23 février 2008
« La Scientologie sort des clous de la loi »
Arnaud Palisson, ancien lieutenant de police
ARNAUD PALISSON, 40 ans, a quitté la France pour s’installer à Montréal, loin de son ancienne vie de lieutenant de police affecté à la Direction centrale des renseignements généraux. Pendant dix ans, il y avait pour charge d’observer les mouvements sectaires, en particulier la Scientologie, sur laquelle il a rédigé une thèse de droit pénal en 2002. Le début des ennuis : « placardisé » suite à la publication de ses travaux, à son sens sous la pression des avocats de la Scientologie, il a démissionné et s’est installé au Canada où désormais il travaille pour le secteur privé.
Pour ce spécialiste de l’Eglise de scientologie, qui a consulté d’innombrables documents internes, les mots prononcés, puis amendés, par Emmanuelle Mignon [1] tiennent du « n’importe quoi ». « Lorsque Mme Mignon affirme que la liste des sectes de 1995 est scandaleuse, je peux comprendre, tempère d’abord l’ancien RG. Cette liste a été faite en dépit du bon sens sans jamais vraiment définir ce qu’est une secte. » En revanche, Arnaud Palisson s’emporte à la lecture des propos de la conseillère sur la Scientologie. « Cela ajoute de l’eau au moulin de la litanie pro-sectaire que je connais hélas trop bien », déplore-t-il, avant d’avancer « au moins quatre points sur lesquels la Scientologie sort des clous de la loi. »
Exercice illégal de la médecine. « Le processus de purification tel qu’il est proposé aux nouveaux adeptes en est un exemple parfait, mais ce n’est pas le seul », explique Arnaud Palisson. Dans les faits, ces séances imposent chaque jour, pendant quatre ou cinq semaines, du sport, essentiellement de la course à pied, suivie de plusieurs heures de sauna, assaisonnées de cocktails de vitamines. Les scientologues établissent un « diagnostic » puis un « traitement de désintoxication », des termes médicaux, abusifs. Une ancienne adepte explique avoir payé 1 500 € pour sa purification.
Escroquerie. « La Scientologie met en place des stratégies, des scénarios, des mises en scène et des manoeuvres frauduleuses pour forcer à l’achat des packs d’audition dianétique, explique Arnaud Palisson. Tout un processus est clairement mis en place et répond point par point à la définition de l’escroquerie. C’est d’ailleurs rare de voir une escroquerie aussi bien montée ! »
Fraude au droit de la consommation. Pour le juriste, c’est un corollaire de l’escroquerie. Dans le « pack dianétique », on utilise un électromètre, engin « pseudo-scientifique » censé établir un bilan d’émotivité, sur lequel les auditeurs du futur scientologue se fonderont. « Mais quelles que soient les réponses données par la future recrue, l’engin réagira de la même façon. »
Arrestation et séquestration arbitraire. « Au sein même des textes de la Scientologie, la méthode de la séquestration est totalement admise aussi longtemps que la situation ne sera pas réglée, poursuit Arnaud Palisson. Cela s’appelle « réhabiliter » un adepte un peu divergent, dans le cadre d’un Rehabilitation Project Force. Du lavage de cerveau dans le cadre d’un enfermement forcé. Il n’existe pas de centre de ce type en France, mais plusieurs au Danemark et aux Etats-Unis. Les méthodes sont absolument illégales. Une adepte y a trouvé la mort. »
A.-C.J.
[1] Lire Péchés Mignon (note du CLR).
Comité Laïcité République
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