1er mars 2009
"L’ esclavage n’est pas seulement le spectre surgi du passé pour hanter les conflits sociaux des Antilles françaises. Il existe toujours. Selon une étude des Nations-Unies, 27 millions d’êtres humains dont 20 % d’enfants sont actuellement réduits en esclavage. Le terme est précis. Il ne s’agit pas des travailleurs surexploités dans les pays émergents, ni des migrants privés des droits élémentaires par les trafiquants de main-d’œuvre. Il y a bien 27 millions d’esclaves, donc des hommes, des femmes, des enfants, privés de liberté, vendus comme des marchandises et travaillant sous contrainte.
Selon cette étude de l’ONU, la pratique de l’esclavage demeure impunie, souvent même tolérée en Indonésie, au Pakistan, au Bangladesh, au Niger et en Mauritanie. Ces pays d’Asie ou d’Afrique ont en commun d’être à majorité de religion musulmane. En Mauritanie, le temps semble s’être arrêté, les esclaves noirs appartiennent à des maîtres arabes et touaregs. On dira que la Mauritanie n’est qu’un pays arriéré et ruiné par la sécheresse. Au Pakistan, pays moderne doté de l’arme nucléaire, les lois coutumières demeurent en de vastes zones où l’on pratique la traite d’êtres humains. Ces régions sont contrôlées par des combattants islamistes porteurs de revendications hautement progressistes, par exemple l’interdiction de l’enseignement aux filles. L’étude de l’ONU sur l’esclavage contemporain passerait inaperçue si le Monde ne lui avait consacré une pleine page enrichie de témoignages et de reportages. Certes, la persistance de l’esclavage n’est pas une révélation. « Tout le monde sait ça. » Tout le monde, certes non, mais les milieux réputés bien informés qui ne jugent pas toujours utile de diffuser l’information. Au moins la connaissance est-elle parvenue aux lecteurs de l’excellent ouvrage de Malek Chebel, l’Esclavage en terre d’islam. Nous ne cessons pourtant de lire et d’entendre que la religion des émirs pétroliers exprime les aspirations des peuples pauvres. L’idée semble par exemple assez répandue dans les mouvances extrêmement à gauche, celles qui débattent avec les théologiens islamistes dans les forums sociaux. L’esclavage, pour ces bons esprits, renvoie à la culpabilité de la France, qui en interdit la pratique depuis 1848. Pour avoir été colonialistes, les Occidentaux porteraient la responsabilité de tous les malheurs des anciens colonisés. Mais l’esclavage est de retour en des pays, comme le Niger et la Mauritanie, où il avait été aboli et réprimé par le colonisateur français.
Les chiffres onusiens montrent une progression de l’esclavage et de la traite. Cette réalité renvoie dos à dos deux croyances antagoniques : d’aucuns imaginent encore que l’indépendance des peuples est toujours une libération. Pourtant, l’esclavage est pratiqué en des pays indépendants. D’autres se persuadent des effets bénéfiques de la mondialisation qui, par le développement des échanges, permettrait à des pays pauvres d’émerger enfin. Or, en dépit de toutes les organisations mondiales, les produits fabriqués par les esclaves se retrouvent sur les marchés civilisés. Il y a tant de marchandises qui circulent, tant de formes de sous-traitance que le contrôle de l’origine d’un produit devient impossible.
Les belles idées ne sont décidément pas fiables. Les peuples indépendants, libres de pratiquer leur propre religion, sont parfaitement capables de faire leur malheur eux-mêmes. Ils le font en profitant du progrès apporté par le marché mondial."
Comité Laïcité République
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