8 mars 2010
Lire "La Halde a réussi à s’imposer comme vigie de la lutte antidiscriminations".
"La haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde) a incontestablement trouvé sa place : depuis sa création, en 2004, le nombre de réclamations enregistrées augmente de façon significative, atteignant 10 000 requêtes déposées en 2009. Mais la Halde a surtout contribué à faire évoluer la jurisprudence et les pratiques en matière de discriminations, intervenant auprès des tribunaux, des entreprises et des pouvoirs publics. "Beaucoup a été fait mais beaucoup plus reste à faire", insiste Louis Schweitzer – par ailleurs, président du conseil de surveillance du Monde –, qui achève lundi 8 mars son mandat de président de la Halde.
Même si elle ne crée pas directement de jurisprudence, la Haute Autorité influence les décisions des magistrats, qu’il s’agisse de procédures pénales, administratives ou civiles. Son statut lui donne des pouvoirs d’investigation sur les dossiers, mais aussi la possibilité de déposer ses conclusions devant les tribunaux. "Dans 80 % des cas où elle accompagne une personne devant les tribunaux, ses observations connaissent une suite favorable", souligne Jean-Yves Montfort, conseiller à la Cour de cassation et membre du collège de la Haute Autorité.
Les avancées de jurisprudence obtenues, à travers plus de 150 décisions favorables, touchent des domaines extrêmement variés. Les Allocations familiales subordonnées à l’obligation, pour un enfant étranger, d’être en situation régulière ? Plusieurs cours d’appel ont repris l’argumentaire de la Halde jugeant le code de la Sécurité sociale contraire aux traités signés par la France. Le refus d’accès aux crèches pour des enfants allergiques ? La cour administrative d’appel de Marseille a suivi les observations de l’Autorité en estimant que cette exclusion créait une discrimination. Le refus de recrutement d’un technicien à cause de ses origines ? Après enquête, la Halde a pu démontrer l’existence de discriminations raciales et a obtenu le versement de dommages et intérêts.
Signe de son efficacité, l’instance est devenue une clé de l’intervention syndicale. Au dernier congrès de la CGT, elle tenait d’ailleurs un stand. "Pouvoir s’appuyer sur la Halde confère un autre poids à l’action syndicale", relève Bernard Thibault, son secrétaire général. "Nous arrivons à faire bouger des situations en entreprises en menaçant de la saisir. Les employeurs tiennent le même discours vis-à-vis de la Halde qu’à l’égard de l’inspection du travail."
En parallèle de ses interventions devant les juges, la Halde a multiplié les recommandations auprès d’entreprises, d’administrations, de bailleurs, de collectivités locales. Ces interventions, qui n’ont pas de conséquences juridiques, touchent des domaines très variés. Un maire qui interdit par arrêté les voyantes dans les rues de sa commune ? La Halde le rappelle à l’ordre en jugeant la mesure discriminatoire. Un concours administratif dans la police qui exclut un candidat au motif qu’il présente un risque de congé médical longue durée ? La Halde recommande au ministère de l’intérieur de modifier cette règle, ce qui a été fait quelques mois plus tard.
Mais la marge de manœuvre de la Halde dépend aussi de la bonne volonté du pouvoir politique. Notamment lorsqu’il s’agit de mesures décidées par le gouvernement. Comme fin 2007, où la Haute Autorité avait officiellement regretté de ne pas avoir été consultée par le gouvernement à propos d’un projet de loi sur l’immigration. Une fois le texte adopté, elle avait mis en avant – sans effet – le caractère discriminatoire d’une partie de la loi.
Mêmes difficultés en ce qui concerne les gens du voyage : après avoir rendu plusieurs délibérations, notamment sur la scolarisation des enfants, la Halde a publié, en 2009, un "rapport spécial" pour protester contre l’absence de suivi de ses préconisations."
Comité Laïcité République
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