Revue de presse

"Le Conseil d’Etat suspend la dissolution de deux associations propalestiniennes" (lemonde.fr , 30 avril 22)

30 avril 2022

[Les éléments de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

"Le ministère de l’intérieur reprochait notamment au Comité action Palestine et au Collectif Palestine vaincra d’avoir relayé des communiqués d’organisations classées terroristes. L’Etat devra verser 3 000 euros à chacune des associations.

Par Benjamin Barthe

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Le mandat de Gérald Darmanin Place Beauvau se termine – à supposer qu’il ne soit pas reconduit à son poste dans le prochain gouvernement – sur un camouflet. Vendredi 29 avril, le Conseil d’Etat a ordonné la suspension de la dissolution de deux associations propalestiniennes ; elle avait été décrétée en conseil des ministres le 9 mars, à l’initiative du ministre de l’intérieur qui les accusait d’incitation « à la haine, à la discrimination et à la violence ».

« Il s’agit d’une victoire précieuse pour l’Etat de droit, qui sanctionne l’instrumentalisation politique du conflit israélo-palestinien du ministère de l’intérieur », a réagi auprès de l’Agence France-Presse (AFP) Me Vincent Brengarth, l’avocat d’une des associations, le Comité action Palestine, basé à Bordeaux. « C’est une très belle décision, extrêmement rare dans le climat ambiant mais protectrice des droits fondamentaux », a-t-il ajouté dans un message transmis au Monde.

« Atteinte grave à la liberté d’association »

« Cette décision (…) bat en brèche la propagande de l’extrême droite sioniste et ses amalgames entre antisionisme et antisémitisme », a estimé pour sa part l’autre association mise en cause, le Collectif Palestine vaincra, qui est implanté à Toulouse.

Les décrets du 9 mars reprochaient aux associations d’avoir publié sur leur site Internet et leur page Facebook des propos anti-Israël véhéments, de soutenir la campagne Boycott Désinvestissement Sanctions (BDS) appelant au boycott de l’Etat hébreu et d’avoir relayé des communiqués d’organisations palestiniennes classées terroristes par l’Union européenne.

A l’occasion de la commémoration des dix ans de la tuerie de l’école Ozar Atorah, perpétrée par Mohammed Merah dans la ville rose, le président Emmanuel Macron s’était félicité, devant le président israélien Isaac Herzog, en visite en France, de la décision de son gouvernement, en qualifiant les deux associations « d’antisémites ».

Mais dans ses ordonnances faisant suite au recours en référé déposé par les intéressées, la plus haute juridiction administrative a jugé ces imputations infondées. Dans sa décision concernant le Comité action Palestine, elle a estimé que l’ordre de dissolution « porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’association et à la liberté d’expression ».

Le boycott relève de la liberté d’expression

« Les publications de l’association (…), si elles expriment des positions tranchées et parfois virulentes sur la situation au Proche-Orient (…), ne peuvent, en l’état de l’instruction, être regardées comme provoquant à la discrimination, à la haine ou à la violence envers un groupe de personnes, ajoute le Conseil d’Etat. Il n’est par ailleurs pas établi que (…) l’association aurait publié sur son site Internet des publications présentant un caractère antisémite. »

L’ordonnance concernant le Collectif Palestine vaincra blanchit celui-ci du soupçon « d’agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme en France ou à l’étranger ». Une accusation brandie par le décret du gouvernement sur la base du soutien de l’association au Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), une petite organisation de la gauche palestinienne, et à Georges Abdallah, un Libanais emprisonné en France depuis 1984, pour complicité dans l’assassinat de deux diplomates, l’un Israélien et l’autre Américain

Toujours dans sa décision relative au Collectif Palestine vaincra, le Conseil d’Etat écrit que « l’appel au boycott, en ce qu’il traduit l’expression d’une opinion protestataire, constitue une modalité particulière d’exercice de la liberté d’expression ». Cette position ne manquera pas d’être relevée par les acteurs de la campagne BDS en France qui, depuis une douzaine d’années, bataillent contre les pouvoirs publics pour faire reconnaître la légitimité de leur combat.

En 2015, la Cour de cassation avait décrété l’appel au boycott d’Israël illégal et validé les poursuites lancées les années passées contre des militants appelant à ce type d’action. La Cour européenne des droits de l’homme a contredit cette jurisprudence en 2020, en soutenant que le boycott relève de la liberté d’expression. Mais en dépit de cette condamnation, Paris maintient la pression judiciaire sur les partisans du BDS.

En plus de suspendre ses décrets de dissolution, l’Etat devra verser 3 000 euros à chacune des deux associations. Sollicité par l’AFP, le ministère de l’intérieur n’a pas souhaité faire de commentaires."

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