par Patrick Kessel, cofondateur et président d’honneur du Comité Laïcité République, ancien Grand Maître du Grand Orient de France. 10 février 2013
Patrick Kessel, Ils ont volé la laïcité, éd. éd. Gawsewitch-Balland, 2012, 224 p., 18,90 e.
"La laïcité que nous aimons ne saurait être instrumentalisée par des apprentis sorciers. Non seulement elle n’est pas une arme contre les musulmans, mais elle constitue l’outil d’intégration pour ceux venus d’ailleurs, d’épanouissement pour ceux nés sur la terre de la République, d’épanouissement et de fraternité pour tous.
Cela rappelé avec force, au nom de quoi serait-il juste de dénoncer les pressions de l’église romaine, des églises évangéliques, des intégristes juifs et politiquement incorrect de critiquer les méfaits de l’islamisme ? La République reconnaît aux musulmans les mêmes droits et leur confère les mêmes devoirs qu’à tous les autres citoyens. Ses principes n’ont pas à être accommodés, encore moins négociés, avec telle ou telle communauté. La laïcité n’a pas à rougir de s’appliquer à tous de la même façon. C’est sa fierté de traiter tous ses enfants en égaux. Et il y a beaucoup à faire pour que l’éthique républicaine se traduise concrètement au plan social. Mais il ne doit y avoir aucune culpabilité à faire en sorte que ses principes se conjuguent réellement dans la vie quotidienne, de l’école à la rue, des services publics aux entreprises privées, du collectif à chacun d’entre nous. Tel n’est pas le cas, chacun le sait mais n’ose trop le dire de peur d’être associé aux racistes. Il est pourtant indispensable de mettre un terme aux dérogations à la loi commune, au communautarisme qui fait des ravages en particulier dans ce qu’il est convenu d’appeler les « territoires perdus de la République ».
Parole à nouveau à l’accusation.
La laïcité serait un tropisme colonial, selon d’autres de ses détracteurs. Elle s’en prendrait, selon eux, aux communautés, à leurs traditions, à leur identité en prônant un universalisme des Lumières « totalitaire » selon certains. L’humanisme dont elle se réclame ne serait qu’un faux nez. Elle serait en réalité au service d’une domination coloniale raciste.
Qu’on en juge : la laïcité fait sienne le principe selon lequel toutes les femmes et tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit. Quelles que soient leurs origines, leur couleur, leur sexe, leurs appartenances religieuses, philosophiques, culturelles. Elle n’est ni blanche, ni noire, ni jaune, ni rouge, ni de quelque couleur de peau ou d’opinion. Elle est universelle.
Elle est le lien entre être libres et égaux. En cela, elle est l’autre nom de la Fraternité. C’est bien pourquoi elle a pris place dans le préambule de la
Constitution.
Les fondements de la laïcité tiennent en peu de textes juridiques. En dehors du préambule de la Constitution [1], elle repose sur la loi de 1905, dite de séparation des Églises. Ses principes sont définis principalement dans ses deux premiers articles [2]. Loin d’être à l’image de ce reflet monstrueux que renvoie le miroir déformant de ses pourfendeurs contemporains, elle est le fruit d’un véritable compromis qui garantit la paix sociale depuis plus d’un siècle. C’est cet équilibre fragile que contestent les partisans d’une modernisation de la laïcité et d’un toilettage de la loi. C’est cette séparation que l’Église n’a jamais véritablement acceptée et tente de reconquérir au coup par coup, étape par étape. Et que, complices dans ce mauvais coup, contestent également la montée des communautarismes et la logique de l’ultralibéralisme."
[1] « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. » Constitution de 1958, article premier.
[2] « La République ne reconnaît, ni ne subventionne aucun culte ». « Elle garantit la liberté de conscience et la liberté religieuse ».
Voir le dossier Ils ont volé la laïcité, par Patrick Kessel (Gawsewitch-Balland, 2012) (note du CLR).
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