par Samuel Mayol 17 décembre 2021
[Les échos "Culture" sont publiés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]
Edouard Louis, Combats et métamorphoses d’une femme, éd. Seuil, 1er avril 21, 128 p., 14 €.
Je referme à l’instant le dernier livre d’Edouard Louis.
Style précis, chirurgical et contre-romanesque, c’est le parti pris d’Édouard Louis. Littérature combat, littérature politique, littérature témoignage : Édouard Louis s’est donné une mission, écrire pour les invisibles, les sans-grades, les damnés de la Terre brisés par une vie subie.
Portrait d’une mère aimée et parfois haïe, portrait d’une femme souvent ignorée.
Radical, « Combats et métamorphoses d’une femme » est le récit d’un pardon à demander et à donner. Un poignant récit de retrouvailles.
Et dans ce livre, il va réhabiliter sa mère, Monique.
Cette femme, enceinte à dix-sept ans, abandonne ses études pour épouser le père de son enfant. Son époux se révélera un véritable tortionnaire. Travaillant dans une usine, il rentre tardivement le soir, ivre. Il est méchant, il l’humilie.
Avec ses deux enfants, elle quitte cet homme, tombe amoureuse du père d’Eddy, notre auteur, et avec lui aura encore deux enfants, des jumeaux. Elle aurait bien voulu avorter mais son époux lui refuse ce droit.
Nous sommes dans les années 1990, le droit à disposer de son corps est pourtant reconnu. Elle mène sa grossesse à terme et n’a plus aucune autonomie. Elle est coupée du monde. La famille vit dans la misère, le plus grand dénuement. Son second mari est également un alcoolique. Quelle détresse familiale.
Seul Eddy sortira brillamment de ce quart-monde.
Il nous dépeint la triste vie qu’a connu la famille. C’était pourtant une mère courage, mais placée sous la dépendance de ses époux. Elle a mené une existence de femme recluse. Son fils avait même honte de sa conduite et il lui interdisait de venir à l’école.
Et puis la métamorphose… elle a pris son envol et a quitté son époux.
Mais elle a patienté plus de vingt années de servitudes, victime de violences de la part de ses époux.
Quelle abnégation, que de dévouement, de sacrifices elle a enduré !
Eddy ou Édouard offre de belles sorties à sa mère. Il y a tant de temps à rattraper.
J’éprouve beaucoup d’empathie pour cette femme. Elle a mené un dur combat pour gagner sa liberté.
Édouard apporte du bonheur à cette femme qui n’a pas eu de chance, qui a toujours obéi à un homme et qui enfin aujourd’hui revit, sort, fait du shopping, va au restaurant avec son fils. Une belle preuve d’amour et un hymne à sa mère.
Je compatis à l’émancipation de cette femme.
Un petit chef d’œuvre. Merci pour ce récit empreint de beaucoup d’amour.
Samuel Mayol
Voir aussi dans la Revue de presse le dossier « Rendez-vous de l’histoire » à Blois : Edouard Louis contre Marcel Gauchet (juil.-août 14) dans Chasse aux “nouveaux réacs” dans Liberté d’expression ;
F. Beigbeder : "Qui a tué mon père, d’Edouard Louis : Germinal réécrit par Calimero" (Le Figaro Magazine, 25 mai 18) (note du CLR).
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