20 mars 2009
"La Grande-Bretagne a connu un débat similaire qui s’est finalement soldé par l’installation d’un référentiel ethnoracial depuis 1991. Une agence pour l’égalité raciale vérifie partout les proportions de « Noirs » (classés en plusieurs genres, pakistanais, jamaïquains…), de « Blancs » (trois sortes), d’« Asiatiques »… Si Londres fait figure de capitale cosmopolite, avec des médecins indiens, des avocats tamouls… globalement, le différentiel de taux de chômage entre Blancs et Noirs n’a pas évolué ces dernières années. « Les ghettos communautaires se sont renforcés, reconnaît Trevor Phillips, le directeur de l’agence, et la politique ne compte guère plus de leaders de couleur qu’en France ». Ce qui relativise l’efficacité de ce système.
La réalité du mélange
Aux États-Unis, qui restent le modèle le plus abouti, « ce sont les quotas et les sanctions qui ont permis la création d’une classe moyenne noire », résume Laurent Blivet, auteur d’un rapport pour l’Institut Montaigne sur les statistiques de la diversité en entreprise. « Des grands procès ont forcé les entreprises à revoir leurs processus d’embauche. » Les statistiques ethniques « doivent être complétées par des critères sociaux, a affirmé Barack Obama pendant sa campagne, notant que ses filles « ont moins besoin d’aide que des enfants pauvres blancs ».
D’autre part, la multiplication des catégories recensées, suite aux revendications des Latinos d’être comptés à part, des Asiatiques, mais aussi des Afro-Américains qui estimaient que les immigrés africains, souvent plus diplômés, prenaient leur place dans les entreprises, a conduit à « une dispersion et une perte d’efficacité de l’affirmative action », selon Kenneth Prewitt, l’ancien directeur du bureau du recensement aux États-Unis.
Or la France est une société déjà métissée. Un quart des jeunes de 18 ans ont un grand-père immigré. Près d’un tiers des Beurs se marient avec des Français de longue date. La réalité du mélange est à l’œuvre et change la donne. Les enfants de couples mixtes franco-maghrébins subissent beaucoup moins de discrimination lorsque le père est français, selon une étude du démographe Jean-Luc Richard. « On ne peut pas mettre tous les descendants d’Arabes dans la même catégorie », insiste le chercheur.
Dans ces conditions, compter le « ressenti d’appartenance » des personnes permettra-t-il d’agir efficacement ? Faudra-t-il considérer que 2 % de personnes se déclarant arabes dans une entreprise bretonne est un résultat positif en l’absence de données sur la région ? Si des chiffres semblent indispensables pour mieux cerner le destin des enfants d’immigrés, la question des statistiques ethniques ne résout pas, à elle seule, celle des discriminations."
Lire "Le comptage des minorités sans quotas est peu efficace".
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