31 janvier 2023
[Les éléments de la Revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]
Geneviève Delaisi de Parseval, L’art d’accommoder la vieillesse, Odile Jacob, 176 p., 17,90 €.
Lire "Elisabeth Badinter : "La France est gérontophobe"".
[...] Voir l’être humain dans sa complexité est source de progrès pour la compréhension de ses besoins et désirs, et donc de son mieux-être. Cela est vrai pour le bébé comme pour le vieux.
En 1980, Geneviève Delaisi de Parseval publie avec l’anthropologue Suzanne Lallemand un livre qui fit beaucoup de bruit : L’art d’accommoder les bébés. Il s’adressait aux mères soumises aux conseils pratiques, parfois contradictoires, des spécialistes de la petite enfance. La connaissance de la petite enfance balbutiait encore. "Il fallait se souvenir, dit-elle, des anciennes garderies de bébés aussi désolantes que les maisons de retraite actuelle." Sous l’impulsion de spécialistes de haut vol, la France a fait une volte-face intellectuelle que le monde entier de la petite enfance nous a enviée, puis copiée. Les crèches sont devenues d’extraordinaires lieux de vie et de socialisation. On a même découvert l’importance des interactions entre bébés.
Et Geneviève Delaisi de Parseval d’insister sur le parallèle entre la psychodynamique de la petite enfance et celle de l’étude du vieillissement. Nul doute que c’est l’évolution de la condition du bébé qui lui a donné à penser celle de la vieillesse : la maltraitance pour ces deux âges de la vie, l’absence d’intérêt pour leur bien-être, et aujourd’hui pour les anciens dans nos contrées.
A juste titre, l’auteure déclare la France gérontophobe - contrairement aux pays nordiques - parce qu’elle connait mal les vieux, leurs facultés et leurs besoins. Peu de travaux sur le sujet ; "tout se passe comme si la vieillesse était un continent peuplé d’individus exilés d’eux-mêmes, un préambule à la mort". De façon générale, la civilisation occidentale n’a d’yeux que pour la jeunesse qui incarne le futur et l’espérance. La cinquantaine venue, beaucoup sont déjà jugés inutiles…
La vieillesse reste le continent noir de notre société, y compris pour la psychanalyse, même si, selon Geneviève Delaisi de Parseval, les premiers signes d’une nouvelle vision du troisième âge se font jour. Elle n’ignore pas la décrépitude des corps, les blessures narcissiques - le moment cruel où on ne se reconnait plus dans sa glace -, les maladies, les pertes de mémoire et les deuils que connaissent les vieux, mais elle n’hésite pas à affirmer que la vieillesse est loin d’être un naufrage.
La psychanalyste donne des clefs intéressantes pour ne pas trop mal vieillir : rester relié à l’identité de sa jeunesse, ce qu’elle appelle "la cohabitation d’un noyau jeune dans un corps de vieux", secret d’une vieillesse suffisamment bonne. Autrement dit : se transformer en restant soi-même, et pour ce faire, il faut continuer à s’aimer, ce qui suppose tout jeune un attachement sûr et fort avec un parent ou éventuellement un autre adulte. Dans sa pratique, l’auteure a pu constater que ceux qui ont eu cette chance d’avoir été assez aimés enfants traversent bien mieux la crise du vieillissement.
D’aucuns diront qu’il faut bien des conditions pour être en état de vieillir le moins mal possible. Vient le temps où il faut affronter l’angoisse de la mort qui se laisse mal apprivoiser. Reste que ce livre a l’immense mérite de regarder la vieillesse sous un jour plus empathique et positif que les stéréotypes de notre époque. [...]"
Lire aussi dans la Revue de presse Laure Adler : « Je suis vieille et je vous emmerde » (Libération, 9 août 22) dans la rubrique Discriminations, "Au Canada, soupçons d’âgisme après le licenciement d’une présentatrice de télévision" (lemonde.fr , 1er sept. 22) (note du CLR).
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