11 octobre 2012
""Capitaine Crochet" ne haranguera plus les foules. Dans la nuit de vendredi 5 à samedi 6 octobre, le prédicateur islamiste Abou Hamza a quitté la base militaire de Mildenhall (est du Royaume-Uni) en direction des Etats-Unis. Après huit années de bataille judiciaire pour éviter l’extradition, le prédicateur, qui porte des crochets à la place des mains, a vu échouer son ultime recours devant la Haute Cour de justice britannique, qui a confirmé son expulsion ainsi que celle de quatre autres présumés terroristes, aussitôt remis aux autorités américaines.
Son expulsion symbolise la fin de ce qui était surnommé le "Londonistan", et dont Abou Hamza était le visage le plus connu. Dans les années 1990 et jusqu’au début des années 2000, le Royaume-Uni a accueilli sur son sol de nombreux militants islamistes, au nom de la liberté d’expression mais aussi comme arme de politique étrangère, les radicaux étant également des opposants aux dictatures du monde arabe.
Cette tolérance extrême est finie. "Les autorités britanniques, qui non seulement fermaient les yeux mais encourageaient ces groupes, ont complètement inversé leur politique", affirme Maajid Nawaz, le président de Quilliam, une association musulmane combattant les islamistes. Lui-même sait de quoi il parle : il est un ancien dirigeant de Hezb ut-Tahrir, un groupe radical très controversé. Il a passé quatre années en prison en Egypte, avant de renoncer à cette idéologie. [...]
Le vrai tournant a été les attentats du 7 juillet 2005, qui ont fait 52 morts dans le métro de Londres. Le réveil a été brutal, particulièrement pour les forces de l’ordre. Jusqu’alors, l’une des justifications de la politique du Londonistan était que cela permettait de mieux surveiller les groupes islamistes. L’attaque est venue prouver que c’était une erreur.
La réaction a été double. Le MI5 – les services secrets intérieurs – a beaucoup renforcé ses effectifs, recrutant notamment des jeunes Britanniques d’origine étrangère. Plusieurs complots ont été déjoués, en particulier celui des bombes liquides, en 2006, à l’origine de l’interdiction d’embarquer avec de l’eau dans les avions.
D’autre part, sous la houlette de Tony Blair, la politique de tolérance a été stoppée. De nouvelles lois ont été introduites, condamnant explicitement la glorification du terrorisme. Mais l’ancien premier ministre britannique, avec sa rhétorique sur la "guerre contre la terreur" et le "clash des civilisations", mettait de l’huile sur le feu.
C’est terminé depuis son départ du pouvoir en 2007. En partie parce que ses successeurs, Gordon Brown et David Cameron, ont évité ce genre de propos, mais aussi parce que le contexte a changé : la crise économique est devenue la priorité, et les problèmes de sécurité sont passés au second plan.
"Le cercle vicieux provoqué par le discours politique a été brisé", se félicite Tahir Abbas, l’auteur d’un livre sur la radicalisation des musulmans britanniques, Islamic Radicalism and Multicultural Politics, The British Experience (Routledge).
Mais, si leur existence n’est plus acceptée, les courants radicaux n’ont pas tous disparu. Anjem Choudary est un homme affable, qui aime le café au lait très sucré et les pâtisseries. Mais ses propos font froid dans le dos. "Al-Qaida est un groupe de résistance noble", lance-t-il calmement dans un petit café de Walthamstow, un quartier du nord-est de Londres. Les attentats au nom de l’islam sont-ils justifiables ? "Il faut comprendre que nous sommes en guerre. La guerre n’est pas belle." Ce genre de propos lui a valu une interdiction de territoire en France, en Belgique et en Inde."
Comité Laïcité République
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