Communiqué du CLR

Enseignement du fait religieux : danger pour la Laïcité (15 mai 03)

juillet 2003

M. le ministre de l’Education Nationale, Luc Ferry, dans sa « Lettre à tous ceux qui aiment l’école », dit qu’ « il faut rappeler clairement les principes qui doivent animer la vie commune dans nos établissements, à commencer par le premier d’entre eux, celui qui unit la laïcité à la tradition républicaine des droits de l’homme » (p.54).

Le Comité Laïcité République affirme que l’enseignement du fait religieux dans l’école publique, préconisé et défini par le rapport Debray, constitue une étape supplémentaire dans le processus de destruction de la laïcité telle qu’elle est inscrite dans la Constitution et définie par la Loi de 1905 et va donc à l’encontre des propos du ministre.

I-Etat des lieux.

Inquiet du déficit culturel constaté chez les jeunes en matière de culture religieuse, le rapport, soucieux d’offrir aux élèves les clefs nécessaires à la compréhension d’un monde entièrement conditionné par son passé religieux, préconise l’enseignement du fait religieux dans un cadre interdisciplinaire.

Cette motivation avouée dissimule un autre objectif plus officieux : offrir, au sein de l’école, un champ d’expression à l’Islam pour préserver les banlieues des violences et des intégrismes. C’est en effet ce que confirmait l’auteur lui-même, qui participait le 4 février 2003 à une journée de débat organisée par l’Association pour la recherche en anthropologie sociale, à Paris. Un enseignant interroge le philosophe : « Y-a-t-il un objectif politique derrière cet intérêt pour l’enseignement du « fait religieux ? Si l’on veut utiliser les enseignants pour calmer les élèves musulmans des banlieues, il faut au moins nous le dire clairement et que nous sachions si nous en sommes d’accord ». Régis Debray répond : « Mais bien sûr, c’est bien de cela qu’il s’agit ».

Les déclarations vertueuses sur le respect de la laïcité n’ont guère empêché à ce jour les dérives prévisibles : l’intervention de représentants religieux es-qualité dans les colloques et les stages de formation des élèves-enseignants, préludant à leur irruption dans l’école. C’est ce que Régis Debray et le Ministère ont eux-même reconnu après le « faux-pas » de l’IUFM de Clermont-Ferrand.

Que faut-il craindre lorsque Luc Ferry annonce que l’Académie-pilote pour l’application de l’enseignement du fait religieux sera celle de Strasbourg, comme par hasard située en terre concordataire ?

Le flou qui entoure le fait religieux risque tout au plus de provoquer les conflits qu’on voulait prévenir.

II-Le déficit culturel.

Si le déficit culturel est une inquiétude légitime des enseignants, on comprend mal pourquoi le seul aspect religieux, pire ! le seul cas des trois monothéismes devrait avoir un caractère d’urgence exclusif.

Le déficit culturel est autrement plus vaste et couvre tant l’histoire des luttes sociales et révolutionnaires qui ont fondé nos démocraties que la connaissance des grands principes civiques qui organisent nos sociétés.

III-Propositions.

Il est précisément du ressort de l’école de combler le déficit culturel ; cela s’appelle instruire. Rien d’humain ne doit être étranger à cette instruction. La restauration des humanités dans un cadre disciplinaire, solidement structuré et cohérent, est plus à même d’y parvenir que le désordre transversal qui caractérise les nouveaux enseignements. L’enseignement de l’histoire, de l’art et de la philosophie des diverses religions y trouvera sa place. Une conception raisonnée des programmes, à l’abri des modes, lui attribuera le juste espace qui lui convient.

Le cours d’éducation civique, du primaire au secondaire, est le lieu privilégié pour l’apprentissage des principes du civisme républicain et de la laïcité, des textes majeurs qui en développent les valeurs. C’est la seule garantie de l’intégration égalitaire de tous les futurs citoyens ; c’est le moyen unique de favoriser le respect mutuel et plus tard la paix civile.

Conclusion.

Le Comité Laïcité République ne renonce pas à la liberté de débattre sur la pertinence de l’enseignement du fait religieux au sein de l’école publique. Il dénonce son introduction précipitée et inconsidérée dans sa forme actuelle qui présente un véritable danger pour la Laïcité.

CLR, 15 mai 2003


Comité Laïcité République
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