Culture / Cinéma

Les Eblouis : L’engrenage, de la religion à la secte (G. Durand)

par Gérard Durand. 28 novembre 2019

[Les échos "Culture (Lire, entendre & voir)" sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

Les Eblouis, de Sarah Suco (1 h 39), avec Camille Cottin, Jean-Pierre Darroussin, Eric Caravaca. Sorti le 20 nov. 19.

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Qui a dit qu’une religion n’était qu’une secte qui a réussi ? En fait elle peut être les deux, la religion catholique nous en apporte la preuve. Religion instituée et respectée côté face A et multitude de sectes face B, elle appelle cela communautés. Il y en a partout et dans leur grande majorité elles s’intéressent aux enfants mais pas seulement. Si les Soldats du Christ, fortement soutenus par la papauté et surtout par Jean Paul II n’étaient qu’un vaste ensemble de pédophiles, d’autres communautés, beaucoup plus discrètes, sont à la recherche d’adultes, plus ou moins perdus, plus ou moins illuminés afin de les soumettre à leurs propres règles et, si possible s’attribuer leur argent.

Sarah Suco connait son sujet car elle a vécu dans ce milieu pendant plus de dix années et jusqu’à l’âge de 18 ans. Elle connaît parfaitement ce dont elle nous parle et réussit cependant à ne pas faire un film autobiographique mais un travail qui va à l’essentiel. Dans ses interviews elle déclare que la réalité est encore pire que ce qu’elle nous montre. La vérité aurait tourné au réquisitoire ou au film d’horreur et elle ne voulait ni l’un ni l’autre.

Ville de province (Limoges ou Angoulême, je ne sais plus) une sortie de messe très banale avec un prêtre qui invite au partage du repas en ce jour du seigneur. La famille Lourmel, couple pratiquant, et ses quatre enfants accepte volontiers. Son problème est celui de la mère très perturbée psychologiquement et un peu celui du père au caractère faible qui se contente de suivre les lubies de son épouse (Camille Cottin et Eric Caravaca, remarquables).

Tous deux, par petites étapes, vont se laisser convaincre de rejoindre, avec leurs enfants la communauté de la Colombe, dirigée par ce prêtre si charmant (Jean Pierre Daroussin en contre-emploi très convaincant). Mais les sourires du début s’effacent vite et les visages, comme la lumière du film, deviennent de plus en plus sombres, surtout chez les enfants. Comment à ce stade ne pas admirer la performance de la fille ainée (Celeste Brunquell, extraordinaire) passionnée de cirque, dont elle va être privée dès son entrée dans la communauté - car le cirque a des aspects diaboliques...

Les parents ne se rendent compte de rien, sont de plus en plus beats et rien ne les surprend, même les rites les plus stupides. Seule Camille perçoit clairement les aspects malsains et va lancer vers l’extérieur des appels à l’aide, que personne n’entendra à l’exception d’une juge dont les soupçons sont manifestes. Elle finira cependant par lancer l’alerte. Inutile d’en dire plus.

Le dénouement sera fatal à la communauté et le film s’arrête sur la dédicace de Sarah Suco « A mes frères et sœurs », qui nous rappelle cette phrase de l’une de ses interviews : « Vous croyez vraiment qu’on peut avoir vécu cela et en sortir indemne ? »

A voir absolument.

Gérard Durand


Voir aussi dans la Revue de presse la rubrique Sectes (note du CLR).


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