15 juillet 2021
[Les éléments de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]
"Confusion, renoncements : dans un rapport à Blanquer, Jean-Pierre Obin pointe les lacunes de leur formation.
Par Caroline Beyer
« Les valeurs de la République ne sont pas aujourd’hui, dans les textes comme dans les pratiques, une thématique de recrutement de nos cadres », pose sans complaisance Jean-Pierre Obin, dans un rapport sur la formation du personnel de l’Éducation nationale à la laïcité, rendu au ministre de l’Éducation et publié ce lundi.
C’est en février, trois mois et demi après l’assassinat de Samuel Paty, que Jean-Michel Blanquer avait confié à cet ancien inspecteur, bien connu pour ses positions laïques, la mission de proposer un plan ambitieux de formation des professeurs. Sa mise en œuvre commencera, comme l’a déjà annoncé le ministre, dès septembre 2021.
Bilan inquiétant
« Beaucoup de confusion autour de la compréhension du principe laïc », l’idée chez « beaucoup d’élèves » d’une « laïcité coercitive voire punitive, conçue pour brider l’expression des religions », l’autocensure des professeurs « pour éviter des incidents », « la retenue, pour employer un registre euphémique » des personnels d’encadrement, « un désarroi le plus souvent feutré » des enseignants, le « pas de vagues »… Ce document de 19 pages dresse un inquiétant bilan de l’état d’esprit régnant, à l’école, autour des principes laïques.
Quelles sont les valeurs de la République ? Les réponses données par les membres du personnel, du directeur d’école au référent laïcité académique en passant par le professeur sont diverses. « A minima, on cite la laïcité et la devise républicaine. Au-delà, on hésite », constate le rapport. Si « la dignité humaine » et « l’universalisme » sont trop peu présents, la « lutte contre les discriminations », qui fait parfois « le jeu de l’idéologie victimaire », et la « diversité » sont fréquemment citées.
« Il y a comme un fond de culpabilité masochiste » à aborder la République par le biais de ses « manquements », plutôt que par celui de ses « idéaux », assène Jean-Pierre Obin. L’inspecteur pointe notamment des sites internet d’académies, d’instituts de formation des professeurs (Inspé) et même de l’administration centrale, où promotion est faite d’une « nouvelle laïcité concordataire », invitant à faire un « compromis » avec l’Islam, ou encore d’« égéries de la mouvance décoloniale ».
« Dérives idéologiques »
Quid de la formation des professeurs ? Insuffisante à ce jour, et loin d’être systématique, constate le rapport. À l’école primaire, où les atteintes aux valeurs républicaines sont croissantes et viennent largement des parents, seul 1 enseignant sur 100 a suivi une formation. Dans le second degré, ils sont un peu plus nombreux (4 %). Les professeurs contractuels, eux, n’ont aucune formation obligatoire, alors même qu’ils alimentent de plus en plus les rangs de l’Éducation nationale. La faute aux lourdeurs structurelles du mammouth, où œuvrent 1,6 million de personnes. Mais pas seulement, si l’on en croit ce rapport.
Si une nouvelle épreuve orale est prévue, dans le concours de recrutement des enseignants, pour évaluer l’appropriation des valeurs de la République, l’autonomie des universités - qui régissent ces concours - est de ce point de vue un « risque », estime Jean-Pierre Obin. L’inspecteur pointe « les dérives idéologiques » qui affectent « certains départements universitaires de sciences humaines ». Alors que les débats autour de l’islamo-gauchisme ont fait rage cette année, il décrit des « cours ou des mémoires infligés aux étudiants sur la “déconstruction” du discours officiel sur la laïcité, prétendant mettre à jour le “racisme systématique” d’un État “postcolonial” et islamophobe ».
On connaît les positions affirmées de Jean-Pierre Obin sur le sujet. Elles rencontrent précisément celles du ministre de l’Éducation. Dès la rentrée prochaine, ce dernier s’engage à mettre en œuvre un plan de formation qui privilégiera des interventions rassemblant l’ensemble du personnel de chaque école, collège et lycée. Pour ce faire, quelque 1000 formateurs seront formés au niveau national."
Lire "Formation insuffisante, autocensure : la laïcité, matière faible chez les profs".
Comité Laïcité République
Maison des associations, 54 rue Pigalle, 75009 Paris
Voir les mentions légales