Revue de presse

"L’intégration à l’épreuve de l’islam" (E. Conan, marianne.net , 10 nov. 13)

A propos de "Assimilation : la fin du modèle français", de Michèle Tribalat (Toucan). 11 novembre 2013

"La dernière grande enquête sur l’immigration de l’Ined et de l’Insee présentée par la démographe Michèle Tribalat révèle la crise du modèle français de métissage.

C’est le livre que doivent lire ceux qui dissertent au doigt mouillé sur l’identité, le communautarisme et l’islamophobie, parce que la précision des faits leur importe d’autant moins qu’ils cherchent d’abord les postures morales.

Michèle Tribalat explique son étrange destin de démographe de l’immigration à l’Institut national d’études démographiques (Ined) en lutte contre la volonté de ne pas savoir de son employeur. Elle fut pourtant la coordinatrice de la grande enquête de l’Ined de 1992 (sur, notamment, les enfants nés en France de 1963 à 1972 de parents immigrés d’Algérie), régulièrement citée pour affirmer que la France est la championne des mariages mixtes. Qu’en est-il depuis ?

Il a fallu attendre 2008 pour qu’une nouvelle enquête de l’Insee et de l’Ined - « Trajectoires et origines » (TEO) - soit conduite. Ses commanditaires rechignant à livrer tous ses résultats, le livre de Tribalat constitue la première synthèse de ce travail statistique d’envergure incluant la religion. Ses conclusions expliquent peut-être cette timidité : elles révèlent une mutation sociologique massive depuis 1992, invalidant les lieux communs sur l’intégration.

Des paramètres essentiels se sont inversés. La sécularisation (l’émancipation des préceptes religieux) qui gagnait à grande vitesse la société française - immigrés musulmans compris - a laissé place depuis les années 80 à une forte réislamisation. Le taux de transmission de l’islam dans les foyers musulmans pour les enfants nés autour de 1960 était de 43 % ; il s’élève à plus de 80 % chez ceux nés dans les années 80. D’où un effet de ciseaux inédit, la sécularisation s’accélérant chez les Français de culture catholique, mais régressant chez les Français de culture musulmane : les plus fervents des catholiques sont vieux et minoritaires ; les plus fervents des musulmans, jeunes et majoritaires. Aucune vague immigrée antérieure n’avait connu une telle désécularisation qu’accentue mais n’explique pas le contexte social.

Le voile et la forte progression des interdits alimentaires dans tous les milieux en sont les aspects visibles. Mais la démographe s’intéresse plutôt aux effets de cette réislamisation sur les alliances matrimoniales entre accueillants et accueillis, rouage essentiel de l’assimilation. Or, le facteur religieux, plus que l’origine, s’oppose au métissage, l’islam proscrivant l’alliance avec des non-musulmans. D’où un renfermement endogamique brutal : alors que 25 % des filles et près de 50 % des garçons d’origine algérienne vivaient avec un autochtone en 1992, 90 % des musulmans élevés en France épousent aujourd’hui un conjoint musulman, qu’ils vont parfois chercher hors de France, ce qui n’est pas sans effet sur le rythme de l’immigration.

Michèle Tribalat estime qu’il faut sortir de l’hypocrisie et dire si l’on abandonne le système d’assimilation, moribond, au profit du multiculturalisme qui s’installe. La législation sur la nationalité parle encore d’assimilation, le site du ministère de l’Intérieur s’inspire du multiculturalisme de l’Union européenne, imposé en douce sans débat démocratique, et Manuel Valls vient de créer des « commissions citoyennes d’assimilation » dans toutes les préfectures..."

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