21 février 2013
"En Alsace-Moselle, Bonaparte l’emporte sur Aristide Briand. Le Conseil constitutionnel a débouté jeudi l’Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité, qui réclamait l’application, dans le Haut-Rhin, le Bas-Rhin et la Moselle, de la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État. Lorsque la loi de 1905, due en particulier à Aristide Briand, a été promulguée, l’Alsace-Moselle faisait partie de l’Allemagne. Après la Première Guerre mondiale, ces trois départements sont redevenus français. Mais la loi de 1905 n’a pas été étendue à l’Alsace-Moselle en raison de l’attachement des Alsaciens et des Mosellans au concordat de 1801, toujours en vigueur chez eux. C’est cette exception à la « laïcité à la française » que les Sages viennent de conforter.
Dans sa décision rendue jeudi, le Conseil constitutionnel a jugé que le maintien du concordat dans ces trois départements était une tradition républicaine observée par tous les gouvernements depuis 1919. La Constitution de la Ve République n’a pas « entendu remettre en cause les dispositions législatives ou réglementaires particulières applicables dans plusieurs parties du territoire de la République lors de l’entrée en vigueur de la Constitution et relatives à l’organisation de certains cultes », argumentent les Sages.
Le Conseil constitutionnel a ainsi accordé sa bénédiction à « la convention passée à Paris le 26 messidor an IX, entre le pape et le gouvernement français, et dont les ratifications ont été échangées à Paris le 23 fructidor an IX ». Il a également entériné « la loi du 18 germinal an X relative à l’organisation des cultes » ainsi que les autres lois qui constituent le concordat. Nul doute qu’on va ouvrir le champagne à Strasbourg, à Mulhouse ou à Metz.
Pour autant, dans sa décision rendue jeudi, le Conseil constitutionnel précise que la loi de 1905 a bel et bien une valeur constitutionnelle. Le cas de l’Alsace-Moselle n’est qu’une exception à cette règle. Partout ailleurs en France, la séparation des Églises et de l’État est un principe qui s’impose au législateur. Le Parlement ne pourrait donc pas déroger à la loi de 1905 sans risquer une censure du Conseil constitutionnel. [...]
Pour autant, « le principe de laïcité impose notamment le respect de toutes les croyances, l’égalité de tous les citoyens devant la loi sans distinction de religion ». Enfin, la République garantit « le libre exercice des cultes », même si l’État « ne salarie aucun culte ».
En somme, les Sages ont repris mot pour mot la loi de 1905 en lui accordant une valeur constitutionnelle. L’article 1 de la loi du 9 décembre 1905 proclame en effet que « la République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes, sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public ». Et l’article 2 de la loi ajoute aussitôt la phrase célèbre : « La République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte. »
La décision des juges du Palais-Royal pourrait rendre sans objet l’engagement, pris par François Hollande pendant sa campagne, d’inscrire la loi de 1905 dans la Constitution, avec une dérogation pour l’Alsace-Moselle."
Comité Laïcité République
Maison des associations, 54 rue Pigalle, 75009 Paris
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