler l’Assemblée nationale : « La liberté de culte est un des droits de l’homme, et elle doit être établie ; mais la nation ne s’est engagée qu’à payer un seul de ces cultes ; elle ne payera donc que celui dont elle a fait choix : ceux qui en veulent un autre peuvent le suivre à leurs dépens. Les ministres religieux en seront plus chargés de la fonction purement civile de constater les naissances, les mariages et les morts : toute influence sur l’instruction publique leur sera enlevée » [22]
Dans son œuvre proprement constitutionnelle, Condorcet résumera son action en quelques articles qui méritent d’être cités, car ils auront une grande influence, notamment dans les projets ultérieurs (1795).
1 Projet de décret sur l’instruction publique, d’avril 1792 : titre II, article 6 : « La religion sera enseignée dans les temples, par les ministres respectifs des différents cultes. »
2 Projet de déclaration des 15 et 16 février 1793 : article 4 « Tout homme est libre de manifester sa pensée et ses opinions. » Article 6 « Tout homme est libre dans l’exercice de son culte. »
Entre 1789 et 1793, on voit donc Condorcet présent sur tous les fronts, cherchant à appliquer concrètement les idéaux et les principes des Lumières. Insistons sur l’actualité de sa démarche.
Actualité de la problématique condorcétienne de la séparation
Trois leçons méritent d’être tirées :
1 En cherchant dans le constantinisme l’origine de la double aliénation du politique et du religieux, Condorcet jette un regard critique sur les contradictions politiques de l’Ancien Régime, mais nous donne aussi les moyens de comprendre les conséquences d’un nouveau retour subreptice de ce constantinisme dans notre modernité. Il nous permet de comprendre les limites de la Constitution civile du clergé, voire du Concordat. La radicalité de son approche de la séparation indique les dangers de tout « néo-constantinisme » qui en appellerait à une révision de la loi de 1905, au nom de nouvelles réalités socio-politiques, par exemple. Il nous met ainsi en garde contre tout risque d’auto-sacralisation du pouvoir politique. Le pouvoir politique républicain n’est jamais à l’abri de sa propre sacralisation, comme le redira Clemenceau entre 1903 et 1905. Avant lui, Condorcet a prescrit les remèdes en indiquant les dangers : le respect des lois, la liberté de conscience et de culte, l’indépendance des esprits, une solide constitution républicaine et laïque, une instruction publique de qualité.
2 L’État républicain ne doit en aucun cas être le persécuteur des religions, sinon il ne ferait que retourner la régression inquisitoriale de certaines religions, et remplacerait le cléricalisme religieux par le cléricalisme politique. Songeons à cette phrase de Clemenceau, le 17 novembre 1903, extraite de son fameux Discours pour la liberté contre le monopole de l’enseignement : « Pour éviter les congrégations nous faisons de la France une immense congrégation » [23].
Condorcet fait du cléricalisme (« l’esprit de secte ») un danger qui menace les religions mais aussi le pouvoir politique, même républicain. La séparation immunise la République contre un repli sectaire sur elle-même : ce geste laïque a préservé le républicanisme français contre les totalitarismes et les fanatismes intégristes. Il peut nous protéger contre le communautarisme, le cléricalisme et le populisme.
Défendons la loi de 1905 : cette dernière garantit plus que la « liberté religieuse » ; elle défend la liberté absolue de conscience, qui nous laisse le loisir de n’avoir aucune religion.
3 Ultime leçon : Condorcet, traducteur des Lumières, montre que la séparation ne saurait être pensée en dehors d’une histoire de l’émancipation continue de l’Humanité, à travers les progrès des sciences et des Lumières. L’État comme les religions ne doivent pas devenir leurs propres idoles. On mesure l’actualité de cette conception universaliste, rationaliste, volontariste, laïque et humaniste de la séparation : c’est le leg des Lumières françaises à travers Condorcet. Les Lumières et Condorcet instituent une République permanente, fraternelle et universelle, soucieuse de progrès et animée par l’amour de l’Humanité.
Œuvrons !
Charles Coutel
[1] Ce texte reprend et actualise une version publiée dans L’enseignement philosophique, 56e année, n°4.
[2] Franck Alengry, Condorcet, guide de la Révolution française, chez Giard et Brière ; Léon Cahen, Condorcet et la Révolution française, rééd. Court Franklin, New York, 1971.
[3] Condorcet, Œuvres complètes, Paris, Firmin Didot 1847-1849, en 12 volumes ; nous renvoyons à cette édition ; ici, l’extrait est t. III, p. 467.
[4] T. IV, p. 537.
[5] Voir t. XVIII de l’Édition de 1785 des œuvres du philosophe de Ferney.
[6] Extrait du Tableau historique, Esquisse, Cinquième époque, édition de l’INED, 2004, p. 311.
[7] T. IV, p. 537
[8] Voir t. X, p. 392, 411, 417.
[9] Le Premier mémoire sur l’instruction publique de 1791 critique toute instauration d’une « religion politique ». Cf. éd. Garnier Flammarion, p. 93, en collaboration avec Catherine Kintzler.
[10] Voir le Cinquième mémoire sur l’instruction publique, éd. citée, p. 261.
[11] T. V, p. 534-535
[12] Voir les pages 27 et suiv. de notre anthologie Politique de Condorcet, Paris, Payot, 1996.
[13] T. V, p. 518
[14] T. V, p. 145
[15] Éd. citée, p. 127-128 ; et voir F. Alengry, op. cit., p. 744-745.
[16] Édition Edilig, 1989, p. 35
[17] T. IV, p. 257
[18] T. X, p. 100
[19] T. X, p. 100
[20] Voir t. XII, p. 8-14.
[21] Voir t. XII, p. 15 sq.
[22] t. X, p. 392.
[23] Cité dans l’anthologie d’Yves Bruley, 1905, la séparation des Églises et de l’État. Les textes fondateurs, Paris, Perrin, coll. « Tempus », 2004, p. 117
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