Note de lecture

E. Badinter : Trois passions vers les Lumières

par Aube Passeron. 13 avril 2019

Elisabeth Badinter, Les Passions intellectuelles, éd. Robert Laffont, "Bouquins", 1216 p., 32 e.

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Je partage aujourd’hui avec vous un beau livre d’Elisabeth Badinter, Les passions intellectuelles, publié dans la collection Bouquins chez Robert Laffont.

Dans cet essai de plus de 1000 pages, elle nous raconte les amitiés et les brouilles, les mesquineries ordinaires, la générosité et les fulgurances de ces savants et philosophes dont les œuvres furent la substantifique moelle des Lumières au XVIIIe siècle.

Elle analyse les trois passions qui guidèrent ces grands hommes - le désir de gloire, l’exigence de dignité et la volonté de pouvoir - et qui contribuèrent à l’émergence d’une opinion publique.

Le récit débute en 1735, quand Maupertuis défia les Anciens dans la prestigieuse Académie des Sciences… et se termine en 1778 à la mort de Voltaire.

Nous voyons défiler les querelles d’idées et les rivalités des mathématiciens, les difficultés de d’Alembert et Diderot pour mener à bien l’Encyclopédie, les exils des philosophes chez les despotes éclairés, et la transformation dans la deuxième partie de sa vie, de Voltaire, l’écrivain de renom à la plume acérée, en pourfendeur des injustices et du fanatisme.

Ce dernier « lutta contre l’infâme » jusqu’à la fin. Il ne fut pas seulement une tête pensante ni un courtisan des princes. De même que Montesquieu (L’Esprit des Lois) et plus tard Condorcet, mathématicien et député girondin (Instruction Publique, droit pénal, vote des femmes etc…) le patriarche de Ferney se mêla des affaires de la Cité, en dénonçant sans relâche les scandales judiciaires et l’intolérance religieuse.

Il fut seul à mener ce combat, même si ses pairs l’approuvaient dans l’espace feutré de leur bureau de réflexion. II avait tenté de les rassembler dans le Parti des Philosophes, ce qui leur aurait permis de mieux résister aux cabales des envieux et à la tyrannie des puissants. Mais cette approche plus politique n’eut guère de succès à l’époque.

La plume talentueuse d’Elisabeth Badinter fait revivre sur la grande scène de l’Histoire bien d’autres personnages hauts-en-couleurs et aussi de moins connus qui méritaient de sortir de l’ombre.

Si vous aimez les belles épopées qui ont forgé notre inconscient collectif, précipitez-vous sur cet ouvrage extrêmement bien documenté.

Aube Passeron


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