Revue de presse

Encore une loi sur les discriminations (lefigaro.fr , 1er sept. 15)

13 septembre 2015

"Le texte de la Chancellerie prévoit la possibilité de mener des actions de groupe, pouvant donner lieu à des dommages et intérêts parfois conséquents.

Faire du neuf avec du presque vieux. Le premier ministre, Manuel Valls, a annoncé dimanche à La Rochelle le dépôt d’un « projet de loi pour l’égalité et contre les discriminations ». « Les discriminations du fait de l’origine, de la couleur de peau, de la religion, de l’orientation sexuelle, ou parce que l’on est une femme, sont des humiliations quotidiennes. Des humiliations que nous ne pouvons accepter, et nous proposerons un projet de loi pour l’égalité et contre les discriminations », a-t-il martelé.

De quoi flatter les militants socialistes qui ont peut-être oublié qu’il existe déjà une loi en la matière, celle de 2008 transposant trois directives européennes. C’est sur cette première base légale que la Chancellerie a peaufiné un dispositif complémentaire d’ailleurs déjà présenté en Conseil des ministres en juillet dernier. La lutte contre les discriminations figure en effet, en bonne place du texte fleuve « J21 » - qui vise à moderniser la justice et sera discuté au cours de l’automne.

En l’occurrence, il sera désormais possible de mener des actions de groupe en matière de discrimination. « Trop souvent les personnes renoncent à porter plainte pour discrimination, par peur de ne pas être pris au sérieux ou parce que le préjudice paraît bien minime pour engager une action en justice. L’action de groupe permet d’être davantage pris au sérieux par le juge d’autant que l’administration est plus évidente puisque plusieurs personnes se plaindront des mêmes faits », fait-on valoir à la Chancellerie.

Cette procédure soutenue et développée depuis de longs mois par le député socialiste Razzy Hammadi, est inspirée du droit américain. Elle permet en effet de fédérer autant de gens que possible pour lancer une action en justice et donner lieu à des dommages et intérêts parfois conséquents. Elle sera à l’initiative exclusive des associations et des syndicats. Pour Céline Parisot de l’Union syndicale des magistrats (USM) si « lutter contre les discriminations est noble, il faudra voir à l’usage. Ce sont de très lourds dossiers, et des audiences de très grande ampleur peu simples à gérer ».

En l’occurrence, le texte est maximaliste. Il ne propose pas de motifs limitatifs mais s’appuie sur la vingtaine de critères déjà contenus dans la loi de 2008. Ainsi peut-il être retenu, l’âge jusqu’aux caractéristiques génétiques sans oublier l’apparence physique, le handicap, la situation de famille, le patronyme, le sexe, l’orientation sexuelle, l’activité politique ou syndicale, les mœurs, l’origine, le lieu de résidence et, bien sûr, l’appartenance ou non à une ethnie, à une nation, à une race ou à une religion déterminée.

Visant large, le texte n’a pas, non plus, établi de liste exhaustive des secteurs concernés par cette action de groupe. « Cela peut concerner les transports, les soins, le logement, mais aussi le secteur privé ou public », rappelle-t-on à la Chancellerie. En clair, l’action de groupe pour discrimination concernera autant le juge administratif que le juge judiciaire. Les rédacteurs de la loi ont inséré un chapitre spécial concernant le droit du travail. Une volonté particulière de Christiane Taubira, la garde des Sceaux, qui a été favorablement arbitrée par le premier ministre. De quoi donner des sueurs froides à toutes les directions de ressources humaines qui ont désormais une épée de Damoclès suspendue au-dessus de leur tête. « Cela les obligera à se mettre en conformité avec la loi », sourit-on à la Chancellerie, où l’on affirme ne pas « vouloir déstabiliser l’économie mais créer une arme efficace et dissuasive contre des schémas répétitifs de discrimination ». Pour adoucir la pilule, la procédure prévoit deux temps : une mise en demeure afin de donner aux entreprises le temps - entre quatre et six mois - de rétablir la situation. Si ce n’est pas le cas, elles seront confrontées aux affres des procès monstres."

Lire "Discriminations : un projet de loi aux contours très larges".


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