Revue de presse

"Laïcité dans les crèches : le PS refuse l’obstacle" (marianne.net , 12 mars 15)

15 mars 2015

"Le Premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, l’a confirmé mercredi matin au micro de France Inter, la loi sur la neutralité religieuse dans les crèches est repoussée au 11 mai. Impossible de voter un texte jugé "sensible" à deux semaines d’élections difficiles. D’autant que l’opposition au texte se fait de plus en vive au sein du Parti socialiste, phagocyté par les tenants d’une laïcité positive.

Au pied du mur, le Parti socialiste, comme à son habitude, refuse l’obstacle. Mercredi matin sur l’antenne de France Inter, deux mois jour pour jour après la grande marche du 11 janvier — dont le chef de l’Etat nous assure pourtant qu’il veut faire perdurer « l’esprit » —, Jean-Christophe Cambadélis l’a confirmé : le texte du PRG sur l’extension du principe de laïcité aux crèches et centre de loisirs financés par de l’argent public ne sera finalement pas étudié avant les élections départementales, comme l’avait annoncé la veille Libération. Faut-il y voir un camouflet pour le Premier ministre ? Car ce texte avait en quelque sorte pour objectif de graver dans le marbre la jurisprudence Baby-Loup, cette crèche qu’un certain Manuel Valls avait à l’époque vivement soutenu. Il faut croire que les effets de manche de Valls le partisan d’une laïcité « exigeante » auront fait long feu...

Le Premier secrétaire du PS n’a en tout cas pas caché que le sujet était beaucoup trop sensible à quelques jours d’une élection déjà bien mal engagée. « Bien sûr, il y a des sujets qui fâchent. Il n’y avait pas la sérénité pour aborder ces débats dans une campagne départementale difficile. » « Le texte est simplement reporté d’un mois. Ce n’est pas un problème » a tenté de dédramatiser Cambadélis dans la foulée, limitant un peu rapidement le sujet à une simple question de timing. Car selon Alexis Bachelay, député PS des Hauts-de-Seine, opposé au texte, il y a peu de chances de le voir repasser en l’état : « Cette proposition de loi risquait de recréer du clivage et de stigmatiser les femmes voilées alors qu’on est à la recherche de consensus et de dialogue » a-t-il confié à Mediapart. Une position caractéristique des partisans d’une « laïcité positive », qui en multipliant les accommodements ne voudrait froisser personne.

Sur Twitter, Patrick Menucci, député PS des Bouches-du-Rhône s’est ainsi félicité « du retrait du texte sur les crèches », estimant que le pays avait d’autres choses à faire « que la chasse (sic) aux femmes qui portent un foulard », ajoutant qu’il ne voterait pas plus le texte le 11 mai prochain qu’en commission.

En un message, voilà peut-être la pensée profonde des responsables socialistes révélée au plus grand nombre : le report de ce texte ne permet pas seulement d’éviter un débat houleux parmi ses membres (ils ont déjà beaucoup à faire avec la fin de vie), il permet aussi de faire dans le plus pur clientélisme électoral, en adressant un message aux Français de confession musulmane à quelques jours du scrutin départemental.

Jean-Louis Bianco, l’inénarrable président de l’Observatoire de la laïcité, un des tenants de cette laïcité « qui ne doit surtout braquer personne », s’oppose lui aussi au texte. D’ailleurs, Nicolas Cadène, le rapporteur de l’Observatoire n’a pas manqué de remercier Patrick Menucci pour sa prise de position : « Nous restons vigilants pour son refus définitif, tant il est inacceptable » clame-t-il sur Twitter en réponse au message de l’élu local.

Dans un entretien accordé le 10 mars à Mediapart, le président de l’Observatoire de la laïcité a en tout cas clairement formulé son opposition au texte : « Une telle loi est dangereuse car elle va à l’encontre du principe de laïcité. La laïcité, c’est la neutralité de l’État, ce n’est pas une neutralité qui s’étend à toute la société, à la sphère privée, fusse pour une crèche. On est en train de dévoyer la laïcité avec en plus la certitude que cette loi sera censurée par le Conseil constitutionnel parce qu’elle est discriminatoire et par la Cour européenne des droits de l’homme car elle induit une limitation excessive de la liberté religieuse ».

L’ancien secrétaire général de l’Elysée sous François Mitterrand ne ménage pas sa peine pour démonter ce texte qu’il considère comme un premier pas « vers une dérive extraordinairement grave de la laïcité », craignant que le débat sur les signes religieux dans les crèches finissent par se poser aussi à l’université, qualifiant au passage de « laïcards » les professeurs qui osent s’opposer au port du voile dans l’enseignement supérieur. D’ailleurs, du côté de l’Observatoire, on considère que Pascale Boistard, la secrétaire d’Etat aux Droits des femmes, qui s’était avancée il y a quelque temps sur l’interdiction du voile à l’université n’y était pas autorisée par l’Elysée...

C’est que du côté de Jean-Louis Bianco on explique avoir l’oreille de François Hollande et l’on n’hésite pas à le faire parler en son absence affirmant que ce dernier a changé d’avis. D’abord favorable à un renforcement de la loi dès lors qu’il y a contact avec les enfants, il affirme désormais que le président estime inutile des lois sur le sujet : « J’ai eu l’occasion d’en rediscuter ce matin avec lui » assure le président de l’Observatoire de la laïcité. [...]"

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