Fadela Amara : “Le voile et la burqa, c’est la même chose” (Le Parisien, 16 juil. 08)

18 juillet 2008

"PRÉSIDENTE, jusqu’à son arrivée au gouvernement en juin 2007, du mouvement Ni putes ni soumises, Fadela Amara, féministe « laïcarde » et « ennemie » des extrémistes musulmans, s’est toujours prononcée contre le port du voile, « négation de l’égalité des sexes » et, a fortiori, de la burqa.

Que pensez-vous de la décision du Conseil d’Etat ?

Fadela Amara. Elle est excellente, légitime, particulièrement crédible parce qu’elle se fonde sur les valeurs de notre République. En 1989, quand le Conseil d’Etat affirmait que le port du voile à l’école était compatible avec la laïcité, cela n’avait pas été le cas. Son avis avait permis aux intégristes religieux de gagner du terrain. Aujourd’hui, son arrêt est un couperet républicain qui rétablit complètement la situation. C’est un vrai tremplin pour l’émancipation et la liberté des femmes.

La justice va-t-elle être amenée à se prononcer de plus en plus sur des affaires touchant aux questions religieuses ?

On est entré dans une phase de clarification. Les courants intégristes qui passent par la fenêtre quand on leur ferme la porte obligent à des mises au point. On est en train de réaffirmer le principe de l’égalité des sexes. C’est mieux qu’un avertissement. La République, quand elle est sommée de répondre, prend des positions fermes sur ses valeurs. Elle dit enfin : « Ce n’est pas négociable ! »

Faut-il, comme le propose le député (UMP) Jacques Myard, une loi prohibant la burqa ?

Non, l’arsenal juridique actuel suffit largement. Ce n’est pas la peine d’en rajouter. Il faut juste respecter les textes en vigueur.

Que représente pour vous la burqa ?

J’appelle celles qui la portent « les corbeaux noirs ». Au Maghreb, les féministes les surnomment « les ninjas » en référence aux policiers algériens encagoulés qui luttent contre les terroristes. Il faut combattre cette pratique obscurantiste qui met en danger l’égalité hommes-femmes. La burqa, c’est une prison, une camisole de force, ce n’est pas un signe religieux mais le signe visible d’un projet politique totalitariste prônant l’inégalité des sexes et qui porte en soi l’absence totale de démocratie. C’est une castration de libertés. Il y a aussi des mecs qui « kiffent » des filles avec la burqa, c’est donc parfois de l’ordre du fantasme sexuel. Son usage n’est pas seulement lié à la question de l’exclusion sociale. Il y a des « femmes de », dans les beaux quartiers, qui ont également totalement recouvert leur visage.

Que faire pour endiguer le phénomène ?

Je pense que la décision du Conseil d’Etat peut dissuader certains fanatiques d’imposer la burqa à leur épouse. C’est aussi un outil à la disposition des femmes pour résister, pour se défendre. Il ne faut pas sous-estimer l’impact d’une décision de justice ou d’une loi. Grâce à la loi de 2004 sur la laïcité interdisant les signes religieux à l’école, on a sauvé des centaines de filles ! Il est important aussi de travailler sur le fond, faire en sorte que, dans les quartiers, nos enfants ne tombent pas dans l’intégrisme. L’éducation, comme l’enseignement de l’histoire des religions à l’école, est essentielle.

Faites-vous la différence entre le voile et la burqa ?

Tout est question de centimètres de tissus. Mais pour moi, c’est la même chose. Je ne suis pas favorable au port du voile, qui n’est pas un signe religieux mais, comme la burqa, un signe d’oppression des femmes. Je ne parle pas de nos mères mais des filles qui sont nées en France.

Que souhaitez-vous dire à cette Marocaine qui s’est vu refuser la nationalité française ?

Qu’elle redevienne ce qu’elle était au Maroc, avant d’arriver en France, quand elle ne portait ni le voile ni la burqa. L’amour rend aveugle. Elle a sûrement cédé en tombant sous le charme d’un islamiste. Je pense que c’est une victime."

Lire “Le voile et la burqa, c’est la même chose”.


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