Revue de presse

École Les Arches : « On nous disait qu’on était des élus » (Charlie Hebdo, 21 juin 23)

(Charlie Hebdo, 21 juin 23) 24 juin 2023

[Les éléments de la Revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

"Ils pensaient inscrire leur enfant dans une école hors contrat installée dans un cadre de rêve, mais l’aventure a tourné court. Derrière les carences éducatives et les problèmes d’internat, une équipe pédagogique aux méthodes inquiétantes. Qui dirige vraiment Les Arches ? En se penchant sur la question, Charlie Hebdo a déterré une affaire hors du commun, mêlant secte d’extrême droite, rituels ésotériques et décès suspect.

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Lire "École sectaire : « On nous disait qu’on était des élus »".

La promesse était belle. Une école différente, tournée vers la nature, proposant une pédagogie fondée sur le respect du développement de chaque enfant. Une autre façon d’apprendre, débarrassée des scléroses et du manque de moyens de l’école publique. Une de ces structures à la mode, dont les effectifs ont triplé en dix ans, qui promettent des miracles aux parents d’enfants en difficulté avec le système public. Raphaël, 13 ans, pourtant bon élève, ne souffrant d’aucun trouble « dys », se réjouissait d’intégrer l’école Les Arches, un établissement privé hors contrat situé à Pontarmé (Oise). Comment résister à un tel endroit  ? Un château, en internat, quelque chose comme « Harry Potter, nous raconte le garçon, avec les douves, les arbres, et à côté, la forêt visible pendant les récrés. C’était incroyable, vraiment ».

Alors en classe de cinquième, Raphaël traverse jusque-là une scolarité classique dans un collège ordinaire. Mais il s’ennuie, il s’ennuie assez pour que ses parents soient tentés de lui trouver un établissement différent. « Je crois que nous avons contacté à peu près tous les établissements qui proposaient des pédagogies alternatives, dans la région parisienne et à Paris intra-muros », explique à Charlie la mère de Raphaël, Karen. Ils tombent alors sur le site Internet de l’école Les Arches, un collège qui se dit Montessori et qui propose des classes allant de la sixième à la terminale, un parcours bilingue et des activités « concrètes et pragmatiques ».

Des enfants livrés à eux-mêmes

Sur cette page Internet, une accroche fait mouche : « Que penses-tu d’un collège où on apprend à réfléchir et non à réciter des leçons  ? » Voilà les parents ferrés : « C’était peut-être ça, ce qui manquait à Raphaël. L’accompagner pour devenir un adulte éclairé, responsable. Voilà, on s’est dit bingo  ! » Rapidement, un premier contact est établi avec la directrice de l’école, une certaine Élisabeth Hügli [1]. Elle interroge longuement les parents sur leurs attentes. Et réitère la promesse pédagogique : aux Arches, les enfants sont impliqués dans leur parcours et profitent d’activités qui leur permettent de s’ouvrir au monde, pas seulement d’acquérir des savoirs théoriques. La famille de Raphaël rencontre une dizaine d’autres parents, tous désabusés de l’école publique. Et tous séduits par la promesse des Arches et la personnalité, affable et accueillante, de la directrice.

Mais entre les parents et l’école, la lune de miel tourne court. Quatre jours avant la rentrée, l’équipe pédagogique emmenée par Élisabeth Hügli met le premier coup de canif dans le contrat : l’internat ne pourra pas se tenir au château, comme promis. Une solution de rechange est annoncée dans la précipitation : les enfants seront logés chez leur professeur de sport, Gaspard Nouaille, qui habite à proximité. « J’étais un peu surprise, se souvient Karen. J’ai eu la sensation qu’on nous mettait devant le fait accompli. Les enfants devaient traverser la forêt pour s’y rendre. Mais Raphaël avait l’air heureux, j’étais un peu coincée, et la directrice nous a dit que ce serait temporaire. »

À mesure que l’année scolaire s’écoule, la promesse de l’inter­nat au château s’éloigne. Il n’y a pas non plus de parcours bilingue et le contenu des enseignements laisse globalement à désirer. Plusieurs parents, que nous avons rencontrés, évoquent des enfants « livrés à eux-mêmes » et tenus de gérer les corvées de la maison. Côté discipline, les règles mises en place par la direction surprennent et inquiètent. «  Élisabeth Hügli m’avait demandé d’enquêter et de la renseigner sur des élèves », nous a confié un des camarades de Raphaël. Ce dernier confirme et ajoute : « Ils organisaient comme des tribunaux, où on devait se juger entre nous, il fallait condamner nos copains devant tout le monde. »

« On nous disait qu’on était des élus »

Régulièrement, l’adolescent relate à sa mère les discussions qu’il a avec ses professeurs. « Raphaël m’a dit plusieurs fois qu’il n’en pouvait plus du mot « communauté », qu’il entendait constamment. C’était : « Vous faites partie d’une communauté ici, vous avez de la chance. » » Les termes choisis par les adultes sont équivoques : « On nous disait aussi qu’on était des « élus ». L’un des professeurs disait qu’on se marierait entre gens de la communauté plus tard, que le monde extérieur était mauvais », se souvient le garçon. Autant d’éléments qui inquiètent l’entourage de Karen : « Mes proches disaient que toute cette histoire était bizarre, que ça ressemblait à une secte. Mais je n’avais pas de recul, et je crois que ça m’agaçait que les gens fassent l’amalgame entre école hors contrat et secte. »

Karen, ainsi qu’une bonne moitié des parents de la classe de Raphaël, écrivent de plus en plus souvent à Élisabeth Hügli et son équipe pour s’enquérir de leurs méthodes, ou évoquer les problèmes d’internat et d’enseignement. Petit à petit, les échanges se tendent. Certains élèves sont exclus et, finalement, la moitié de la promotion est mise à la porte. « Ils ont aussi commen­cé à reprocher à Raphaël des problèmes de comportement dont nous n’avions jamais eu vent, témoigne sa mère. J’ai écrit à la directrice que nous avions été très patients et tolérants vis-à-vis des nombreux manquements de l’école depuis le début de l’année scolaire et que j’allais donc en faire part au rectorat et à la préfecture. » La réponse d’Élisabeth Hügli, que nous avons pu lire, est sans appel : « Nous prenons note de votre entière insatisfaction vis-à-vis de notre établissement. Votre manque de confiance à notre égard entraîne de fait une rupture de contrat. […] En effet, nous ne pouvons pas travailler sans confiance et sans adhésion aux principes de la pédagogie Montessori [2] pour adolescents. »

Raphaël est exclu définitivement. Sans attendre, sa mère prévient le rectorat et la préfecture. Se rappelant les doutes de ses proches, elle prévient aussi la Mission interministérielle de vigilance et lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) et commence ses propres recherches sur la direction de l’école. Courant mai 2022, elle tombe sur un clip vidéo sur YouTube. Un groupe de jeunes femmes masquées, Les Brigandes, chantent On s’en branle. Glaives dressés au-dessus de la tête, elles préviennent : « Des lois de la République, de l’opinion publique, du fisc et des flics, on s’en tamponne. […] On ne respecte que ceux qui vont porter le feu contre nos ennemis. » Sidérée, Karen reconnaît, parmi elles, Élisabeth Hügli, la directrice des Arches.

Des êtres intermédiaires entre l’homme et le dieu

Les Brigandes, c’est quelque 80 morceaux aux paroles toutes plus explicites les unes que les autres, mêlant racisme, anti­sémitisme, homophobie… Le groupe, classé à l’extrême droite, a connu un bref moment de gloire avec un éloge musical de Jean-Marie Le Pen, qui leur a fait l’honneur d’une apparition dans le clip. Les chanteuses sont dirigées par Joël Labruyère, leur parolier et figure tutélaire inconnue du grand public, mais qui jouit d’une certaine réputation dans les milieux ésotériques et d’extrême droite. Il est le fondateur de feu l’Omnium des liber­tés, la première association à avoir défen­du le droit à exister des mouvements soupçonnés de dérive sectaire, fondée peu après les suicides de masse de l’Ordre du Temple solaire, suicides qualifiés de « machination d’État pour lancer une cabale antisecte ». Mais avant tout, Labruyère est Elioshé, le chef de sa propre communauté, successivement baptisée La Nation libre, Royaume elfique, Le Clan des brigandes, puis, à partir de 2019, La Rose et l’Épée. Depuis 2014, le groupe d’une trentaine de personnes vit à La Salvetat-sur-Agout (Hérault), avec leurs enfants dé­scolarisés, histoire de leur éviter le « viol psychique de masse » de l’Éducation nationale. Un pedigree impressionnant.

« Chez Labruyère, on est des elfes, on n’est plus des hommes, témoigne Annick auprès de Charlie. On vit vraiment au-dessus de la mêlée, comme des êtres intermédiaires entre l’homme et le dieu, ou l’homme et l’ange, c’est-à-dire des créatures supérieures. On doit changer de nom, et d’ailleurs, ce qui est tout à fait sidérant, c’est qu’on oublie son nom de baptême. Une langue et une écriture ont même été inventées pour que personne ne puisse comprendre les messages secrets qu’on transmet à nos membres. Tous les autres, toute personne du monde, sont des ennemis, puisqu’ils ne sont pas initiés. » Cette ancienne adepte est restée neuf ans dans la communauté de Labruyère, et en est sortie difficilement en 2013. Elle évoque pour nous l’emprise et le système dont elle a été captive : « Il m’a fait démissionner, quitter ma famille, vendre ma maison… J’ai été traitée comme un ennemi intérieur, je passais régulièrement devant des tribunaux constitués de gens cagoulés, avec des épées pointées dans le noir au-dessus de ma tête, proférant des malédictions. »

Quel rôle la directrice des Arches tenait-elle au sein de cette communauté ésotérique  ? Annick ainsi qu’une autre ex-adepte qui préfère rester anonyme sont formelles : Élisabeth Hügli, ou plutôt Lil Kaitesi, de son nom elfique, occupait un rôle majeur dans la hiérarchie de La Nation libre. « Elle est arrivée peut-être un an après le démarrage. Elle faisait office de reine, une autorité morale et religieuse, qui disposait d’un pouvoir politique. C’était le bras droit de Labruyère, ils formaient quasiment un couple mystique. Elle était sur tous les fronts, et gérait avec lui la ligne directrice de la commu­nauté afin de la faire prospérer », décrypte Annick, qui décrit une femme « très autoritaire, très humiliante, très imprévisible. Et très intelligente ».

À leurs côtés, Lucien Tschabold dit Luls Luhai, cofondateur des Arches, était chargé des relations avec l’extérieur et de l’édition des revues publiées par la communauté, comme Abraxas ou V.I.T.R.I.O.L. Un homme « très discret, mais implacable, qui a bien compris qu’il avait des choses à apprendre et que le fond de la doctrine, il en ferait sa vie », poursuit Annick. Plus tard, ils sont rejoints par Gaspard Nouaille, le professeur de sport chez qui les enfants des Arches ont été hébergés : « Il est arrivé bien plus tardivement, vers 2011 ou 2012. Il avait plutôt un profil de gentil anthro­posophe. C’était un sujet prometteur, un athlète accompli, très intéressé par les arts martiaux. »

Un décès aux circonstances obscures

En 2011, La Nation libre est marquée par un événement aux circonstances obscures : le décès, en Belgique, d’une des adeptes, Sophie, « complètement investie » dans la communauté, se rappelle Annick. Quand Sophie apprend qu’elle est atteinte d’un cancer de l’utérus, à 38 ans, elle envisage d’abord de se soigner. « Elle en a été découragée. Il a été décidé que, quand on a un cancer, on risque de perdre son âme en le soignant. On ne doit pas aller contre la maladie. Car le corps a des cellules immortelles, et le cancer est un dérapage du désir d’immortalité du corps », explique l’ex-adepte à Charlie Hebdo. Une conception ésotérique qui correspond parfaitement aux thèses occultes développées par Joël Labruyère dans un ouvrage signé sous pseudonyme, Le Problème du cancer. Comment assimiler les rayonnements de l’ère du Verseau  ? où il considère que « toutes nos tentatives pour combattre ce mal sur un plan horizontal, tels que les rayons artificiels […] demeurent obligatoirement négatives dans leur effet ». Selon deux témoignages concordants, Sophie aurait donc accepté son sort et se serait livrée à un jeûne jusqu’au jour de son décès : « Je pense quand même que ce qui est arrivé est contre- nature, avec le niveau de souffrance qui lui a été infligé, d’accepter un jeûne comme ça, pour mourir… Ça a quelque chose d’un rituel sacrificiel », déplore aujourd’hui Annick.

Conséquence du jeûne, de l’absence de soins, ou effet d’une maladie incurable, les circonstances exactes de la mort de Sophie sont suffisamment floues pour que la justice ait ouvert, en 2019, une enquête pour assassinat. D’autant que, dans les jours qui ont précédé son décès, la quadragénaire a signé des papiers, consultés par Charlie, donnant des instructions très précises. Parmi celles-ci : « Je refuse toute intervention sur mon cadavre, un drap blanc recouvrira mon corps et, en dehors du médecin qui constatera le décès et mon mari [un adepte avec qui elle s’est mariée peu de temps avant de mourir, ndlr], qui déposera le drap, je n’autorise personne à toucher mon corps avant un délai de trois jours. Mon époux annoncera le décès à ma famille par téléphone une fois ces trois jours écoulés. » Sur les mêmes documents, elle demande à être incinérée.

Le soir de sa mort, les femmes de la communauté veillaient Sophie, qui poursuivait son jeûne. Parmi elles, selon nos deux témoins : Élisabeth Hügli. Ces éléments, rapportés à la police belge, ont été pris « très au sérieux », nous a confirmé une source proche de l’enquête.

Des plaintes suspectes

En janvier 2015, cinq anciens adeptes, dont Élisabeth Hügli, déposent une plainte contre Joël Labruyère, pour abus de faiblesse, travail dissimulé et violences volontaires. Les victimes disent avoir dû « fuir », fin 2014, cette communauté, décrivent la « totale soumission » exigée par un « chef » aux « monologues interminables », qui « diabolise » le monde extérieur, amènerait les plus jeunes à « rompre avec la famille, les amis », contrôlerait les comptes bancaires des adeptes et tenterait de capter certains héritages. Une situation plaçant l’ex-reine des elfes dans une position de victime, sous l’emprise de Joël ­Labruyère. Un récit bien différent de celui qui nous a été fait du rôle joué par Lil Kaitesi : « Élisa­beth Hügli et Lucien Tschabold ont été d’emblée dans le cercle supérieur du groupe. Effectivement, eux ne devaient absolument pas être soumis à la moindre tracasserie ni à la moindre humiliation. Jamais », maintient encore Annick.

Victimes ou coresponsables, Élisabeth Hügli et Lucien Tschabold ont quitté La Nation libre peu avant le dépôt de plainte. Il semble donc qu’ils se soient, depuis, reconvertis dans l’éducation hors contrat, tendance Montessori. Ont-ils cessé leurs activités ésotériques pour autant  ? Au printemps 2020, alors que la France se confine, Pierre [3] se cloître avec sa petite amie pour affronter la pandémie. Il assiste à une curieuse routine : sa compagne quitte régulièrement le domicile pour des réunions secrètes dont elle rechigne à lui parler. « Elle bravait le confinement pour retrouver ses camarades du groupe dans le 95, à Luzarches, raconte le jeune homme à Charlie Hebdo. Elle ne pouvait pas aller contre les ordres. Elle recevait des messages qui disaient : « Viens tout de suite, on a besoin de toi. Tu viens tout de suite, ce n’est pas discutable. » » Sa compagne lui explique aussi qu’elle fait « des virements de 500 à 1 000 euros par mois pour organiser des réunions, des dîners, pour pouvoir promouvoir ce cercle. Elle a aussi fait plusieurs jeûnes, a perdu beaucoup de poids, ce qui inquiète sa famille ».

Un soir où elle s’est absentée, préoccupé par la situation, Pierre fouille dans ses affaires et découvre d’étranges documents. On y mentionne « un langage secret et le fonctionnement des réunions du groupe. Il y avait aussi des ordres pour les adeptes, afin de braver le confinement, suivis de tout un tas de rites ésotériques. Le document était signé par Élisabeth. J’ai appris par la suite qu’elle s’appelait Élisabeth Hügli, ex-membre des Brigandes. Le groupe comprenait aussi Lucien Tschabold ». Sur l’une des feuilles de papier, consultée par Charlie Hebdo, un ­en-tête : « Au nom du Dieu inconnu. Ordre du Dragon d’or. Filiation Societas draconistrarum 1408. Rite Nahassite moderne. » Nous avons soumis ce document à Annick. « C’est Labruyère qui a lancé l’ordre du Dragon, l’ordre Societas draconistrarum. C’est la loge qui a été revendiquée par Labruyère et mise en place par Lucien Tschabold, du temps où nous étions dans les Pyrénées, avec la communauté. Tous les adeptes sont membres de la Societas draconistrarum, ils ont tous une fonction d’officier dans cet ordre-là. »

Formater les enfants

Est-ce à dire qu’Élisabeth Hügli et ses compagnons ont poursuivi leurs activités ésotériques après leur rupture avec Joël Labruyère  ? Pour Annick, « ils ont tout simplement réclamé l’héritage de la loge et la filiation avec la société du dragon qui allait avec. Ils sont dans un rite nahassite, c’est un rite lié au culte du serpent, le symbole de la désobéissance ». Pierre est resté six mois avec sa compagne. Il a lui aussi prévenu la Miviludes, après qu’elle lui a parlé des projets du groupe de fonder une école. « Elle m’a parlé d’une école Montessori, qui était dans un château, à Pontarmé. Elle m’a dit qu’il y avait plusieurs dizaines d’élèves qui étaient affiliés à cette école, et que Lucien et Élisabeth en étaient à la tête. »

Quel objectif recouvrait la fondation de cette école  ? ­Aujourd’hui choquée par les éléments découverts, Karen, la mère de Raphaël, a une lecture bien différente des motivations d’Élisabeth Hügli : « Je suis en colère de m’être fait avoir, car jusqu’à l’exclusion de Raphaël, je ne voyais pas l’aspect sectaire, ni les manipulations. Je me suis souvenue qu’au premier appel ils nous ont posé énormément de questions sur ce qu’on cherchait. Quand on s’est rencontrés, toute la présentation de l’école collait avec ce qu’on avait évoqué, le discours était ultra rassurant et séduisant. » Un élément l’interpelle a posteriori : l’affaire de l’internat. Alors que, selon nos informations, la direction de l’école savait dès le mois de juin 2021 que le château de Pontarmé n’avait pas le droit de proposer un internat aux enfants, les parents que nous avons interrogés nous ont raconté s’être vu demander de signer une délégation d’autorité parentale à Gaspard Nouaille, qui devait accueillir les enfants. Un document illégal. Une mère anonyme dit avoir fait l’objet de pressions à partir du moment où elle avait commencé à émettre des doutes. « Il lui a été indiqué qu’il fallait retirer son enfant de l’influence de ses parents pour qu’il puisse se mettre au travail et rentrer dans le moule Montessori », nous rapporte-t-on. Pour Annick, le projet d’école consiste « à formater des êtres qui prendront la relève, reprendront le projet et le feront fructifier. C’était le projet de Labruyère, ils le poursuivent en prenant cette fois les enfants au nez et à la barbe de leurs parents. Le culot  ! ».

Où en sont les projets de la Societas draconistrarum ­d’Hügli et Tschabold  ? En septembre 2022, la préfecture a interdit ­l’accueil du collège-lycée des Arches pour la rentrée scolaire 2022–2023 au château de Pontarmé. « Le site de l’école continue à en utiliser le nom pour faire sa promotion, déplorent aujourd’hui ses propriétaires. Quand nous avons découvert qui ils étaient vraiment, nous sommes tombés des nues. » Pour poursuivre son activité, l’établissement s’est d’abord relocalisé dans un camping. Après les multiples alertes de Karen, l’école a été contrôlée par les différents services de l’État, fin 2022. D’après nos informations, étaient présents ce jour-là les renseignements territoriaux, un représentant de la préfecture de l’Oise, du rectorat, les gendarmes et les pompiers – des manquements ont été constatés et des infractions pénales recensées. L’établissement a été temporairement fermé et, après un temps d’enseignement à distance, en début d’année, l’équipe pédagogique et les élèves ont retrouvé un hébergement dans une école alternative en Paca, puis dans la baie de Somme. À ce jour, Les Arches n’ont pas été définitivement fermées et dirigent même un autre établissement scolaire situé à Mortefontaine (Oise). Cette fois, il s’agit d’une école maternelle et primaire."

[1Durant cette enquête, nous avons essayé d’entrer en contact à plusieurs reprises avec Élisabeth Hügli, Joël Labruyère, Lucien Tschabold et Gaspard Nouaille, sans succès.

[2La fédération des écoles Montessori a fait savoir à Charlie Hebdo que l’école Les Arches n’était ni adhérente ni signataire de leur charte et que le label n’étant pas une marque déposée, chacun était libre de se revendiquer de cette pédagogie alternative. Interrogée sur les méthodes des Arches, la fédération s’est montrée plus que dubitative, estimant que, notamment en matière de discipline, cela ne correspondait pas à l’esprit de la pédagogie Montessori.

[3Le prénom a été changé.



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