Jean-Philippe Hubsch, grand maître du Grand Orient de France. 16 janvier 2021
[Les éléments de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]
"Le Grand Orient de France, dont le grand maitre doit changer ce samedi, dénonce la place prise par les experts durant la crise.
Par Jean-Marie Guénois
Jean-Philippe Hubsch, grand maître du Grand Orient de France, arrive samedi au terme de son mandat. Lors du convent national virtuel de décembre, qui portait notamment sur la finalisation d’un livre blanc post-épidémie, son rapport d’activité a été voté à 81%. Le nom de son successeur devrait être connu dans la soirée de samedi après la procédure d’élection.
LE FIGARO.- Le Grand Orient de France publie un livre blanc, intitulé Après, pour tirer les leçons de la crise pandémique, quel est votre message essentiel ?
Jean-Philippe HUBSCH.- Ce qui ressort le plus est le besoin d’être attentif aux autres et de développer des actions de solidarité. Finalement, le message est plutôt optimiste, les francs-maçons ont tiré des conclusions positives de cette épreuve afin que le pays et les citoyens en sortent plus forts, dans un monde meilleur et plus éclairé.
L’avenir immédiat ne vous inquiète pas ?
Ce qui est inquiétant, c’est l’asphyxie du pays, qui s’est recroquevillé sur lui-même, c’est le coup d’arrêt aux relations sociales, culturelles, familiales, c’est aussi une façon différente de travailler, avec beaucoup moins d’interactions humaines. Il faut être particulièrement vigilant car de nombreux hommes et femmes souffrent de cette forme d’isolement, et il faudra les accompagner socialement et financièrement, mais aussi moralement, car il ne faut pas négliger les conséquences de cette crise sur la santé de nos concitoyens.
Votre livre blanc questionne sur la part prise par les « experts » pendant cette crise sur l’exercice direct du pouvoir politique : est-ce une dérive de la démocratie ?
On ne peut pas reprocher à des gouvernants de s’appuyer sur des experts, quel que soit le sujet technique concerné. Ici, nous avons affaire à des experts médicaux, et ce qui choque le plus, c’est la cacophonie qui en ressort. Mais de tous ces experts qui s’expriment dans les médias et qui semblent d’ailleurs plus présents à l’antenne que dans leurs services hospitaliers, qui sont ceux qui conseillent les pouvoirs publics ? Sont-ce ceux qui s’expriment le plus, ou ceux qui s’expriment le plus sont-ils ceux qui cherchent essentiellement à exister ? Nous sommes noyés d’informations, souvent contradictoires, qui vont brouiller le message des pouvoirs publics. Ce qui ressort, c’est que cette crise sanitaire comporte encore de très nombreuses inconnues. Alors parfois, il serait préférable pour tous ces sachants savants de ne rien dire plutôt que de partir dans des digressions techniques qui finissent par s’avérer erronées.
Vous avez été consulté par le gouvernement sur le projet de loi contre le « séparatisme » comment le percevez-vous ?
Nous saluons les mesures visant à généraliser l’obligation de neutralité laïque à tous les salariés en charge d’un service public ; la généralisation des prescriptions de la loi de 1905 à toutes les associations à but cultuel, quel que soit leur statut, et le renforcement des contrôles sur leur fonctionnement et leurs ressources ; le renforcement des contrôles sur les enseignements prodigués en dehors de l’école publique ; la lutte contre la haine en ligne, devant permettre de renforcer les droits à la libre expression des personnes ; la lutte contre les comportements communautaires, notamment sexistes, contraires aux lois de la République. Mais nous estimons que la reprise d’une disposition visant à permettre aux associations cultuelles d’exploiter leurs biens immobiliers reçus à titre gratuit est de nature à rompre l’équilibre financier qui avait été mis en place par la loi de 1905, si elle n’est pas assortie de conditionnalités.
Une partie des musulmans, et pas seulement les tenants de l’islamisme, s’accommode difficilement de la laïcité comme le démontrent les sondages auprès de jeunes musulmans et les heurts avec les professeurs quand ces sujets sont abordés…
C’est un vrai problème au sein de la société française. Il y a parmi cette jeunesse un mouvement de refus des valeurs et principes de la République. C’est un problème d’éducation et pas seulement au sein de l’école. La dégradation du rapport entre les enseignants et certains élèves de ces quartiers n’a fait que s’accentuer, sans réelle prise en compte par les pouvoirs publics. Aujourd’hui, nous arrivons à une « archipellisation » du territoire, comme Jérôme Fourquet l’a très bien analysé. Le gouvernement actuel s’est prononcé très clairement sur ce sujet et de nombreuses mesures ont été prises. Est-ce trop tard ? Oui et non. Certaines générations sont peut-être perdues et il faudra les surveiller. Pour le reste, je crois dans la puissance d’intégration de l’école publique, si les moyens nécessaires lui sont donnés et si les enseignants se sentent soutenus. La France ne doit pas céder aux pressions religieuses, surtout quand elles viennent de l’étranger, et il faut lutter contre toute velléité de communautarisme au sein de la République."
Lire "Jean-Philippe Hubsch : « Les francs-maçons tirent des conclusions positives de cette épreuve »".
Voir aussi dans la Revue de presse "Séparatisme, les Francs-maçons veulent renforcer la neutralité des services publics" (la-croix.com , 5 jan. 21) dans la rubrique Loi "Principes de la République" (2020-21) ; le communiqué du Comité Laïcité République "Séparatisme" : plusieurs propositions du président vont dans le bon sens (CLR, 2 oct. 20) (note du CLR).
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